Commentaire d'arrêt, Chambre mixte, Cour de cassation, 26 mai 2006, violation d'un pacte de préférence
Le pacte de préférence est une convention par laquelle le propriétaire d'un bien que l'on appelle le promettant réserve ce bien au bénéficiaire et s'engage à lui vendre en priorité s'il décide de vendre et si celui-ci veut toujours acheter. L'obligation qui découle de cette convention n'est donc pas une obligation de vente, mais une obligation de priorité en cas de vente, il ressort donc de cela qu'il n'y aura violation du pacte de préférence et donc sanction que si le promettant ne respecte pas cette obligation de priorité s'il décide de vendre.
À l'époque de la réunion de la Chambre mixte de la Cour de cassation, de nombreuses questions se posaient justement pour savoir quelle était la sanction adéquate à la violation d'un pacte de préférence, l'allocation de dommages-intérêts ainsi que l'annulation du contrat passé avec l'acquéreur extérieur au pacte à certaines conditions étaient les solutions traditionnellement proposées par la Cour de cassation. Une autre solution était envisagée sans pour autant avoir été jusqu'alors acceptée par la Cour, il s'agissait de la substitution du bénéficiaire à l'acquéreur dans le contrat de vente, c'est donc dans ce contexte et principalement sur cette question que la Cour de cassation réunie en Chambre mixte pour l'occasion a eu à se prononcer dans un arrêt du 26 mai 2006.
[...] La Cour d'appel de Papeete dans un arrêt du 13 février 2003 a reconnu la violation du pacte de préférence et a accordé des dommages- intérêts aux consorts X sans pour autant accorder la substitution de Mme X dans les droits de la société Emeraude. Ces derniers forment donc un pourvoi en cassation, en effet, ils considèrent qu'une obligation de faire se résout en dommages-intérêts seulement lorsqu'il est impossible d'avoir une exécution en nature, cette exécution étant ici possible, ils considèrent que la cour d'appel a fait une mauvaise application de l'article 1142 du Code civil. [...]
[...] Le bénéficiaire peut également essayer de prouver par tout autre moyen que l'acquéreur avait connaissance au moment de la conclusion du contrat de l'existence du pacte de préférence. Mais si le bénéficiaire n'apporte pas de preuves suffisantes ou si le tiers est simplement de bonne foi c'est-à- dire qu'il a conclu en ignorant l'existence du pacte de préférence mis en cause alors ni l'annulation ni la substitution du bénéficiaire au contrat ne seront possibles, la bonne foi du tiers empêche, bloque l'exécution forcée du pacte. [...]
[...] Une partie de cette exécution forcée a été reconnue par la Cour de cassation, en effet, dans un arrêt de la première chambre civile du 20 février 1962, la Cour de cassation a reconnu la possibilité de l'annulation de l'acte en cas de violation du pacte de préférence. À l'inverse, en ce qui concerne la substitution du bénéficiaire à l'acquéreur la Cour de cassation dans un arrêt de sa troisième chambre civile du 30 avril 1997 s'est prononcée contre cette possibilité. [...]
[...] Cet arrêt est un arrêt important, car il constitue un revirement de jurisprudence, c'est la première fois que la Cour de cassation envisage la possibilité de la substitution du bénéficiaire du pacte à l'acquéreur en cas de violation du pacte même si elle n'est possible qu'à des conditions précises, cela nous amène donc à nous intéresser aux sanctions applicables à la violation du pacte de préférence puis aux conditions nécessaires à l'exécution en nature (II). I. Sanctions de la violation du pacte de préférence Il ressort de l'arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation que le bénéficiaire d'un pacte de préférence violé est en droit de demander l'annulation du contrat passé en méconnaissance de ces droits ainsi que sa substitution à l'acquéreur A. [...]
[...] C'est donc également une condition de mauvaise foi qui est requise par la Cour de cassation, car ici, le tiers doit être conscient du fait qu'il va violer les droits que le bénéficiaire avait acquis en concluant ce pacte avec le promettant. Cette condition est beaucoup plus difficile à remplir, car il va être dur pour le bénéficiaire de prouver que l'acquéreur avait connaissance de son intention de se prévaloir du pacte, en effet, par définition, lorsqu'il y a violation du pacte c'est parce que le promettant n'a pas proposé la vente en priorité au bénéficiaire donc on ne sait pas forcément si celui-ci aurait eu l'intention ou non d'acheter dans ce cas- là. [...]
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