Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 7 novembre 2006, qualification de contrat d'entreprise
La distinction entre contrat de vente et contrat d'entreprise fait l'objet d'un critère éprouvé par la Cour de cassation depuis une décision de la 3e chambre civile du 5 février 1985. Le présent arrêt de la chambre commerciale du 7 novembre 2006 permet d'en préciser l'application, en offrant à la haute juridiction une occasion de favoriser les dispositions relatives au contrat d'entreprise face à celles de l'article 1587 du Code civil régissant la vente à la dégustation.
En l'espèce, un négociant en vin de Cognac avait demandé à une distillerie de faire vieillir pour son compte 125 hectolitres d'alcool pur du millésime 1996 destinés à lui être livrés en 2001. Face au refus du négociant de prendre livraison de la marchandise, la société de distillerie a obtenu la désignation d'un expert pour définir si le lot mis en vieillissement correspondait aux critères de qualité exigés et d'en déterminer le prix.
[...] La livraison est la conséquence de l'existence d'un contrat d'entreprise supposant que les travaux demandés soient mis à la disposition du donneur d'ordre une fois achevée. Elle constitue l'exécution d'une obligation mise à la charge du maître de l'ouvrage. La livraison est aussi étroitement liée à la réception des travaux définie comme un acte juridique par lequel le maître de l'ouvrage approuve la conformité des travaux réalisés. L'acte de réception opère le transfert de la garde, mais aussi de la propriété de la chose lorsque l'entrepreneur fournit la matière. [...]
[...] Il convient de s'interroger sur le rejet de la qualification de vente à la dégustation par la Cour de cassation tout en expliquant en quoi la notion d'agrément reste décisive dans la qualification de contrat d'entreprise retenue (II). I/Le rejet par la Haute juridiction de la qualification de vente à la dégustation Deux éléments permettent de conclure à l'application de l'article 1587 du Code civil. L'un, tenant à l'objet du contrat, résulte du texte lui-même tandis que l'autre, tenant aux parties au contrat, découle d'une jurisprudence incertaine La chose objet du contrat en tant que justification de ce rejet L'article 1587 du Code civil inclut à la conclusion de la vente, l'agrément par l'acquéreur des choses qu'il a préalablement dégustées. [...]
[...] Ainsi, le caractère commercial du contrat projeté prime sur l'application de l'article 1587 du Code civil. Cependant, l'arrêt dit du vin de Pommard du 24 mars 1998, comparable quant aux faits à l'arrêt commenté, n'a pas évoqué la qualité de commerçants des parties au contrat. La doctrine s'est interrogée sur son interprétation comme revirement de jurisprudence favorable à l'application de l'article 1587 du Code civil aux commerçants. Toutefois, l'applicabilité d'une faculté d'agrément entre commerçants pourrait s'avérer dangereuse, car l'exercice de celle-ci permettrait de se séparer très facilement de son cocontractant. [...]
[...] La qualité des parties contractantes comme confirmation du rejet de contrat de vente La faculté de déguster rend incertaine la conclusion du contrat, car l'acquéreur dispose d'un pouvoir propre reposant sur le constat que rien n'est plus personnel et subjectif que le goût. Le commerçant, en ce qu'il destine la marchandise au public et non à lui- même, se doit d'exiger une qualité non excessive et commerçante. Néanmoins, la dégustation du produit n'est pas interdite. Simplement, sa possibilité ne se présume pas en matière de vente commerciale. Il est alors nécessaire de prouver l'existence d'une clause de dégustation dont la licéité n'est pas discutée. Or, en l'espèce, l'existence d'une telle clause n'est à aucun moment invoquée. [...]
[...] Cette dernière conditionne la conclusion même du contrat. C'est la raison pour laquelle l'article 1587 du Code civil rend impératif l'agrément de l'acheteur pour mener à bien la vente. La faculté de dégustation ne nécessite pas d'être expressément prévue pour être obligatoire. Le silence des parties est inopérant pour l'exclure. La Cour de cassation dans un arrêt de la première chambre civile du 24 mars 1998 relatif à la vente de vin de Pommard, rappelé l'importance du silence s'agissant de la vente à l'agréage. [...]
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