Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 19 janvier 2010, licéité des clauses potestatives, condition potestative illicite
En l'espèce, une société cède l'intégralité de ses actions à une société anonyme, moyennant le versement d'un prix ferme, la nomination de certains associés aux postes d'administrateurs et la qualité de président du conseil d'administration pour le principal actionnaire de la société cédante. L'acte de cession conclu par les parties le 24 juin 1997 stipule que ce même président se verra reverser un complément de prix proportionnel aux bénéfices de l'entreprise, à la condition qu'il reste dans ses fonctions jusqu'au 31 décembre 2003 et sous réserve de l'approbation des comptes de l'exercice 2003. Une rémunération spéciale est également prévue pour le président s'il favorise par ses « diligences » le renouvellement du contrat de l'entreprise avec son unique client.
[...] Si l'exigibilité est soumise à la seule volonté du créancier, la condition est admise. En revanche, si sa réalisation dépend de la volonté et du comportement du débiteur, la condition est illicite et peut entraîner la nullité du contrat. Bien qu'offrant une simple lecture des dispositions légales, le rappel est bienvenu tant la condition potestative aussi appelée clause d'earn-out est contestée en doctrine. Pourtant, comme le souligne William Dross dans son article L'introuvable nullité des conditions potestatives (JTD 2007 p 701), la condition potestative permet de restaurer l'équilibre dans un contrat qui n'oblige que l'une des parties : loin de participer au déséquilibre systématique du contrat, la condition résolutoire purement potestative peut au contraire en restaurer l'harmonie. [...]
[...] Commentaire de l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 19 janvier 2010 : la licéité des clauses potestatives Commentaire de l'arrêt Com janvier 2010 Le 19 janvier 2010, la chambre commerciale de la Cour de cassation aborde la question de la licéité des clauses potestatives. Cet arrêt fournit à la Haute Cour l'opportunité de rappeler les critères d'appréciation de telles clauses à l'origine de nombreux litiges. En l'espèce, une société cède l'intégralité de ses actions à une société anonyme, moyennant le versement d'un prix ferme, la nomination de certains associés aux postes d'administrateurs et la qualité de président du conseil d'administration pour le principal actionnaire de la société cédante. [...]
[...] La censure paraît donc justifiée en ce dont elle protège les intérêts du créancier, qui risque sans cela de ne jamais recevoir ce complément de prix que le contrat de cession lui fait miroiter. Le rapport de force est d'autant plus visible qu'un renouvellement du contrat de la société avec son principal client lui vaudra également une récompense financière. Sa qualité de président du conseil d'administration ne lui enlève pas moins une position d'asservie en tant qu'actionnaire minoritaire : cela dénote un déséquilibre manifeste de la relation contractuelle. L'absence de surprise qu'évoque cet arrêt se confirme d'ailleurs à la lecture du projet Catala. [...]
[...] Comme souvent, la Cour de cassation accompagne dans ses décisions les avancées législatives, et particulièrement cet avant- projet. Un arrêt conforme aux dispositions de l'avant-projet de réforme L'avant-projet Catala portant réforme du droit civil consacre un article aux conditions potestatives, bien qu'il en élude le nom. Ainsi, l'article 1175 du projet dispose est nulle toute obligation contractée sous une condition dont la réalisation dépend de la seule volonté du débiteur Contrairement à des arrêts d'appels du pied qui accompagnent une réforme législative, l'arrêt soumis à notre appréciation semble se satisfaire de la norme actuelle et à venir. [...]
[...] Une décision d'espèce rappelant les critères d'appréciation de la condition potestative Le rappel à la loi opéré dans cet arrêt suit la position jurisprudentielle en vigueur depuis l'édiction de l'article 1174 du Code civil Un attendu bref à la portée pédagogique Il lui appartenait, pour apprécier si la condition ( ) revêtait un caractère potestatif au sens du texte susvisé, de rechercher si sa réalisation dépendait de la seule volonté de la société AON-conseil et courtage. Par cet attendu très simple, la chambre commerciale rappelle les critères d'identification d'une condition potestative illicite. [...]
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