Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 3 avril 2012, Sociétés en participation et société créée de fait
Si la vie en couple peut parfois être proche de la relation liant les associés d'une société en ce qu'elle constitue une mise en commun de ressources. Il ne faut pas pour autant faire en sorte qu'un des concubins puisse, lors du terme de son idylle, se prévaloir du droit des sociétés pour tirer profit de sa rupture comme en témoigne la Chambre commerciale de la Cour de cassation, qui, dans son arrêt de cassation du 3 avril 2012 publié au bulletin, a eu à statuer sur ce point afin de reconnaître si la présence de l'affectio societatis entre deux concubins permettait d'affirmer l'existence d'une société créée de fait.
En l'espèce, après la fin du concubinage, le concubin s'est maintenu dans l'immeuble construit au cours de la vie commune sur un terrain appartenant à sa concubine.
Il assigne cette dernière en paiement de ses investissements dans l'immeuble et demande ensuite qu'il soit procédé à la dissolution puis à la liquidation de la société créée de fait avec sa compagne réclamant l'attribution préférentielle de l'immeuble. La concubine quant à elle assigne ce dernier en paiement d'indemnités d'occupation.
[...] La réalisation d'un projet immobilier commun par deux concubins suffit-elle à caractériser leur volonté de s'associer dans une société créée de fait ? La Cour de cassation censure la cour d'appel pour le viol des articles 1832 et 1873. C'est au visa de ces articles qu'elle fait droit au pourvoi du demandeur aux motifs qu'après avoir énoncé les conditions d'existence d'une société de fait dans un premier attendu, a conclu que l'intention de s'associer en vue d'une entreprise commune ne peut se déduire de la participation financière à la réalisation d'un projet immobilier et est distincte de la mise en commun d'intérêts inhérents au concubinage. [...]
[...] L'article 1873 du Code civil renvoie à certains articles de droit commun des sociétés personnifiées afin que ceux-ci s'appliquent en présence de société créée de fait, soit à des sociétés créées avec la pratique, qui ne sont pas toujours conscientes d'elles-mêmes. Ainsi ce renvoi étant opéré par le législateur à l‘article 1873, l'application de l'article 1832 du Code civil pour déterminer l'existence de la création, d'une société de fait ne semble donc pas pouvoir être contesté. L'article 1832 pose pourtant un certain nombre de conditions nécessaires à la reconnaissance d'une société comme telle, dont certaines semblent plus faciles à remplir que d'autres. [...]
[...] Il ne faut pas confondre les concubins qui veulent tirer profit de leur rupture et les concubins qui exercent une véritable activité économique, l'arrêt d'espèce est à classer dans la première catégorie, c'est la raison pour laquelle les juges ont refusé la qualification. [...]
[...] Cependant, la volonté du concubin d'espérer obtenir la qualification de société créée de fait est fréquente. En l'absence de formalisme obligatoire, il a tout intérêt à tenter de se voir opposer le régime de la société de fait en ce que celui-ci dispose de nombreux avantages et notamment celui d'apporter la preuve par tout moyen d'intentions communes et de mise en commun de biens. Toutefois, la Cour ne suit la Cour d'appel dans la suite logique d'une jurisprudence constante qui veille à limiter ce genre de demande en précisant que les conditions de l'article 1832 sont cumulatives et s'étudient séparément. [...]
[...] En effet, cela implique qu'en l'absence d'une seule des trois conditions suscitées, la Cour refuse de reconnaitre la présence d'une telle société. Ces arguments sont fondamentaux en ce qu'ils constituent le fondement de la jurisprudence de la Cour de cassation sur le sujet. Déjà, dans un arrêt du 23 juin 2004 les juges avaient été clairement explicites en relevant que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne peuvent se déduire les uns les autres les juges ne font ici que suivre à la lettre la jurisprudence la voie déjà tracée précédemment. [...]
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