L'évolution d'un litige permet de mettre en cause un tiers devant la Cour d'appel, selon l'article 555 du nouveau Code de procédure civile. Cependant, les conditions de mise en œuvre de cette possibilité font l'objet un grand contentieux. C'est ainsi que l'Assemblée plénière de la Cour de cassation est intervenue sur ce point dans un arrêt du 11 mars 2005. En l'espèce, la société civile immobilière Lagadec (SCI Lagadec) a confié la réalisation d'immeubles à la société Seritel, assurée par la Caisse générale d'assurances mutuelles (CGAM). Celle-ci a sous-traité les travaux de couverture des immeubles à la société Drouault Godefroy, assurée par la compagnie Allianz Via. La société Seritel n'a pas été intégralement payée. Elle assigne la SCI Lagadec devant le tribunal de grande instance. Cette dernière est condamnée à lui payer une somme, déduction faite des frais de reprise des désordres constatés par un expert. La SCI Lagadec interjette appel. L'affaire passe ensuite devant la deuxième chambre civile de la Cour de cassation puis est renvoyée devant la Cour d'appel d'Angers, le 3 octobre 2003. Une nouvelle expertise est ordonnée et la société Seritel assigne en intervention forcée la CGAM, la société Drouault Godefroy et son assureur. La Cour d'appel a déclaré ces interventions irrecevables car elle a estimé que les données juridiques du litige n'avaient pas été modifiées par le second rapport d'expertise. La société Seritel se pourvoit en cassation.
Mais quelles sont les caractéristiques de l'élément nouveau constituant l'évolution du litige permettant la mise en cause d'un tiers en appel ?
La réponse à cette question a son importance car elle permet de savoir dans quels cas un tiers peut être mis en cause en appel et donc si les interventions forcées demandées par la société Seritel doivent être accueillies.
Ainsi, il convient de voir tout d'abord les conditions de l'intervention forcée (I), puis le rejet des interventions forcées confirmé par l'Assemblée plénière (II).
[...] Commentaire d'arrêt : Ass. Pl mars 2005 L'évolution d'un litige permet de mettre en cause un tiers devant la Cour d'appel, selon l'article 555 du nouveau Code de procédure civile. Cependant, les conditions de mise en œuvre de cette possibilité font l'objet un grand contentieux. C'est ainsi que l'Assemblée plénière de la Cour de cassation est intervenue sur ce point dans un arrêt du 11 mars 2005. En l'espèce, la société civile immobilière Lagadec (SCI Lagadec) a confié la réalisation d'immeubles à la société Seritel, assurée par la Caisse générale d'assurances mutuelles (CGAM). [...]
[...] En suivant le même raisonnement que précédemment, cela constituerait l'élément nouveau ayant fait évolué le litige et permettant de mettre en cause l'assureur du sous-traitant. Ces prétentions ont pourtant été rejetées par la Cour d'appel d'Agen. L'existence d'un élément nouveau faisant évoluer le litige ne fait pas l'unanimité en l'espèce, c'est pourquoi l'Assemblée plénière est venue se prononcer sur ce sujet en confirmant l'arrêt d'appel. II Le rejet des interventions forcées confirmé par l'Assemblée plénière Après examen des deux rapports d'expertise, il ressort que ceux-ci sont identiques Les données juridiques du litige n'ont donc pas été modifiées, ce que confirme l'Assemblée plénière Les rapports d'expertise identiques Le premier rapport d'expertise avait relevé d'une part les désordres affectant les bâtiments, leurs causes et le montant des réparations à faire, et d'autre part, les désordres affectant les travaux de couverture, leurs causes et le montant des travaux nécessaires pour y remédier. [...]
[...] Et il doit également être relevé par le jugement ou être survenu postérieurement à celui-ci, selon la même chambre dans un arrêt rendu le 22 mars 1977 (Bull. civ. 145). Le second moyen invoqué par la société Seritel, relatif au dépassement de la franchise d'assurance, doit être écarté en ce qu'il est surabondant. En revanche le premier et le dernier moyens tentent de prouver en quoi l'élément nouveau exigé existe en l'espèce. En effet, deux rapports d'expertise ont été élaborés à l'occasion des travaux litigieux. Ils s'accordent sur les désordres constatés et sur leurs causes. [...]
[...] Elle décide donc de rejeter les demandes en intervention forcée formulées par la société Seritel en précisant que la dernière expertise n'a pas modifié les données juridiques du litige dont l'évolution ne résidait que dans la nature et le coût des réparations. Ainsi, même si l'appréciation du montant des réparations diffère, les désordres constatés et leurs causes sont identiques. Cela suffit à démontrer que le litige n'a pas évolué. Lorsque les données juridiques d'un litige ne sont pas modifiées, les interventions forcées demandées ne peuvent qu'être rejetées. C'est d'ailleurs ce que confirme l'arrêt d'Assemblée plénière de la Cour de cassation le 11 mars 2005. [...]
[...] Cette demande incidente, appelée intervention forcée en appel, qui permet de mettre en cause un tiers devant la Cour d'appel, se fait par la voie de l'assignation. Celle-ci vaut donc conclusions. Cependant, l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 14 octobre 1981 précise que l'intervention forcée d'un tiers n'est pas destinée à réparer un oubli, une négligence ou une mauvaise appréciation des droits du demandeur en intervention (Bull. ch. Avoués 22). Dans l'arrêt à commenter du 11 mars 2005, la société Seritel se voit déduire de son paiement par la SCI Lagadec les frais de reprise de désordres constatés par un expert. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture