La responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur est régie par l'article 1384 du Code civil qui dispose dans son alinéa 4 que « le père et la mère, en tant qu'ils exercent le droit de garde, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ». Minorité et cohabitation vont donc constituer les conditions essentielles de la responsabilité des parents, mais encore fallait-il, jusqu'à une époque récente, que l'enfant ait commis une faute. En effet, les derniers acquis jurisprudentiels ont soumis l'obligation d'indemnisation des parents à une responsabilité sans faute de l'enfant mineur.
En l'espèce, au cours d'une séance d'éducation physique, Grégory Z. a perdu l'équilibre et a blessé dans sa chute Emmanuel X. qui a été atteint à la tête. Les époux X. ont alors intenté une action en justice afin de demander réparation de leurs préjudices aux époux Z. civilement responsables de leur enfant mineur Grégory. Les juges de la cour d'appel de Paris ont rejeté leur demande au motif qu'il ne résulte pas des faits que Grégory ait commis une faute de nature à engager la responsabilité civile de ses parents. Les époux X. se sont alors pourvus en cassation.
La question est de savoir si le régime de responsabilité des parents prévu par l'article 1384 alinéa 4 du Code civil est soumis à une faute de la part de l'enfant. Dans quelle mesure la nécessité d'indemniser la victime peut-elle entraîner l'établissement d'une responsabilité sans faute ? Cette question tient à l'interprétation de l'alinéa 4 de l'article 1384. En effet, le « dommage causé » ne peut-il pas être entendu de manière large, c'est-à-dire sans nécessairement prouver la faute de l'enfant ?
A cette interrogation l'assemblée plénière, le 13 décembre 2002, a répondu par l'affirmative. Les juges ont considéré que « pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l'autorité parentale sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué par la victime ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur ».
Ainsi, les parents sont responsables de tout fait, fautif ou non, commis par leur enfant mineur. La voie est ainsi tracée pour le recours à une responsabilité objective (I). Les parents, ainsi substitués à leur enfant ne bénéficient plus par ailleurs d'une présomption de faute tombant devant la preuve contraire. Désormais, ils sont soumis à une responsabilité de plein droit dont les conditions d'exonération sont appréciées de plus en plus sévèrement par le juge (II).
[...] La faible portée de la théorie de la substitution. La responsabilité des parents existe en dépit de l'irresponsabilité de l'enfant. Il y a donc autonomie de la responsabilité des parents à l'égard de la responsabilité personnelle de leur enfant. Les parents sont substitués, on ne l'oubliera pas, à leur enfant et indemniseront la victime. Or, s'ils avaient commis personnellement le fait non fautif, ils n'auraient pas été considérés comme responsables du dommage car l'article 1382 du Code civil nécessite la faute pour la mise en œuvre de la responsabilité civile. [...]
[...] Ils ont la garde de leur enfant mineur. Ainsi, n'importe quel fait du mineur, grave ou anodin, volontaire ou involontaire, est de nature à être réparé intégralement par les père et mère. En l'espèce, l'activité sportive comportait un risque pour les élèves. Le fait générateur du dommage (la perte d'équilibre) est totalement involontaire et incontrôlé, mais les parents de Grégory Z. n'en seront pas moins responsables. En établissant la responsabilité des parents, c'est leur propre faute qui est mise en avant. [...]
[...] C'est ce qu'indique l'alinéa 7 de l'article 1384, en autorisant les parents à prouver qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à leur responsabilité. Cette vision traditionnelle a été remise en cause par la Cour de cassation le 19 février 1997. Désormais, seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer un père de la responsabilité de plein droit du fait des dommages causés par son enfant. On substitue à la responsabilité des parents fondée sur une présomption de faute une responsabilité de plein droit. La responsabilité des pères et mères est donc marquée par une extrême rigueur. [...]
[...] Mais depuis l'arrêt Fullenwarth du 9 mai 1984, les parents sont déclarés responsables des agissements de leur enfant mineur sans que la victime ait à faire la preuve de l'existence du discernement, c'est-à-dire de la faute commise par l'enfant. Il suffira de démontrer l'intervention causale du mineur dans la réalisation du dommage. Ainsi, peu importe que le comportement de l'enfant soit normal ou anormal. Cette solution est rappelée dans l'arrêt de la deuxième chambre civile du 19 février 1997. La responsabilité des parents est donc fondée sur le risque résultant du comportement de leurs enfants. [...]
[...] Bull. crim. 3 ; BICC n°572, p.3, rapport de M. Le Corroller et conclusions de M. de Gouttes Note sous arrêt :Le Dalloz janvier 2003, p. 231-235, note P. [...]
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