Commentaire d'arrêt, Première Chambre Civile, Cour de cassation, 18 janvier 2012, contribution aux donations des parents
Quatre arrêts relatifs à des avantages indirects consentis par des parents à l'un de leurs enfants ont été rendus par la Première Chambre Civile de la Cour de cassation le 18 janvier 2012, la Cour souhaitant rappeler que l'intention libérale de ces avantages devait être prouvée afin de les qualifier de donations et les rapporter à la succession des parents décédés.
L'arrêt du 18 janvier 2012 pourvoi n°11-12863 est particulièrement intéressant puisqu'en plus de rappeler ce principe, il a trait à la contribution aux donations des parents lorsqu'il s'agit de biens communs du couple.
[...] L'article 850 dispose quant à lui que le rapport ne se fait qu'à la succession du donateur Par la combinaison de ce principe et de la règle de la contribution des deux époux à la donation commune, la Cour de cassation a pu ainsi énoncer que seule la moitié des libéralités était rapportable à la succession du défunt, si bien sûr les avantages consentis par les parents étaient qualifiés de libéralités. Cette solution est nouvelle, et la Cour l'a énoncée alors que ce n'était pas la réponse à la question de droit soulevée dans le moyen des parties. Elle l'a en effet énoncée de manière originale, en relevant d'office le moyen. [...]
[...] B : Un attendu de principe inattendu Dans son arrêt du 18 janvier 2012, la Cour de cassation a relevé un moyen d'office, c'est-à-dire qu'elle avec l'accord des parties, relevé un moyen qui n'avait pas été soulevé par ces dernières. Cette procédure est permise par l'article 620 du Code de procédure civile qui dispose que la Cour peut casser la décision attaquée en relevant d'office un moyen de pur droit et l'article 1015 du même Code qui dispose que le président de la formation doit aviser les parties des moyens susceptibles d'être relevés d'office et les inviter à présenter leurs observations Ainsi, alors qu'elle aurait pu se contenter de casser l'arrêt de la cour d'appel au motif qu'elle avait privé sa décision de base légale, la Cour de cassation a relevé d'office le moyen selon lequel les juges avaient violé les dispositions des articles et 1439 du Code civil et a pu énoncer un attendu de principe selon lequel la donation d'un bien commun est rapportable par moitié à la succession de chacun des époux codonateurs Elle marque ainsi sa volonté de rétablir des règles précises en matière de rapport à la succession, en restreignant le rapport des avantages indirects tant qu'il n'a pas été prouvé qu'ils constituaient de véritables libéralités et en imposant qu'ils ne soient rapportés que par moitié à la succession du premier parent défunt afin qu'ils puissent à nouveau être rapportés à la succession du second parent, créant ainsi une contribution de chacun des parents à la donation. [...]
[...] B : L'exigence d'une intention libérale pour le rapport à la succession de prétendues donations L'article 894 du Code civil dispose que la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte Les éléments constitutifs d'une donation sont donc l'appauvrissement du donateur et l'enrichissement du donataire, puisqu'une donation se fait par définition sans contrepartie, et l'animus donandi : l'intention libérale du donateur, qui doit avoir la volonté de s'appauvrir pour enrichir le donataire. La donation est en principe un acte notarié, mais les donations indirectes sont admises dès lors que l'intention libérale et le caractère irrévocable sont prouvés. [...]
[...] Les parents ont en effet payé à sa place d'une part les frais de l'acte de donation dont le remboursement n'a pas été allégué, et des travaux sur l'immeuble qui était alors devenu la nue-propriété de la fille, et d'autre part l'ont hébergée pendant vingt ans sans qu'elle leur règle de loyers. L'existence d'avantages indirects est certaine, et la Cour d'appel a décidé qu'ils constituaient alors des libéralités, qui sont donc rapportables à la succession du père décédé, au vu de l'article 843 du Code civil. [...]
[...] Cela montre la volonté de la Cour de lutter contre l'appréciation trop souple de la définition de donation. Elle va ainsi à l'encontre de la jurisprudence antérieure, en exigeant bien la preuve de l'intention libérale pour pouvoir rapporter un avantage à la succession du donateur, et cette preuve doit être rapportée par celui qui l'invoque. Le domaine du rapport est donc réduit, puisque l'article 843 ne s'applique qu'aux donations alors que les juges l'appliquaient auparavant pour les avantages indirects sans que l'intention libérale, et donc la donation, ne soit prouvée. [...]
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