Selon le Professeur Mestre, « le meilleur moyen d'être payé est encore sans doute d'être débiteur de son débiteur ». Cette citation peut s'appliquer au mécanisme de la compensation tel que cité par l'article 1289 du Code civil. La difficulté du recouvrement d'une dette due en cas de procédure collective ou une cession de créances prend tout son sens dans ce mécanisme permettant au créancier d'invoquer la compensation comme moyen de paiement.
La loi a certes validé le principe de compensation entre dettes et créances connexes, elle laisse à la Cour de cassation le pouvoir d'en définir les limites. La compensation légale ne nécessite pas d'initiative personnelle elle se fait ipso jure, mais elle doit remplir certaines conditions, notamment la réciprocité des créances. Afin de permettre l'extinction des dettes plus facilement la Cour apprécie les conditions de la compensation de manière plus large (...)
[...] Ces deux notions utilisées ensemble permettraient de pallier à de nombreuses difficultés (selon l'auteur Myriam Roussille). Il faudra voir la jurisprudence à venir confirme cette approche ou s'il s'agit, que d'un rapprochement théorique. La cour de cassation adopte une solution originale pour consacrer le caractère singulier du régime de la compensation des dettes connexes. Par cette décision, le régime de la compensation est incertain, puisque les limites restent encore floues. La décision consacre une nouvelle approche de la connexité dans la compensation judiciaire. [...]
[...] En effet, cette unicité de structures reconnue, la Cour de cassation pouvait bien appliquer l'exception de compensation. La réciprocité des créances: l'affirmation de l'unité des parties à partir d'une entité économique. Même si la Cour d'Agen révèle le même redressement judiciaire des sociétés (une procédure collective commune), pour les juges du fond elles ont chacune une personnalité juridique. La Cour de cassation casse l'arrêt au premier motif que la Cour d'appel méconnait le principe de l'autorité de chose jugée attaché à l'arrêt du 13 mai 1992. [...]
[...] Elle décide alors d'opposer l'exception de compensation entre sa dette à l'égard de CEMA et la créance à l'égard de Darquier qu'elle inscrit au passif de son redressement judiciaire. Lors du jugement en première instance, le tribunal refuse la compensation. La société décide de faire appel. La cour d'appel dans un arrêt du 13 mai 1992 prononce l'extension du redressement judiciaire de la société Darquier datant du 27 septembre 1991 à la société CEMA. Le redressement judiciaire de l'entreprise a été étendu aux fournisseurs. [...]
[...] La société Lapidor se pourvoit en cassation devant la chambre commerciale le 9 mai 1995. La compensation de l'article 1289 du code civil invoquée par une société créancière d'une autre et débitrice d'une troisième est-elle justifiée lorsque deux contrats différents sont passés avec deux sociétés placées en liquidation judiciaire ? Dans son arrêt, la Cour de Cassation répond par l'affirmative en ses deux branches en cassant la décision de la cour d'appel. Dans un premier temps, elle admet qu'il n'existait en fait qu'une seule personne morale ou que les patrimoines étaient confondus entre les deux sociétés, puisque sous l'apparence de deux sociétés distinctes, il n'existait en fait qu'une personne morale Au visa des articles 1289 et 1351 du code civil, elle reconnaît donc un lien entre les contractants. [...]
[...] La Cour de cassation n'est pas innovatrice quand à la notion de réciprocité. La particularité réside dans l'analyse de la situation au vu des circonstances. D'une part une décision judiciaire reconnaissait l'unité du patrimoine entre les deux sociétés et d'autre part cette décision avait une autorité de chose jugée. Par conséquent il était du devoir de la Cour d'appel de prendre en compte cet acte d'autorité pour l'appliquer au cas d'espèce et en déduire la réciprocité. Le fait que les actifs et passifs des deux sociétés soient rassemblés dans la procédure de redressement montre que les patrimoines des deux sociétés sont confondus selon la Cour de cassation. [...]
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