En attendant son immatriculation, une société a souvent besoin de préparer son activité économique future. Pour cela, des actes juridiques doivent nécessairement être passés mais comme la personnalité juridique de la société n'est pas encore acquise au moment de la conclusion de ces actes, des cocontractants demandent parfois leur nullité, de peur peut-être que la société nouvelle soit moins solvable que ses associés.
En l'espèce, la gérante de la société SCI d'Orphin a fait une déclaration d'adjudicataire au nom de sa société, qui était alors en formation, aux fins d'acquérir un bien appartenant à M. et Mme X. Cette société avait été constituée dans le but exclusif de devenir propriétaire du bien en question. M. et Mme X ont alors intenté une action en justice contre la gérante de la société pour obtenir la nullité de la transaction. Ils ont prétendu que l'enchère n'était pas valable étant donné qu'au moment de l'acte, la société n'avait pas encore la personnalité juridique et donc que sa gérante ne pouvait pas valablement passer un acte juridique en son nom et pour son compte.
Après un jugement en première instance et un premier appel, le litige a été porté devant la Cour de Cassation qui a cassé l'arrêt d'appel le 13 juillet 2005 et a renvoyé l'affaire devant la Cour d'Appel de Paris qui a rendu un arrêt le 13 mars 2008. M. et Mme X ont alors formé un pourvoi en cassation. Ils reprochent à l'arrêt de les avoir débouté de leur demande de nullité du jugement d'adjudication. En effet, ils considèrent
d'une part que comme la SCI d'Orphin n'avait pas encore la personnalité juridique à la date de la déclaration d'adjudicataire, elle ne pouvait pas valablement faire l'acte juridique litigieux. D'autre part, la reprise d'actes juridiques par la société formée n'est possible que sous certaines conditions qui n'étaient pas présentes en l'espèce. La Cour d'Appel a donc violé les articles 1843 du code civil et 6 du décret du 3 juillet 1978.
La Cour de Cassation a dû se demander si ces conditions de reprise étaient présentes. La question était : la reprise d'une enchère faite par un gérant au nom de sa société en formation est-elle possible?
La Cour de Cassation a répondu affirmativement dans son arrêt du 10 septembre 2008. Elle a estimé que la reprise résultait des statuts. Ils indiquaient que la société avait été constituée pour l'acquisition du bien en question. Ainsi, sa gérante avait nécessairement la qualité pour agir et se porter acquéreur. L'enchère était donc valable puisque la reprise rétroagit jusqu'au jour de l'acte.
Le pourvoir a donc été rejeté.
La Cour de Cassation a ainsi admis la validité d'un acte juridique fait au nom d'une société alors que celle-ci n'était pas encore immatriculée mais elle a aussi bien vérifié que toutes les conditions, attachées aux statuts notamment, étaient remplies pour faire cette opération afin que les cocontractants soient convenablement protégés.
[...] L'éventuelle limite des actes d'exploitation En effet, cette technique est utilisée dans l'optique de la vie sociale future, pour que les associés ne soient pas ralentis par les démarches administratives d'immatriculation notamment. Les associés doivent donc passer des actes de préparation à cette vie sociale. Ils organisent les modalités de l'activité future par la signature d'un bail et l'embauche de salariés par exemple. En l'espèce, c'est l'objet social qui est réalisé puisque la société avait pour but de faire l'opération qui a été reprise. Il ne s'agit en aucun cas d'un acte de préparation. [...]
[...] Commentaire : Cour de Cassation, 2ème civ septembre 2009 En attendant son immatriculation, une société a souvent besoin de préparer son activité économique future. Pour cela, des actes juridiques doivent nécessairement être passés mais comme la personnalité juridique de la société n'est pas encore acquise au moment de la conclusion de ces actes, des cocontractants demandent parfois leur nullité, de peur peut-être que la société nouvelle soit moins solvable que ses associés. En l'espèce, la gérante de la société SCI d'Orphin a fait une déclaration d'adjudicataire au nom de sa société, qui était alors en formation, aux fins d'acquérir un bien appartenant à M. [...]
[...] En effet, la loi précise que les engagements repris sont réputés avoir été conclus dès l'origine par la société. Il y a donc rétroactivité et c'est ce que rappelle la Cour de Cassation dans son premier attendu de principe. Le premier moyen des demandeurs est don irrecevable. À la date de l'enchère, la capacité d'enchérir, qui faisait défaut à la société selon les demandeurs, existait bel et bien grâce à cet effet rétroactif. Cette technique juridique de la reprise des actes comporte cependant des conditions, notamment au niveau des actes susceptibles d'une reprise. B. [...]
[...] La Cour d'Appel a donc violé les articles 1843 du code civil et 6 du décret du 3 juillet 1978. La Cour de Cassation a dû se demander si ces conditions de reprise étaient présentes. La question était : la reprise d'une enchère faite par un gérant au nom de sa société en formation est-elle possible? La Cour de Cassation a répondu affirmativement dans son arrêt du 10 septembre 2008. Elle a estimé que la reprise résultait des statuts. Ils indiquaient que la société avait été constituée pour l'acquisition du bien en question. [...]
[...] La loi ne formule aucune précision à ce sujet et il n'existe pas de critère précis pour différencier un acte de préparation d'un acte d'exploitation mais dans l'hypothèse où des associés feraient des actes d'exploitation sans attendre d'avoir leur société immatriculée, ils risqueraient d'être confrontés à une requalification en société de fait. Il y aurait alors d'importantes conséquences pécuniaires puisqu'ils seraient tenus solidairement des dettes contractées. Ici, l'immatriculation apparaît essentiellement comme une simple régularisation de l'opération et non comme une préparation. On pourrait alors se demander s'il était possible que l'opération d'enchère soit qualifiée de société de fait et non d'acte repris par une société de droit. [...]
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