Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 29 juin 2010, caducité du contrat, déséquilibre de l'économie générale
La validation ou non de la théorie de l'imprévision est un sujet controversé. Ainsi, il est arrivé qu'en raison d'un déséquilibre de l'économie générale du contrat, les juges prononcent la caducité de celui-ci. C'est notamment sur cette question que la chambre commerciale de la Cour de Cassation dans un arrêt en date du 29 juin 2010 répond en posant certaines conditions à la validation de cette théorie.
La société d'Exploitation de chauffage (société SEC) a conclu avec la société Soffimat le 24 décembre 1998 un contrat d'une durée de 12 ans portant sur la maintenance de deux moteurs d'une centrale de production de cogénération, avec une contrepartie forfaitaire annuelle. A compter du 2 octobre 2008, la société Soffimat était tenue de réaliser les travaux de maintenance prévus contractuellement et notamment, la visite des 30 000 heures des moteurs. Or, les circonstances économiques ont évolué durant l'exécution du contrat et les matières premières fournies par la société Soffimat deviennent chères, et donc celle-ci refuse d'accomplir ses obligations.
[...] Aussi, cette décision est critiquable car la Cour de cassation, au lieu de prononcer la caducité, aurait pu, dû renégocier le contrat par une clause de renégociation (chambre civile mars 2004 sur la question de savoir si une modification imprévue des circonstances économiques fait naître une obligation de renégocier les modalités du contrat) Enfin, en droit comparé concernant la théorie de l'imprévision, pour l'Allemagne, au départ, elle était hostile à cette théorie de l'imprévision, mais il y a eu de nombreuses controverses (notamment par Windscheid), donc cette théorie a été accueillie dans le code civil allemand, mais Oertmann pose une limite à cette théorie : le risque contractuel. Pour l'Italie, il y a une possible régulation très complexe de la question de l'imprévision mais cette théorie reste ambiguë. [...]
[...] Pour le droit anglais, il y a une particularité en matière d'imprévision par rapport aux droits continentaux car il ne sépare pas l'imprévision de la force majeure, il en fait une seule problématique. Cet arrêt pourrait être vu comme étant un arrêt de principe caractérisant l'abandon de la jurisprudence Canal de Craponne. Néanmoins, cet arrêt rendu en formation restreinte est limité car il n'a pas été publié. [...]
[...] Mais, depuis quelques années, il y a un infléchissement de cette jurisprudence (chambre commerciale novembre 1992 ; chambre commerciale novembre 1998 ; chambre commerciale septembre 2007). Dans ce cadre, une renégociation du contrat serait possible en présence d'une modification du contexte par rapport au moment de la conclusion et si cela devient couteux pour une des parties, mais sur le fondement de la bonne foi et de l'équité (article 1134 du code civil). En l'espèce, la cour d'appel ne valide pas la théorie de l'imprévision. [...]
[...] Or, les circonstances économiques ont évolué durant l'exécution du contrat et les matières premières fournies par la société Soffimat deviennent chères, et donc celle-ci refuse d'accomplir ses obligations. La société SEC assigne en justice la société Soffimat. Aucune information n'est renseignée sur la première instance. La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 27 mars 2009, donne droit à la demande de la société SEC. La société Soffimat se pourvoit en cassation. [...]
[...] De plus, la cour d'appel considère que le contrat n'était pas dépourvu de cause à la date de la signature, et elle refuse donc d'invoquer la caducité du contrat. La société Soffimat se pourvoit donc en cassation au motif qu'en vertu des dispositions de l'article 12 du contrat, celui-ci est devenu sans cause et doit donc être caduque. La Cour de Cassation, dans sa décision du 29 juin 2010, casse et annule la décision de la cour d'appel, et renvoie les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée. [...]
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