Avec l'arrêt du 4 novembre 2010, la deuxième Chambre civile opère un important revirement de jurisprudence, elle abandonne la théorie de l'acceptation des risques en retenant le principe de la responsabilité sans faute du fait des choses édicté par l'article 1384 alinéa 1er.
En l'espèce, le pilote d'une motocyclette a été blessé par la motocyclette d'un autre pilote au cours d'une séance d'entraînement sur un circuit fermé. Le piloté blessé assigna en réparation les sociétés propriétaires de l'engin, le préparateur, ainsi que le conducteur qui l'avait blessé, sur le fondement de la loi Badinter de 1985 relative à l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation. Une cour d'appel fit droit à sa demande. Mais l'arrêt fut cassé par la deuxième Chambre civile le 4 janvier 2006, qui écarta la loi de 1985 au motif que « l'accident survenant entre des concurrents à l'entraînement évoluant sur un circuit fermé exclusivement dédié à l'activité sportive n'est pas un accident de la circulation ». Loi de 1985 relève du droit spécial, elle s'applique à l'accident survenu lors d'une compétition sportive en circuit fermé (Civ 2e, 10 mars 1988), elle n'est pas applicable entre concurrents à ces compétitions sportives (Civ 2e, 28 février 1996). En conséquence, le litige ne relève pas d'un droit spécial de la responsabilité, mais il dépend bien du droit commun de la responsabilité civile, ie l'article 1384 alinéa 1er.
[...] Commentaire d'arrêt de la Deuxième Chambre civile de la Cour de cassation en date du 4 novembre 2010 : la responsabilité du fait des choses Avec l'arrêt du 4 novembre 2010, la deuxième Chambre civile opère un important revirement de jurisprudence, elle abandonne la théorie de l'acceptation des risques en retenant le principe de la responsabilité sans faute du fait des choses édictées par l'article 1384 alinéa 1er. En l'espèce, le pilote d'une motocyclette a été blessé par la motocyclette d'un autre pilote au cours d'une séance d'entraînement sur un circuit fermé. [...]
[...] Une harmonisation de la jurisprudence apparaissait nécessaire, c'est ce que va faire la deuxième Chambre civile lors de l'arrêt du 4 novembre 2010. II - Un revirement de jurisprudence permettant le renforcement de la sécurité juridique Avec ce revirement de jurisprudence la Cour met fin aux incohérences du régime de la responsabilité du fait des choses elle permet une harmonisation de ce régime et confère une application généralisée à l'article 1384 alinéa 1er Les incohérences de la théorie de l'acceptation des risques Incohérences en effet, car cette théorie ôtait la présomption de responsabilité au gardien de la chose lorsque le dommage avait eu lieu lors d'une compétition sportive. [...]
[...] Ce moyen aurait pu suffire à la cassation de l'arrêt ; en effet, au fil de sa jurisprudence la Cour de cassation a érigé une distinction entre les dommages survenus lors de compétition, et ceux survenus lors de l'entrainement, les seconds écartant l'application de la théorie des risques. La Cour aurait donc pu se contenter de censurer l'arrêt de la CA pour mauvaise application de la loi, car même s'il est vrai que la participation à un entrainement sportif afin d'améliorer ses performances lors de la compétition future, impliquait l'acceptation tacite des risques inhérents à une telle activité, c'est bien d'un entrainement dont il s'agissait en l'espèce, non d'une compétition sportive. Mais la Cour va adopter une position inédite et radicale dans l'arrêt du 4 novembre 2010. [...]
[...] On s'oriente donc vers un régime général de la responsabilité du fait des choses, il y a ici un rapprochement avec l'obligation de sécurité/moyens en matière contractuelle, tout dommage subi doit être réparé, il faut traiter les dommages subis à l'occasion d'une activité sportive comme n'importe quel autre dommage sans prendre en compte que la victime ait participé à une activité dangereuse dont elle n'ignorait pas les risques. Cet arrêt marque la volonté de la Cour de cassation de redonner à l'article 1384 alinéa 1er l'importance qu'il avait perdue du fait de la multiplication des régimes spéciaux de responsabilité (loi de 1985 notamment). Avec l'arrêt du 4 novembre 2010 nous nous dirigeons vers un régime homogène de la responsabilité du fait des choses, sans doute ce revirement de jurisprudence a été opéré en espérant une réponse de la part du législateur. [...]
[...] Dans un premier temps, par un arrêt de la deuxième Chambre civile du 16 juin 1976, la Cour décida que l'acceptation des risques ne permettait d'écarter le jeu des responsabilités de plein droit qu'en présence de risques susceptibles d'être considérés comme normaux ou normalement prévisibles (Civ 2ème 8 mars 1995). Refusant ainsi d'indemniser les victimes de risques anormaux cette application était discutable, car la jurisprudence avait tendance à confondre le risque faible avec le risque normal comme le relève Alain Bénabent non des risques rares ou exceptionnels, mais des risques non spécifiques ou étrangers à l'activité en cause, et qui a priori n'auraient pas dû se réaliser autrement dit la rareté de l'accident permet de dire que le risque de le voir survenir est faible, non qu'il est anormal. [...]
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