17 septembre 2020, pourvoi 19-16.937, parc éolien, indemnisation d'un préjudice, trouble anormal de voisinage, résolution d'un litige, balance coût-avantage
En l'espèce, un parc éolien a été construit non loin d'habitations, ce qui cause inévitablement aux propriétaires un dommage, tant visuel que sonore. Les propriétaires assignent donc la société exploitant le parc en réparation du préjudice.
L'affaire est portée dans un premier temps devant une juridiction de première instance dont la décision est contestée par l'une des parties. L'affaire est donc portée devant la Cour d'appel d'Amiens. Cette dernière, dans un arrêt en date du 26 mars 2019, déboute les propriétaires lésés de leurs demandes, invoquant que le trouble causé est insuffisant pour justifier une indemnisation.
Les propriétaires forment donc un pourvoi devant la Cour de cassation au moyen que la cour d'appel, qui a reconnu l'existence d'un trouble du voisinage, n'en a pas tenu compte dans sa décision. De ce fait, elle aurait violé le principe préétabli relatif justement aux troubles du voisinage.
[...] Cour de cassation, 3e Chambre civile septembre 2020, n°19-16.937 - Le trouble du voisinage causé par l'exploitation d'un parc éolien peut-il donner lieu à une indemnisation ? « Nul ne doit causer à autrui aucun trouble anormal de voisinage ». Ce principe est clairement établi dans la jurisprudence de la Cour de cassation depuis un arrêt de 2003, qui définit les troubles anormaux de voisinage. Toutefois, un certain nombre de troubles présentent un caractère particulier par leur objet ou leur forme. [...]
[...] La Cour de cassation est donc amenée à préciser sa jurisprudence, en se demandant si le trouble du voisinage causé par l'exploitation d'un parc éolien peut donner lieu à une indemnisation. La Cour, dans son arrêt, reconnaît l'existence d'un trouble, comme l'avait déjà fait la Cour d'appel d'Amiens, et insiste sur l'appréciation in concreto qui doit être faite des faits de l'espèce En appliquant justement ce principe, et celui du rapport coût-avantage, la Cour de cassation estime que le trouble est en l'espèce négligeable. [...]
[...] L'affaire ne saurait en effet donner une orientation figée quelconque. Il est donc impossible de tirer de conclusion quant aux troubles causés par un parc éolien, la Cour de cassation par cet arrêt n'exclut pas l'indemnisation, ni l'existence d'un trouble, au contraire, elle rappelle qu'il peut être retenu si les faits de l'espèce le justifient. Il est donc tout à fait possible que dans des circonstances différentes, en appliquant les mêmes principes nouveaux, la Cour de cassation et les juges du fond retiennent une solution radicalement différente sans pour autant modifier la jurisprudence établie par l'arrêt étudié de 2020. [...]
[...] De fait, la Cour de cassation et le juge judiciaire sont bien moins coutumiers de cette méthode. La Cour de cassation vient confirmer l'appréciation souveraine de la Cour d'appel d'Amiens, qui retenait que le trouble causé était négligeable au vu des bienfaits de l'installation. C'est en partie sur ce motif qu'elle exclut une indemnisation. Par ailleurs, il est important de noter que la Cour de cassation regarde aussi le caractère sérieux de la demande, qui est en l'espèce faible, car elle est inférieure à 20% du prix global du bien. [...]
[...] Sur ce point, l'arrêt est intéressant, car il confirme qu'une installation d'intérêt général peut être responsable de trouble, et même, au contraire de l'interprétation qui a pu être faite de l'arrêt, être la source d'une indemnisation. Toutefois, pour en connaitre, la Cour de cassation devait nécessairement utiliser une méthode nouvelle pour mesurer le trouble. La balance coût-avantage comme apport novateur à l'analyse des litiges En appui de son analyse, et c'est l'apport majeur de son arrêt, la Cour de cassation utilise une méthode commune en droit administratif, mais peu utilisé en matière judiciaire. [...]
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