Commentaire d'arrêt, Première Chambre civile, Cour de cassation, 11 février 2009, succession immobilière
De manière générale, le juge peut très bien n'appliquer que ses propres règles de conflit pour éviter toute complication. Seulement, il ne faut pas négliger l'application de certaines règles étrangères. En effet, celles-ci peuvent être avantageuses. Le droit français l'a prévu en instituant le système dit du renvoi, dans lequel la règle du for et la règle étrangère jouent cumulativement.
La succession d'une défunte a été ouverte en France. L'un des trois enfants héritiers assigne ses deux autres frères devant le tribunal de grande instance de Pau, soutenant que la vente de deux immeubles situés à Majorque, en Espagne, à ces derniers par leurs parents constituait une donation déguisée.
La Cour d'appel de Pau accède favorablement à sa demande. C'est pourquoi les frères font grief à cet arrêt.
La Cour d'appel estime que « si la règle de conflit applicable en matière successorale immobilière donne compétence à la loi du pays où est situé l'immeuble, en l'espèce la loi espagnole, celle-ci adopte le principe de l'unité de la succession, même en matière immobilière, et donne compétence à la loi nationale du défunt de sorte que la loi française est applicable à l'action ». Elle affirme donc que le système du renvoi, ici, est applicable en matière successorale immobilière.
[...] Il s'agit dans un premier temps de s'intéresser à l'application de la technique du renvoi en matière successorale immobilière pour s'intéresser ensuite à la restriction de l'utilisation de ce renvoi faite par cet arrêt (II). I. L'application d'une loi étrangère, par la technique du renvoi de la règle de conflit du for, en matière successorale immobilière Pour connaître la loi applicable en matière de succession immobilière, il faut d'abord se référer au contenu de la règle de conflit du for en cette matière qui nous indiquera la loi applicable et qui permettra le renvoi de celle-ci Règle de conflit française en matière successorale immobilière : Principe de la lex rei sitae Dans notre arrêt à étudier, nous sommes en présence d'une succession immobilière. [...]
[...] Concernant le renvoi au premier degré, il s'agit de l'hypothèse dans laquelle la loi déclarée applicable par la règle de conflit du for donne compétence à la loi du for. L'admission du renvoi au premier degré est apparue lors de l'arrêt de la Chambre des requêtes du 22 février 1882, Forgo. En l'espèce, la loi française déclare qu'en matière successorale, la loi applicable est celle du lieu où se trouve l'immeuble. Les deux immeubles se trouvent en Espagne. Alors, il faut regarder ce que dit la loi espagnole concernant la succession immobilière. [...]
[...] En effet, pour permettre le renvoi, il faut savoir la nationalité de la défunte, en l'espèce, elle serait française. Seulement, la Cour d'appel ne l'a pas recherché alors la Cour de cassation casse l'arrêt et rend impossible l'application de la loi française, de ce fait. Ceci dit, même si la nationalité de la défunte n'a pas été recherchée, la Cour de cassation a toujours admis le renvoi en matière immobilière. Ici, elle a juste ajouté une condition à la validité du renvoi ce qui restreint l'utilisation de ce système de renvoi en matière de succession immobilière. [...]
[...] Cet attendu affirme qu'« en matière de succession immobilière, le renvoi opéré par la loi de situation de l'immeuble ne peut être admis que s'il assure l'unité successorale et l'application d'une même loi aux meubles et aux immeubles En effet, depuis cet arrêt de 2009, le renvoi doit permettre une unité successorale pour simplifier le déroulement des successions. Ceci est appelé le renvoi-harmonisation. Ainsi, toute la succession peut être régie par la même loi. En l'espèce, la règle de conflit français avait désigné, comme applicable à la succession immobilière, la loi espagnole. La règle de conflit espagnole, quant à elle, affirme que c'est la loi nationale de la défunte qui doit être appliquée. [...]
[...] Ceci pouvait engendrer une certaine difficulté à la réalisation de la succession. Cette utilisation de plus en plus fréquente de la technique du renvoi compliquait le droit. Alors, le seul but de la jurisprudence française était de simplifier le droit pour les particuliers qui sont touchés par le droit international privé, sachant que ce droit souhaite concilier les intérêts privés des particuliers pour une harmonisation internationale avec l'intérêt des États. Par contre, le problème qui peut se poser est le fait que pour savoir si le renvoi remplit cette condition, il faut tout de même regarder la règle de conflit du for, puis aller voir celle qui a été désignée par la règle de conflit du for, pour peut-être se rendre compte que le renvoi ne permettra pas l'unité successorale et revenir au point de départ. [...]
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