Les régimes matrimoniaux constituent l'ensemble des règles de droit ayant pour objet de déterminer les rapports patrimoniaux des époux soit entre eux, soit avec des tiers. Elles sont composées du régime primaire et des différents régimes particuliers. Le régime primaire est, d'après Gérard Cornu dans son Vocabulaire juridique : « l'ensemble des règles primordiales à incidence pécuniaire, en principe impératives, applicables à tous les époux quel que soit leur régime matrimonial proprement dit et destinés à sauvegarder les fins du mariage, tout en assurant un pouvoir d'action autonome à chacun des époux ».
A priori, ce régime semble trouver son terrain de prédilection pendant la durée du mariage, mais certains problèmes ont pu être soulevés sur ce point, dont le cas présent est une illustration parfaite.
En l'espèce, Madame Komaiski, titulaire d'un compte titres à la banque Rothschild, devenue l'Européenne de Banque, se marie en 1909 avec Monsieur Edberg sans contrat de mariage, donc sous le régime de la communauté de meubles et acquêts. Son mari décédant en août 1973, Madame Edberg effectue des actes de disposition sur des valeurs pour de sommes importantes avec la collaboration de la Banque Rothschild. Or, l'opération se révèle désavantageuse. Les héritiers et Mme Edberg assignent alors la banque en dommages-intérêts aux motifs que la banque n'aurait pas du procéder à cette opération sans leur accord. On peut s'interroger sur le bien fondé de l'action de Mme Edberg, qui agit tout de même sur le fondement du préjudice que lui aurait causé la banque en exécutant ses volontés, quoique son action ait été acceptée.
Le débat se porte sur une confrontation entre l'article 221 du Code civil instituant une présomption de pouvoir de disposition des fonds par le dépositaire à l'égard du déposant inséré dans la partie concernant le régime primaire et l'article 1402 du Code civil posant la présomption d'acquêts dans la communauté. Le banquier a intérêt à voir l'effet de l'article 221 du Code civil prolongé le plus longtemps possible, n'ayant pas alors à rechercher la provenance des fonds déposés par l'époux survivant, les héritiers ayant, eux, plutôt intérêt au contraire.
En 1977, le tribunal de commerce de Paris rejette leur demande et considère que le compte ne doit pas être bloqué d'office et donc que la banque n'a pas à agir tant que les héritiers ne l'ont pas demandé. L'appel porté devant la Cour de Paris la même année retient la même solution mais la justifie en droit en faisant prévaloir l'article 221 du Code civil, qui survit au décès du conjoint jusqu'à la demande de blocage du compte par les héritiers, sur l'article 1402 du même code.
La veuve Edberg et ses enfants forment donc un pourvoi en cassation qui aboutit à un arrêt de la chambre commerciale en date du 11 octobre 1983 qui déclare applicable l'article 1402 du Code civil dès la dissolution du mariage.
La Cour d'appel de renvoi de Reims par un arrêt du 11 octobre 1983 tranche dans le même sens que la première Cour d'appel et déclare que la présomption édictée par l'article 221 n'empêche pas les héritiers de se prévaloir de la présomption d'acquêts mais que la dissolution du mariage n'oblige pas le banquier à procéder à une vérification du régime matrimonial.
Mme Ebderg et ses enfants se pourvoient à nouveau en cassation, l'assemblée plénière le rejetant par un arrêt du 4 juillet 1985.
Mais quelle est la durée de la présomption édictée par l'article 221 du Code civil ?
[...] En l'espèce, le banquier n'avait pas après sa connaissance du décès de M. Edberg à bloquer le compte, car la présomption de pouvoir de Mme Edberg sur les fonds était nés avant même qu'elle soit mariée, les effets de cette présomption, donc la libre disposition des fonds et donc la dispense de recherche par le banquier, s'étendent donc jusqu'à l'opposition des enfants Edberg. La Cour rejette ainsi la demande des héritiers en considérant que leur opposition n'ayant pas eu lieu, la banque devait considérer les titres comme appartenant à Mme Edberg. [...]
[...] On peut se demander si en l'occurrence la Cour n'excède pas ses pouvoirs en suppléant le législateur et en osant aller à l'encontre de dispositions édictées par le législateur. Une solution justifiée par les besoins de la pratique La décision des juges, même contra legem, est justifiée par des besoins pratiques. En effet, le rôle des juges n'est pas seulement de se conformer à la lettre de la loi mais d'en faire l'application le plus opportune afin de permettre une administration de la justice optimale. [...]
[...] Les héritiers et Mme Edberg assignent alors la banque en dommages-intérêts aux motifs que la banque n'aurait pas du procéder à cette opération sans leur accord. On peut s'interroger sur le bien fondé de l'action de Mme Edberg, qui agit tout de même sur le fondement du préjudice que lui aurait causé la banque en exécutant ses volontés, quoique son action ait été acceptée. Le débat se porte sur une confrontation entre l'article 221 du Code civil instituant une présomption de pouvoir de disposition des fonds par le dépositaire à l'égard du déposant inséré dans la partie concernant le régime primaire et l'article 1402 du Code civil posant la présomption d'acquêts dans la communauté. [...]
[...] Elle trouvera également son terrain de prédilection dans les cas de divorce ou de séparation de corps. L'arrêt a donc une application bien plus large que celle du cas d'espèce. Dans ces cas, le banquier sera également dispensé de s'informer de l'évolution de la situation, mais la jurisprudence de 1985 verra tout de même son ampleur modérée par le fait que dans ce cas l'autre conjoint est présent. En effet, comme le fait remarquer le doyen Ponsard, il est alors sans doute beaucoup moins à craindre que le conjoint du titulaire du compte ne veille pas à la défense de ses intérêts, de sorte que la question ne se posera guère Si les fonds ne sont effectivement pas au déposant, le conjoint qui a juridiquement le pouvoir d'en disposer se manifestera. [...]
[...] La Cour d'appel de renvoi de Reims par un arrêt du 11 octobre 1983 tranche dans le même sens que la première Cour d'appel et déclare que la présomption édictée par l'article 221 n'empêche pas les héritiers de se prévaloir de la présomption d'acquêts mais que la dissolution du mariage n'oblige pas le banquier à procéder à une vérification du régime matrimonial. Mme Ebderg et ses enfants se pourvoient à nouveau en cassation, l'assemblée plénière le rejetant par un arrêt du 4 juillet 1985. [...]
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