contrats spéciaux, droit commun, préavis raisonnable
La loi du 12 mai 2009 a supprimé l'expression « commodat » préférant celle de « prêt à usage », cependant bien que l'expression ait disparu, le contrat en lui même existe toujours.
Unilatéral par nature, le prêt à usage comporte une obligation essentielle celle de restituer la chose prêtée à l'issu d'un certain délai.
Et bien qu'il ne comporte qu'une seule obligation, le prêt à usage donne lieu à de nombreux litiges autour de celle-ci, c'est pourquoi dans la plupart des arrêts de la Cour de cassation, dans leurs attendus les Chambres rappellent le principe fondamental du prêt à usage « l'obligation pour le preneur de rendre la chose prêtée après s'en être servi est de l'essence même du commodat », et nous allons voir que l'arrêt de la Cour de cassation de la Troisième Chambre civile du 3 juin 2010, n'a pas échappé à la règle.
En l'espèce la Commune de Châteauroux prête à trois syndicats : la CGT, la CFDT et Force ouvrière de l'Indre, plusieurs salles de son domaine privé. Quelque temps après, la Commune fait connaître au preneur son intention de résilier les prêts et finit par les assigner afin d'obtenir leur expulsion, en effet la Commune avait l'intention de reprendre la jouissance des locaux.
[...] La Cour d'appel de Bourges le 26 mars 2009, accueille leur demande avec une motivation élaborée, elle estime que les preneurs se sont pas de simples particuliers, et que, justement en raison de leur statut d'organisations syndicales, elles bénéficient d'un régime de protection constitutionnelle, et que par conséquent les règles générales de prêts ne leur sont pas applicables, et in judicio les juges du fond considèrent que la résiliation, prise même en respectant le délai de préavis raisonnable porte atteinte à la liberté fondamentale du libre exercice d'une activité syndicale. De plus, pour la seconde juridiction le bailleur devait fixer de nouvelles conditions d'occupation des locaux adaptés aux capacités financières des syndicats leur permettant de remplir leurs missions d'intérêt général, en leur offrant un relogement. Ainsi, son refus fait droit au nom de liberté syndicale et d'une assez surprenante tradition de gratuité comme l'a remarqué V.Perruchot-Triboulet. [...]
[...] Ainsi, l'arrêt de la Cour de cassation va équilibrer ces deux notions qui s'opposent dans un contrat : liberté syndicale du preneur et droit du bailleur. D'une part, en visant l'article 6 du préambule de la Constitution, la Haute Juridiction rappelle le principe de liberté syndicale, qui dispose que “Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix”. D'autres parts, lorsque la Cour de cassation dans son attendu vise l'article 544 du Code civil qui dispose que propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements”, elle pose le principe du droit de propriété, mais aussi en visant l'article 1 du premier protocole additionnel de la CEDH. [...]
[...] Ainsi, cet arrêt applique une solution classique selon laquelle le prêt à usage, conclu pour une durée déterminée, peut être résilié par le prêteur à tout moment, après avoir respecté un délai de préavis raisonnable, comme l'avait reconnu l'arrêt de la Cour de cassation de la Troisième Chambre civile du 4 avril 2007. II) Les organisations syndicales ne bénéficiant pas de traitement de faveur. La Cour de cassation dans son attendu, va affirmer implicitement que les organisations syndicales lorsqu'elle conclut des contrats sont des cocontractants comme les autres, et reste de facto soumises aux règles du droit commun Des organisations syndicales restant soumises au droit commun Dans notre espèce, les juges du fond pour casser l'arrêt de la Cour d'appel de Bourges se sont basés sur des textes fondamentaux, tels que la CEDH et le préambule de la Constitution. [...]
[...] Ainsi, selon l'effectif du personnel, l'autorité territoriale a l'obligation de mettre à disposition des locaux pour les syndicats. Une solution équilibrée entre liberté syndicale du preneur et droit du bailleur ? Certains auteurs qualifient ce point “d'original” comme Cecile Le Guillon, en effet la Cour de cassation retient que la liberté syndicale ne fonde, pour les communes, aucune obligation de prêter, gratuitement et perpétuellement, des locaux de leur domaine privé. Ce droit que rappelle la Cour de cassation, semble légitime, car les communes lorsqu'elles prêtent leurs locaux doivent pouvoir en tirer une contrepartie, donc si elles avaient l'obligation de mettre leurs locaux à disposition gratuitement et pour toujours cela leur poserait sans doute d'énorme difficulté, d'une certaine manière les locaux ne leurs appartiendraient plus. [...]
[...] Il est important de remarquer que dans sa solution la Haute Juridiction vise des textes suprêmes d'une importance capitale. En effet, il est question dans son visa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et de l'article 1 de son protocole additionnel, puis pour finir des articles et 1888 du Code civil. La Cour de cassation avant de rappeler faits va se donner le temps de réaffirmer l'obligation pour le preneur de rendre la chose prêtée après s'en être servi est de l'essence même du commodat ( . [...]
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