Si l'on considère qu'à l'origine, les Romains considérait le dol avant tout comme une « machination », c'est à dire un ensemble d'actes positifs, de manœuvres ou de mensonges visant à tromper le cocontractant crédule, depuis la définition donnée par la jurisprudence du dol a été considérablement élargie et recouvre des comportements beaucoup plus subtils et moins ostentatoires.
Ainsi, cet arrêt de rejet de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation en date du 2 octobre 1978 et relatif à l'invocation d'une réticence dolosive en vue de l'annulation d'un contrat de vente pour vice du consentement, a permis notamment de redéfinir de manière plus large l'objet du dol et sa manifestation permettant un domaine d'application beaucoup plus large que l'erreur de l'article 1110, autre vice du consentement.
En l'espèce, il était question de la conclusion d'une vente portant à la fois sur une maison de campagne et un terrain par un acte sous seing privé avec versement d'une caution qui pouvait, selon les termes du contrat, être conservée par les vendeurs en cas de défaillance des acheteurs. Or, cette convention contenait également une clause de non-garantie de servitudes passives qui n'avait d'intérêt pour les vendeurs qu'au vue de la construction imminente d'une porcherie à une centaine de mètres de l'habitation en question. Les vendeurs n'ayant eu connaissance de cet élément déterminant que postérieurement à la signature de l'acte se sont désistés et ont demandé la restitution de la caution versée arguant que les vendeurs leur avaient sciemment caché le projet de construction de la porcherie et s'étaient donc rendus coupables de réticence dolosive. La Cour d'Appel a consacré cette conception élargie de la notion de dol, défini à l'article 1116 du Code civil mais les vendeurs ont choisi de se pourvoir en cassation.
[...] Ce qui nous amènera à constater la progressive supplantation de la qualité substantielle au profit du caractère déterminant de la réticence. Puis il nous importera de souligner la valeur de cette décision notamment en considération de la consécration de principes régissant les rapports contractuels tels que la loyauté, la bonne foi ou encore l'obligation d'information et de renseignement du cocontractant. L'affirmation d'une extension de la définition du dol de l'article 1116 du Code civil Dans cet arrêt le moyen de pourvoi le plus intéressant concerne la définition que retiennent les vendeurs du dol, à savoir une définition relativement archaïque au vue de la jurisprudence depuis 1958, la Cour d'Appel quant à elle s'était prononcée en faveur d'une acceptation de la réticence dolosive y compris dans les cas dans lesquels elle ne touchait pas directement à la substance même de la convention, elle privilégiait la protection de l'acheteur trompé. [...]
[...] La Cour d'Appel a consacré cette conception élargie de la notion de dol, défini à l'article 1116 du Code civil mais les vendeurs ont choisi de se pourvoir en cassation. Le principal enjeu de cet arrêt était l'acceptation d'un cas de dol par réticence alors même qu'il ne portait pas sur une qualité substantielle de l'objet du contrat- comme cela est exigé pour le vice de l'erreur- mais qu'il présentait cependant un caractère déterminant (apprécié in concreto) pour les acheteurs, citadins, qui voulaient bénéficier d'un peu d'air pur et de dépaysement. [...]
[...] C'est a dire qu'elle réaffirme l'importance du caractère déterminant du dol (de même que pour l'erreur de l'art. 1110). Ici, elle est appréciée in concreto, puisqu'elle précise la qualité et les motifs des acheteurs citadins à la recherche d'une maison de campagne Ceci sous entend fortement que les dits acheteurs recherchaient au delà du cadre champêtre, une certaine tranquillité qui ne peut être compatibles avec l'existence d'une porcherie à moins de 100m. Or ce caractère déterminant était connu des vendeurs tout comme ils étaient au courant de la construction de la porcherie puisque le vendeur principal, Mr Goutailler a été en mesure d'affirmer la date de l'arrêté préfectoral ayant autorisé cette construction. [...]
[...] Le but étant de sanctionner le comportement malhonnête de l'auteur quand bien même il ne se manifeste qu'à travers son silence. Une erreur provoquée par la mauvaise foi de l'une des parties De nombreux arrêts utilisent la notion de l' obligation de contracter de bonne foi qui découle de l'article 1134 al3 du Code civil qui concerne quand à lui le fait que les contrats doivent être exécutés de bonne foi Mais le but de cette extension au moment de la formation du contrat et non à sa seule exécution relève d'un désir de protéger à la fois le contractant et le contrat en lui même. [...]
[...] Et notamment il nous faudra éclairer le paradoxe qui semble découler de cette décision. En effet, il semble qu'en élargissant ainsi à outrance le domaine d'application de la réticence dolosive, la Cour de Cassation ait quelque peu négligé la notion de sécurité contractuelle en ce qu'elle rend possible des annulations plus fréquentes et pour des motifs très subtils. Mais, en réalité, elle tend à accomplir exactement l'inverse en renforçant les notions de loyauté et de bonne foi qui sous-tendent tout contrat. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture