« On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre… » Cet adage populaire semble assez bien s'appliquer à l'arrêt de la 3e chambre civile de la cour de cassation rendu le 10 novembre 1999.
En l'espèce, il est question d'un locataire qui a construit un hangar sur le terrain qu'il louait pour un usage commercial, et qui assigne les propriétaires du terrain en paiement d'une indemnité pour la construction du hangar, lorsqu'il cède son fonds de commerce. Les propriétaires du terrain vont refuser de verser une indemnité pour la construction de ce hangar.
L'arrêt de la Cour d'appel de Montpellier du 17 septembre 1997 va donner raison aux anciens locataires, constructeurs du hangar. Mais les propriétaires vont se pourvoir en cassation, en avançant notamment que l'article 555 du code civil ne peut pas s'appliquer en raison de l'autorisation d'effectuer les travaux qu'ils avaient donnée au locataire.
Le principal problème qui se pose donc devant la Cour de cassation consiste à savoir si on peut appliquer l'article 555 du code civil.
La 3e chambre civile va estimer à ce sujet que l'autorisation du bailleur d'effectuer des travaux n'est pas de nature à écarter l'application de l'article 555 du code civil, puisqu'il n'existe pas de conventions entre les parties réglant le sort des constructions réalisées par le locataire.
Cet arrêt témoigne donc de la volonté du juge de protéger les locataires (possesseurs) lorsqu'ils réalisent des dépenses, et d'empêcher les propriétaires abusivement au détriment des locataires.
Nous verrons donc dans une première partie les limites à l'accession apportées par l'article 555 du code civil (I); puis nous verrons en quoi cette jurisprudence est protectrice des intérêts du locataire (II).
[...] Ici, on peut se demander pourquoi le propriétaire qui refuse d'indemniser, ne demande pas la destruction du bâtiment. Cette alternative constitue une limite dans la mesure où le propriétaire ne peut pas réfléchir indéfiniment: soit il ordonne la suppression, soit il conserve la construction en versant des indemnités (ce qui constitue une autre limite à sa liberté de propriétaire). Cependant il faut préciser qu'avant d'en arriver là le locataire doit apporter la preuve qu'il est le constructeur, puisque sans cela le propriétaire est présumé être l'auteur des constructions sur son terrain. [...]
[...] On pourra ici parler de l'exception existant en cas d'autorisation d'amélioration par le propriétaire : alors l'article 555 sera écarté (cf. C. de cassation, Civ. 3e , 8/01/1997). Ce qui induit donc une différence de régime sur la distinction : amélioration/construction nouvelle. On peut aussi dans cet arrêt s'interroger sur une éventuelle mauvaise foi du propriétaire : s'il refuse de verser l'indemnisation, pourquoi ne demande-t-il pas la suppression de l'édifice, et la restauration de son bien dans son état primaire? [...]
[...] Dès lors, face à de telles situations, les dispositions du code civil apparaissent comme essentielles pour apporter un certain équilibre entre les droits de chaque partie. L'équilibre entre les droits du propriétaire et ceux du constructeur Les garanties apportées au constructeur vont lui permettre d'agir davantage, ce qui va nécessairement conduire dans certains cas à une valorisation du fonds. Ainsi le locataire n'aura pas le sentiment d'investir et de s'investir pour rien. Puisque si ses constructions valorisent réellement le fonds, il y a fort à parier que le propriétaire choisisse par la suite de les conserver plutôt que d'ordonner leur suppression. [...]
[...] II) Une jurisprudence protectrice des intérêts du locataire Cette solution jurisprudentielle retenue par la Cour de cassation permet d'éviter d'éventuels abus de la part du propriétaire, et d'instaurer un certain équilibre entre les droits de chaque partie. La volonté d'empêcher les abus du propriétaire Si la loi ne lui apportait pas certaines limites, le propriétaire serait probablement conduit à abuser de sa position. Ainsi, les dispositions de l'article 555 du code civil vont s'appliquer même lorsque le propriétaire aura donné son autorisation pour la construction. [...]
[...] Commentaire d'arrêt : Cour de cassation, 3e chambre civile novembre 1999 On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre Cet adage populaire semble assez bien s'appliquer à l'arrêt de la 3e chambre civile de la cour de cassation rendu le 10 novembre 1999. En l'espèce, il est question d'un locataire qui a construit un hangar sur le terrain qu'il louait pour un usage commercial, et qui assigne les propriétaires du terrain en paiement d'une indemnité pour la construction du hangar, lorsqu'il cède son fonds de commerce. [...]
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