La responsabilité du fait des choses est une responsabilité sans faute, objective, de plein droit. Classiquement, la responsabilité du gardien n'est engagée que lorsque la chose a eu un rôle actif dans la réalisation du dommage : présomption de causalité en cas de contact avec une chose en mouvement, preuve du lien causal par la victime quand le préjudice provient d'une chose inerte. Si la règle posée par les arrêts Teffaine et Jand'heur paraissait clairement établie, il n'en reste pas moins que certaines décisions de la Cour de cassation tendaient à s'en écarter dangereusement. L'arrêt de la 2nd chambre civile du 24 février 2005 vient mettre le point final à une jurisprudence pour le moins divergente en matière de participation causale d'une chose inerte dans la réalisation du dommage.
En l'espèce, Melle X a heurté une baie vitrée coulissante qui ouvrait sur une terrasse, la vitre s'est brisée et l'a blessé. Elle assigne la propriétaire de l'appartement et son assureur en réparation du préjudice subi sur le fondement de l'article 1384 al. 1er. Déboutée par la Cour d'appel aux motifs que la chose n'ayant pas joué de rôle actif dans la production du dommage, le préjudice trouvait sa seule source dans son mouvement inconsidéré, Melle X se pourvoi en cassation, posant à la Cour une interrogation essentielle : La responsabilité du gardien peut-elle être engagée lorsque la chose inerte qui a causé le dommage ne semble être ni dans une position anormale, ni défectueuse ?
[...] De plus, dans cette optique, c'est la simple présence matérielle qui implique la réparation matérielle, et donc le fait que le gardien ait laissé a un endroit déterminé une chose inerte, ce qui de façon sous jacente, réintroduit le concept de la responsabilité individuelle, de la faute. En réduisant les conditions d'appréciation du fait actif de la chose à son anormalité ou à sa défectuosité, donc, contrairement à sa jurisprudence antérieure, la Cour de Cassation réduit la brèche qu'elle avait pu précédemment ouvrir. [...]
[...] En cassant et annulant la décision de la cour d'appel pour violation de la loi, plus particulièrement conséquences légalement erronées, la Cour de cassation réaffirme le maintien de la condition d'anormalité de la chose inerte comme preuve de son intervention dans le dommage mettant ainsi fin a une jurisprudence divergente et pour le moins critiquable I. La réaffirmation de l'anormalité de la chose comme participation causale au dommage. L'engagement de la responsabilité du gardien suppose, dès lors que la chose est inerte, la preuve par la victime du fait actif de cette chose dans la réalisation du dommage fait actif qui peut être déduit de son caractère anormal ou de sa défectuosité A. La preuve nécessaire de l'intervention de la chose inerte dans la réalisation du dommage. [...]
[...] Le caractère anormal déduit de la fragilité de la baie Le motif de cassation de l'arrêt par la cour résulte de l'appréciation faite par les juges du fond du caractère anormal ou défectueux de la baie vitrée : en effet, selon eux, n'était caractérisée ni le mauvais état de la baie vitrée, ni sa situation ou sa position anormale. Les deux critères étant absents, on aurait pu s'attendre à ce que la Cour de cassation rejette le pourvoi. Au contraire, elle déduit du bris de la baie sa fragilité, et de sa fragilité son anormalité. Ce faisant, la Cour de cassation réaffirme lien entre l'absence d'anormalité de la chose et le fait qu'elle ne puisse pas être l'instrument du dommage. [...]
[...] La fin de la simple participation matérielle de la chose comme preuve du dommage Par ses deux arrêts du 24 février 2005, la 2nd chambre civile de la Cour de cassation met fin à une jurisprudence pour le moins divergente en matière de responsabilité du fait des choses inertes. En réaffirmant la nécessité d'une anormalité de la chose pour que soit engagée la responsabilité du gardien, elle contrevient à une position par laquelle elle acceptait d'indemniser les victimes même lorsqu'aucune situation anormale ou aucune défectuosité n'avait été établie. [...]
[...] Dans le cas d'espèce, la fragilité est simplement déduite du fait que la baie vitrée s'est brisée au contact de la victime, et on est en droit de se demander en quoi le fait de ne pas résister a un tel impact est anormal ? En réaffirmant le nécessaire caractère de l'anormalité de la chose pour caractériser son fait actif susceptible d'entrainer la responsabilité de son gardien, la Cour de cassation revient sur une jurisprudence antérieure divergente, qui avait réduit la participation causale de la chose à sa seule participation matérielle. II. Une nécessaire restriction de l'appréciation de la causalité A. [...]
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