Commentaire d'arrêt : « Lejars C. Consorts Templier », chambre civile de la Cour de Cassation, 13 février 1923

Extraits

[...] On relève ainsi un assouplissement de la jurisprudence qui à la base était très exigeante, en cela la portée de l'arrêt est certaine, mais elle est à nuancer. Après avoir établi le dommage moral en tant que tel, c'est à dire le préjudice d'affection, reste à établir le montant de l'indemnisation. Le montant alloué à la victime du préjudice d'affection est évalué en fonction de la gravité du dommage moral, cela en lien avec le principe classique de réparation intégrale du préjudice. [...]

[...] Mais d'autre part, l'indemnisation du préjudice d'affection en application de l'article 1382 du Code Civil n'est possible qu'à l'issue d'une interprétation stricte et exigeante de la notion de dommage moral par ricochet par le juge. En effet, ce dommage moral doit répondre à certaines conditions dans le but d'être considéré comme dommage moral en tant que tel, si le résultat de cette interprétation et concluant, alors ce dommage donnera lieu à une indemnisation proportionnelle. Une appréciation exigeante de la notion de préjudice d'affection, lien de causalité justifiant l'indemnisation D'une part pour que la victime présumée d'un dommage moral par ricochet qui engendre un préjudice d'affection soit indemnisée il faut que son dommage, son préjudice soit légitime et intense tout en étant certain D'autre part, le montant de l'indemnisation est en lien direct avec la gravité et l'intensité du dommage, du préjudice La stricte nécessité d'un dommage intense, légitime et certain dans le but de bénéficier de l'indemnisation du préjudice d'affection, une portée nuancée Au sein de cette décision, le juge de la Cour de Cassation a énoncé de façon plus ou moins explicite les conditions nécessaires à la reconnaissance et à l'indemnisation du préjudice d'affection, au dommage moral par ricochet. [...]

[...] Cependant, il convient de souligner l'absence de méthode déterminée pour estimer les dommages-intérêts liés au dommage moral par ricochet, au préjudice d'affection, ce peut être considéré comme une lacune du système judiciaire français, une brèche d'arbitraire. [...]

[...] Cependant, ce point ne représente pas la question centrale de l'arrêt, en effet l'aspect novateur et audacieux de cet arrêt se situe dans le caractère spécial du dommage dont il est question. Une décision audacieuse de par son caractère novateur, source de l'établissement jurisprudentiel d'un nouveau concept : le dommage moral par ricochet Certes il y a un préjudice moral, cependant celui-ci n'est pas classique en effet il n'est pas direct, la personne victime du préjudice moral est décédée, de ce fait le préjudice moral s'abat sur les enfants qui ne sont pas directement victimes de la faute quasi délictuelle de Lejars mais qui en subissent tout de même les conséquences. [...]

[...] C'est ce qui découle de l'arrêt du 13 février 1923, en effet il dit que les éléments de la cause permettent de déterminer l'importance de l'indemnité Cela est énoncé par le juge de la Cour de Cassation de manière explicite, ainsi il paraît logique de dire que le montant de l'indemnité est en quelque sorte proportionnel à la gravité du dommage subit. Qui plus est, le principe de réparation intégrale du dommage subit est appliqué, en effet c'est le propre de la responsabilité civile (ici quasi- delictuelle) de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage. [...]