L'article 1384 du code civil prévoit plusieurs cas spécifiques dans lesquels certaines personnes peuvent être tenues de répondre des conséquences dommageables d'actes commis par d'autres. Mais depuis un arrêt rendu en assemblée plénière le 29 mars 1991, arrêt Blieck, on peut se demander si l'article 1384 alinéa 1 n'est pas finalement une large ouverture de responsabilité du fait d'autrui.
L'arrêt rendu par la deuxième Chambre civile de la cour de cassation en date du 18 septembre 1996 permet de préciser la position de la jurisprudence quant à la responsabilité civile des grands parents ou des tiers pour des faits commis par un enfant qui leur est confié.
En l'espèce, alors qu'un enfant mineur passait ses vacances chez sa grand-mère et tante, en circulant à bicyclette, ce dernier a heurté et blessé un piéton. La victime décide donc d'intenter une action en justice afin de demander réparation de son préjudice aux parents de l'enfant ainsi qu'à la grand-mère et la tante de ce dernier.
La cour d'appel rejette la demande de la victime en réparation en mettant hors de cause les parents ainsi que la demande subsidiaire contre la grand-mère et la tante.
Suite à l'arrêt rendu, la victime s'est donc pourvu en cassation en invoquant la violation pour refus d'application de l'article 1384 alinéa 1 selon lequel « on est responsable du dommage causé par le fait des personnes dont on doit répondre ».
La question de l'arrêt réside donc dans le fait de savoir s'il existe ou non, tout comme pour les parents, une présomption de responsabilité à l'encontre des grands parents qui hébergent un enfant lorsque ce dernier commet un fait dommageable ?
La Cour de cassation en rejetant le pourvoi, refuse, tout comme la cour d'appel, d'appliquer l'art 1384 al 4 du code civil aux grands parents : « qu'après avoir exactement énoncé que la responsabilité édictée à l'article 1384 al 4, ne s'applique qu'aux père et mère, l'arrêt retient qu'aucune faute n'est établie envers la grand-mère et la tante de l'enfant ».
Pour comprendre cette décision, il conviendra dans un premier temps d'expliquer le rejet par la cour de cassation de l'application de l'article 1384 alinéa 1 pour les grands parents I et dans une seconde partie nous verrons qu'implicitement les juges estiment que seule une faute personnelle des grands parents fondée sur l'article 1382 du code civil peut être retenue pour engager leur responsabilité II. L'exigence d'une faute de surveillance caractérisée, pour pouvoir mettre en œuvre la responsabilité des grands-parents, est bien mise en lumière.
[...] L'exigence d'une faute de surveillance caractérisée, pour pouvoir mettre en œuvre la responsabilité des grands-parents, est bien mise en lumière. I Rejet de la responsabilité des grands parents et tiers sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 L'article 1384 alinéa 1du code civil est traditionnellement considéré comme ne posant pas un principe général de responsabilité du fait d'autrui. En effet, jusqu'en 1991, on considérait que l'art 1384 n'était qu'un texte d'annonce pour les régimes spéciaux dans le cadre de la responsabilité du fait d'autrui. [...]
[...] La cour de cassation confirme la préférence de la garde juridique et non de fait comme fondement de la responsabilité. Il convient en effet de constater une garde juridique, notamment par une décision judiciaire. Ainsi, le tiers qui a obtenu judiciairement la garde de l'enfant, c'est-à-dire le droit et devoir de garder l'enfant et de surveiller ses faits et gestes, peut répondre des actes du mineur. Il peut s'agir en effet d'un mineur confié par le juge à une association sur le fondement d'une mesure d'assistance éducative ou sur le fondement de l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante. [...]
[...] A moins de vouloir multiplier les débiteurs et chance d'être indemnisé, il paraît finalement normal de ne retenir une responsabilité de plein droit des tiers gardiens de fait lorsque les parents sont également tenus d'une telle responsabilité, alors même que ces derniers sont la plupart du temps assurés pour ce genre de dommage, chose non évidente pour les grands parents ou tiers. Seuls les parents pourront donc essayer de s'exonérer en prouvant la faute du tiers. L'arrêt du 18 septembre 1996 est dans la lignée de la jurisprudence traditionnelle qui exclut l'application de l'article 1384 alinéa 4 aux grands parents et aux tiers. Reste donc à prouver une faute personnelle de ces derniers pour que leur responsabilité soit engagée. [...]
[...] Commentaire d'arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation du 18 septembre 1996 L'article 1384 du code civil prévoit plusieurs cas spécifiques dans lesquels certaines personnes peuvent être tenues de répondre des conséquences dommageables d'actes commis par d'autres. Mais depuis un arrêt rendu en assemblée plénière le 29 mars 1991, arrêt Blieck, on peut se demander si l'article 1384 alinéa 1 n'est pas finalement une large ouverture de responsabilité du fait d'autrui. L'arrêt rendu par la deuxième Chambre civile de la cour de cassation en date du 18 septembre 1996 permet de préciser la position de la jurisprudence quant à la responsabilité civile des grands parents ou des tiers pour des faits commis par un enfant qui leur est confié. [...]
[...] De manière constante, la jurisprudence écarte toute extension des auteurs visés par l'article. La victime ne peut donc pas, en application de l'article 1384 alinéa engager la responsabilité d'autres personnes que les père et mère. Il est donc normal que dans cet arrêt, la cour de cassation décide que la présomption de responsabilité prévue pour les parents, n'est pas applicable à un enfant en vacances d'été chez sa grand-mère et sa tante. De plus la condition de ce lien de filiation établit par la même occasion celle de l'autorité parentale. [...]
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