Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 27 mars 2007, subjectivisation du contrôle de l'existence de la cause
La subjectivisation du contrôle de l'absence de la cause qui avait été opérée par la jurisprudence a été en partie limitée par l'arrêt de rejet du 27 mars 2007 de la chambre commerciale de la Cour de cassation.
En l'espèce, un contrat de création d'un point de location de cassettes vidéo est conclu entre une société et un commerçant. Le contrat prévoit la location par le commerçant de cassettes auprès de la société, en vue de les mettre à disposition de ses clients. Le commerçant ne respecte pas ses obligations et ne paye pas la société, qui obtient une ordonnance d'injonction de payer.
Le commerçant forme alors opposition à cette injonction en demandant l'annulation du contrat. La Cour d'appel d'Agen, le 31 janvier 2005, rejette sa demande en nullité et le condamne à payer à son cocontractant une certaine somme.
[...] La subjectivisation du contrôle de l'existence de la cause avait été entamée par la jurisprudence antérieure. Cet arrêt confirme en effet, dans une certaine mesure, la solution dégagée par un arrêt précédent, l'arrêt du 3 juillet 1996 de la première chambre civile de la Cour de cassation. Dans l'arrêt de 1996, un contrat est annulé pour absence de cause, car l'exécution du contrat selon l'économie voulue par les parties était impossible L'exécution du contrat étant impossible dès le jour de sa conclusion, la Cour considère qu'il n'y avait aucune contrepartie. [...]
[...] Pour autant, la subjectivisation du contrôle de l'existence de la cause demeure. Faire peser la charge de la preuve sur le contractant qui invoque la nullité n'a aucune incidence sur le fait que la Cour de cassation approuve de façon générale la possibilité pour les juges du fond de faire une appréciation subjective de l'existence de la cause, dès lors que les preuves apportées sont suffisantes pour annuler le contrat. Si la Cour de cassation confirme donc la possibilité d'annuler des contrats pour une absence de cause appréciée subjectivement, cette confirmation n'est pas pour autant absolue : la Cour pose en effet par la même occasion des limites à la subjectivisation du contrôle de l'existence de la cause. [...]
[...] La Cour de cassation répond par la négative à ces deux questions et rejette le pourvoi. Elle considère d'abord que la Cour d'appel, ayant établi que le commerçant connaissait les prestations pour lesquelles il souscrivait un abonnement, a justifié sa décision de ne pas retenir de dol. Concernant la deuxième question, la Cour de cassation reprend les énonciations, constatations et appréciations de la Cour d'appel, et considère qu'elles suffisent à justifier sa décision. La Cour d'appel en effet affirme que si l'absence de cause se conçoit lorsque l'exécution du contrat selon l'économie voulue par les parties est impossible en raison de l'absence de contrepartie réelle, les éléments apportés par le demandeur, sur qui repose la charge de la preuve, sont insuffisants pour établir l'impossibilité d'exécuter le contrat, ses objectifs ayant été fixés par le demandeur lui-même, qui en tant que commerçant ne pouvait ignorer le contexte. [...]
[...] La solution de subjectivisation du contrôle de l'existence de la cause n'est donc pas retenue en l'espèce. Mais ce rejet repose sur une absence de preuve : il repose donc sur le cas d'espèce et non pas sur le principe en lui-même, qui est bien approuvé par la Cour de cassation. Si en l'espèce la preuve n'a pas été apportée, cela ne signifie pas que la nullité n'est jamais encourue, mais seulement qu'elle n'est pas encourue dans ce cas particulier. [...]
[...] Notamment, dans ces deux arrêts, le faible nombre d'habitants de la ville où est installé le vidéoclub est invoqué comme une des raisons pour lesquelles l'exécution du contrat était impossible. Pourtant, dans l'arrêt commenté, ces éléments ne sont pas jugés suffisants et la demande est rejetée. D'une part, elle est rejetée pour absence de preuve suffisante de la part du demandeur. Si, comme nous l'avons vu précédemment, cela ne remet pas nécessairement en cause le mouvement de subjectivisation amorcé en 1996, faire peser la charge de la preuve sur celui qui invoque la nullité du contrat pose une première limite : le demandeur doit être en mesure d'apporter des preuves suffisantes. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture