De tout ce qui concerne la protection des droits subjectifs, ou leurs atteintes, la protection du droit à l'image en est l'un des aspects les plus controversés. En effet, à une époque où, selon l'expression de Roland Barthes, le « tout-à-l'égo » nécessite plus que jamais de recentrer l'actualité sur les personnes, la volonté de préserver leur sécurité n'a d'égale que la difficulté juridique de sauvegarder celle de la presse.
En l'espèce, les faits étaient les suivant : le journal « Paris-Match » avait publié une photographie de Mme Beauvisage, victime d'un attentat commis à Paris, sur une place publique, le 25 juillet 1995. Cette dernière n'avait pas donné son autorisation pour ce faire.
Madame Beauregard porta vraisemblablement l'affaire devant une juridiction du premier degré, dont le jugement devait par la suite faire l'objet d'une interjection devant la cour d'appel de Paris.
Le journal « Paris-Match » forma un pourvoi en cassation de cette décision, puisqu'il n'entendait pas être l'objet d'une condamnation.
La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu à cette occasion un arrêt d'une grande importance le 20 février 2001.
Pour en mieux voir les arcanes, il convient de l'analyser et de le discuter. Pour ce faire, nous essaierons de voir, dans trois parties respectives, son sens (I), sa valeur (II), et sa portée (III).
[...] C'est pourquoi, l'équilibre équivaut à une incertitude qui peut être, sous divers angles, être considéré comme tout à fait acceptable. Mais historiquement et politiquement, il convient, dans l'intérêt de la communauté, de sacrifier la morale publique et l'intérêt personnel sur l'autel de l'information et de la liberté de la presse, qui a souvent prouvé, plus que les individualités légalistes, que sa raison valait bien l'enterrement de la notion d'équité. [...]
[...] La demande de pourvoi de la personne concernée avait été rejetée par la Cour de cassation. Là, le rocambolesque de la situation ne permettait pas à la Cour de cassation de donner raison à cette personne, qui jouait manifestement sur la l'orientation claire de la jurisprudence à l'époque. Plus éloquente encore est l'arrêt de la Cour de cassation qui, le 23 avril 2003, prenait quelques distances avec la sacralité du principe du respect à l'intimité de la vie privée, en donnant raison à la Cour d'appel de Versailles, qui, le 25 mai 2001, sur le motif qu'elle avait relevé qu'à la date de la publication, le fait concerné par la photographie était un fait d'actualité, officiel et notoire, et que son rappel n'excédait pas les limites de la liberté d'information (d'autant plus que, disait la Cour d'appel, l'article concerné était dénué de toute malveillance La décision du 11 décembre 2003, de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation, retient qu'une photographie litigieuse, prise au cours d'une manifestation publique, est en relation avec l'article publié, et que la légende qui l'accompagne est également en relation directe avec l'événement. [...]
[...] A cette occasion, dit- il, la Haute juridiction avait fait évoluer le droit à l'image de l'absolu vers le relatif en opérant un contrôle du caractère attentatoire à la dignité des clichés litigieux. En effet, de nombreux arrêts semblent être conforme à cette orientation de la jurisprudence elle a comme grand avantage d'enfin permettre une distinction relative aussi bien pour l'atteinte au droit à la vie privée que pour l'atteinte au droit à l'image. Bigot évoque aussi la cohérence de cette évolution jurisprudentielle avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme qui invite le juge à effectuer un contrôle de proportionnalité, selon un critère consistant à mettre en balance les intérêts en présence : la Cour de cassation, dans son arrêt du 23 avril 2003, relevait expressément dans sa motivation que le juge du fond avait cherché un équilibre entre la protection de la vie privée et l'objectif d'information revendiqué par l'organe de presse en cause aussi la décision du 23 avril ne révélait pas une réorientation de la Cour de cassation vers une défense de la vie privée, mais uniquement sur la nécessité d'équilibre entre elle et la liberté de la presse. [...]
[...] L'interprétation qui en est faite actuellement va dans le sens de la décision du 20 février 2001, cependant que ce dernier point mérite d'être précisé. Le professeur David Bakouche pose le problème en ces termes : un inquiétant effacement du droit à l'image face à la liberté de communication des informations Cette position s'explique au regard de la jurisprudence antérieure à l'arrêt. Il apparaît en effet que cette jurisprudence était clairement engagée vers un certain effacement de la liberté de la presse au bénéfice de la protection du droit à l'image. [...]
[...] Mais une telle concordance de point de vue ne peut qu'amener à vouloir émettre, sinon des critiques, du moins des observations quant à leur homogénéité. Sa valeur : appréciation critique Sociologiquement, dans une société où les clivages sociaux sont de plus en plus tranchés et criants, l'existence d'une presse en partie dédiée à la vie privée peut apparaître de nature à remplir une fonction sociale réelle, soit en véhiculant du rêve, soit à l'inverse en banalisant les difficultés d'existence. Cependant, ce propos doit être nuancé. [...]
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