Après hésitation, la Cour de cassation a décidé de renoncer à sa jurisprudence qui divise les accidents complexes en une série d'accidents simples afin d'imputer les dommages à chaque accident distinct.
La Cour souhaite une certaine globalisation de l'accident complexe.
Cependant la notion « d'accident complexe » soulève des questions relatives au temps qui sépare les différents évènements : à partir de quel moment l'accident cesse-t-il d'être complexe ?
L'arrêt du 13 mai 2004 illustre bien cette difficulté posée par la complexité d'un accident.
En l'espèce, un véhicule (tombé en panne) immobilisé sur la voie de droite d'une autoroute a été percuté à l'arrière et projeté sur la voie de gauche par un poids lourd, qui s'est alors rangé sur la bande d'arrêt d'urgence mais il fut lui-même percuté dix minutes plus tard par un troisième véhicule dont le conducteur fut tué.
Les proches du conducteur tué poursuivent à la fois le conducteur de l'automobile tombée en panne, le conducteur du poids lourd et son employeur, ainsi que leurs assureurs.
[...] En effet, elle considère qu'ainsi un laps de temps d'au moins dix minutes ayant séparé les deux accidents, il s'est écoulé un temps suffisamment long pour qu'il y ait eu non pas un seul accident en chaîne, mais deux accidents distincts et successifs En d'autres termes, selon la Cour d'appel dix minutes suffisent pour conclure à deux accidents distincts. De plus, elle estime que le premier accident est entériné par la discussion et les allers et retours des conducteurs des deux véhicules accidentés. Le conducteur du troisième véhicule ne fait que provoquer un second accident. A l'inverse, la Cour de cassation considère que l'unité de temps ne peut constituer qu'un simple indice et non un critère suffisant. Elle ne s'arrête pas au laps de temps de dix minutes qui sépare les deux collisions successives. [...]
[...] La Cour met alors en avant l'importance de la prise en compte des relations existant entre les différents événements accidentels. Bien que la Cour de cassation ait considéré qu'il ne fallait pas rechercher l'existence d'un lien de causalité entre le véhicule impliqué et le dommage de la victime, elle est consciente qu'il doit nécessairement exister un lien entre les différentes phases de l'accident. En effet, dans l'hypothèse où il n'existerait aucun lien, la Cour passerait son temps à rechercher les véhicules impliqués, et ce indéfiniment. [...]
[...] Dans un arrêt du 25 octobre 2007, la Cour de cassation a estimé que les véhicules impliqués dans un premier accident pour lequel les pompiers sont intervenus sont également impliqués dans l'accident dont ceux-ci ont été victimes (ils ont été fauchés par un véhicule tiers, leur présence sur les lieux étant consécutive au premier accident). La Haute juridiction semble aller assez loin dans l'appréciation globale de l'accident. Cependant, dans un arrêt du 5 novembre 1998, elle nous a révélé un doute quant à sa volonté de consacrer une telle solution (le fait que les dommages soient imputables à l'accident global). [...]
[...] Puis elle confirme sa position dans l'arrêt du 13 mai 2004 : elle estime que l'accident complexe n'est plus décomposé en une série d'accidents distincts et successifs. L'accident complexe doit être analysé dans sa globalité et ce peu importe le laps de temps qui sépare les différentes collisions. Le tout est qu'il existe un certain enchainement causal entre les divers chocs successifs. Ainsi, la Cour de cassation consacre la notion d'accident complexe afin de globaliser l'accident pour éviter que l'un des conducteurs des véhicules impliqués ne puisse être mis hors de cause. [...]
[...] Nous nous intéresserons alors principalement à la notion d'accident complexe et à ses conséquences juridiques. Nous analyserons tout d'abord la problématique soulevée par une telle notion pour ensuite nous interroger sur les effets de sa consécration (II). La problématique de l'accident dit complexe La jurisprudence s'est largement interrogée sur la notion d'accident complexe. Elle a exprimé une réelle volonté de consacrer la complexité que pouvait susciter un unique accident et s'est alors retrouvée confrontée à la difficulté de définir une telle notion. [...]
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