L'assemblée plénière de la Cour de cassation adopte dans son arrêt du 25 février 2000 une position étonnante qui bouleverse la responsabilité traditionnelle des commettants du fait de leur préposé en conférant à ce dernier une certaine immunité civile.
En l'espèce, un préposé a procédé à l'épandage de produits toxiques sur une culture. En raison de conditions météorologiques, ces produits se sont propagés sur des cultures voisines en les endommageant. Le propriétaire des cultures endommagées décide donc d'engager une action en responsabilité contre le préposé.
Par un arrêt du 26 mars 1997, la Cour d'appel d'Aix en Provence retient la responsabilité personnelle du préposé. Celui-ci n'aurait pas du épandre de produits toxiques en raison des conditions météorologiques. Ce dernier décide alors de se pourvoir en cassation.
Il s'agit dès lors de savoir si le fait pour un préposé de commettre une faute dans l'exercice de sa fonction est susceptible d'engager sa responsabilité personnelle à l'égard des tiers ?
L'assemblée plénière de la Cour de cassation casse pour violation de la loi la décision de la Cour d'appel d'Aix en Provence dans un arrêt du 25 février 2000. Elle vise les article 1382 et 1384 alinéa 5. Dans un attendu de principe, elle énonce que « n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant. » Elle renvoie les parties devant la Cour d'appel de Montpellier.
L'arrêt est intéressant dans le sens où il nous propose une lecture nouvelle de l'alinéa 5 de l'article 1384 du Code civil. Auparavant, la responsabilité des commettants du fait de leurs préposés s'appuyait sur la théorie de la garantie. La victime du fait du préposé pouvait engager la responsabilité soit du préposé soit de son commettant pour une garantie de solvabilité. L'arrêt de l'assemblée plénière semble remettre ce schéma en cause puisque n'est pas ici retenue la responsabilité personnelle du préposé en raison de sa faute. Cette décision a pour ambition de protéger le préposé subordonné au commettant d'endosser systématiquement la responsabilité de faits dommageable. Le commettant sera alors seul responsable. En pratique, cela va nuire à la fois à la victime mais aussi au commettant.
Cet arrêt semble autorisée une certaine immunité civile au préposé qui même en cas de faute ne pourra voir sa responsabilité engagée. A moins que ce fait n'ait été commis en dehors des limites de la mission qui lui a été confiée par son commettant. Le commettant en assumera alors toutes les conséquences. Celui-ci ne pourra se dégager de sa responsabilité que si il peut prouver que celui-ci a abusé de ses fonctions. Il nous faudra préciser les notions d'excès dans les limites de la mission et d'abus de la fonction qui doivent semblent être distinguées.
C'est la raison pour laquelle il faudra dans un premier temps étudier les apports de cet arrêt quant à la responsabilité du préposé et de son commettant et à ses conditions (I) Le régime juridique de la responsabilité des commettants du fait de leur préposé demeure floue. Cette décision intervient au détriment de la victime qui ne pourra plus se rabattre que sur la responsabilité du commettant (II).
[...] Celui-ci n'aurait pas dû épandre de produits toxiques en raison des conditions météorologiques. Ce dernier décide alors de se pourvoir en cassation. Il s'agit dès lors de savoir si le fait pour un préposé de commettre une faute dans l'exercice de sa fonction est susceptible d'engager sa responsabilité personnelle à l'égard des tiers . L'assemblée plénière de la Cour de cassation casse pour violation de la loi la décision de la Cour d'appel d'Aix en Provence dans un arrêt du 25 février 2000. Elle vise les articles 1382 et 1384 alinéa 5. [...]
[...] Un arrêt de l'assemblée plénière du 19 mai 1988 met fin à cette opposition et définit l'abus de fonction. C'est l'acte du préposé hors fonction, accompli sans autorisation du commettant, à des fins étrangères à ces attributions Ces trois conditions cumulatives sont reprises par l'alinéa 2 de l'article 1359 de l'avant-projet Catala. L'autorisation fait l'objet d'une présomption de la part de la jurisprudence, le commettant devra alors prouver son absence. L'avant-projet Catala permet au commettant de s'exonérer s'il prouve que la victime ne pouvait légitimement croire que le préposé agissait pour le compte du commettant. [...]
[...] Il ne s'agit donc plus de la prise en compte de la faute mais des limites de la mission. Le préposé fautif ne peut voir sa responsabilité personnelle engagée si ce fait dommageable est intervenu dans les limites de sa mission. Cela est critiquable au regard de la responsabilité civile puisque la Cour de cassation admet ici un cas de faute sans responsabilité. Cette décision de la Cour de cassation se heurte à des difficultés pratiques. Certains préposés disposent dans leur mission d'une certaine indépendance d'action due à la technicité de celle-ci. [...]
[...] En effet, la jurisprudence exigeait traditionnellement un fait générateur de responsabilités personnelles du préposé pour engager la responsabilité du commettant puisqu'elle opérait une addition de responsabilité. Mais l'arrêt de l'assemblée plénière peut faire douter de cette exigence. Cependant, un arrêt de la Cour de cassation du 8 avril 2004 exige une faute susceptible d'engager la responsabilité du préposé. Exonération en cas d'abus de fonction du préposé. Le commettant ne dispose que d'un seul moyen d'exonération. Il doit prouver que le préposé a abusé de ses fonctions dans la commission de l'acte dommageable. [...]
[...] La jurisprudence semble vouloir distinguer ces deux notions, une solution favorable pour la victime. M. Mouly interprète l'arrêt de la chambre criminelle du 28 mars 2006 comme n'assimilant pas l'abus de fonction et le fait d'excéder les limites de sa mission. Une nécessaire distinction des deux notions. Lorsque l'on distingue ces deux notions, la responsabilité du préposé qui a excédé les limites de sa mission n'exclut pas celle du commettant. En l'absence d'abus de fonction, sa responsabilité sera aussi engagée. [...]
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