C'est un arrêt de rejet de la chambre mixte de la Cour de cassation, rendu le 28 novembre 2008, qui s'attache à la qualification, vu le cas d'espèce, du caractère de la cause étrangère exonératoire de la responsabilité.
En l'espèce, un passager de la SNCF a été mortellement blessé suite à son comportement délibérément dangereux. Ses ayants droits ont fait assigner la SNCF en réparation des préjudices matériels et moraux causés par cet accident. La Cour d'appel a accueilli la requête des demandeurs au motif que le comportement délibérément dangereux de la victime n'était pas de nature à l'exonérer entièrement de sa responsabilité, du fait que son attitude n'était ni imprévisible ni irrésistible. La société de transport (la SNCF) forme un pourvoi en cassation en estimant que l'arrêt de la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil. En effet, elle estime que le comportement aberrant d'un voyageur refusant de respecter les consignes de sécurité à bord du transport et s'exposant lui-même au danger est de nature à exonérer entièrement le transporteur de toute responsabilité.
Il paraît donc opportun, vu le cas d'espèce, de se demander si la faute d'imprudence de la victime présente un caractère de la force majeure, permettant ainsi au transporteur ferroviaire de s'exonérer de sa responsabilité.
[...] L'accentuation de l'indifférence de la gravité de la faute de la victime Il ressort de l'arrêt que les juges ont apporté une précision, à leur attendu de principe. En effet, s'agissant de la faute de la victime ils précisent que le transporteur ne peut s'exonérer de sa responsabilité quelle qu'en soit la gravité Il me parait néanmoins important de soulever que cette décision s'avère beaucoup trop sévère à l'égard de la SNCF, puisqu'il ne serait question alors pour la SNCF de prouver son irresponsabilité qu'à travers les cas de force majeure, réunissant les trois critères cumulatifs de la notion même. [...]
[...] Ainsi la Cour a relevé, de par une appréciation in abstracto, que la SNCF n'a pas pris les mesures nécessaires, pour prévenir ce genre d'accident. La Cour conclut donc de la manière suivante que l'irrésistibilité n'était donc pas absolue et que l'imprévision ne peut pas être établie du fait de la connaissance par la SNCF d'une absence totale de système de verrouillage des portes, lorsqu'il est en marche et du fait que ce manquement à la sécurité est évitable. La jurisprudence de l'espèce, confirme donc la jurisprudence adoptée récemment, et s'appuie aussi sur des décisions rendues en matières délictuelles, des décisions sévères envers le transporteur puisqu'elles ont écarté l'exonération totale du transporteur en rejetant le cas de force majeure appliqué à la faute de la victime alors même qu'elle manifestait un comportement dangereux et aberrant (arrêt de la deuxième chambre civile du 15 décembre 2005 ou encore un arrêt du 13 juillet 2006). [...]
[...] Le moyen invoqué souligne donc que la Cour d'appel qui a estimé que le comportement dangereux, qui a délibérément ouvert les portes d'un train en marche n'était pas de nature à exonérer de sa responsabilité la SNCF du fait du caractère prévisible et non irrésistible de son attitude. Et le fait d'invoquer la violation de l'article 1147 du Code civil ne permettra pas de s'exonérer de son obligation de sécurité de résultat, puisque ce même article dispose que pour s'exonérer de cette obligation, le transporteur doit démontrer que l'accident est dû à la faute exclusive de la victime, présentant ainsi le caractère de la force majeure. [...]
[...] Il y aura une mise en ordre opérée dans un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, du 14 avril 2006, réaffirmant la nécessité des trois critères pour caractériser la force majeure, que ce soit en matière contractuelle ou délictuelle. Ainsi ayant pu développer la notion à travers l'évolution jurisprudentielle, de cas de force majeure, il est temps de voir à présent le moyen invoqué par le pourvoi du cas d'espèce, le caractère d'extériorité de la faute de la victime. [...]
[...] La chambre mixte de la Cour de cassation rejette le moyen du pourvoi formé, au motif que l'absence de verrouillage des portes en connaissance de cause et de tout agent de contrôle rendait la faute de la victime ni imprévisible ni irrésistible pour la SNCF. La Cour estime donc qu'elle ne peut pas se fonder sur le caractère de la force majeure pour pouvoir prétendre s'exonérer de sa responsabilité. C'est pourquoi il va être question de voir que comment s'est opérée la recherche des causes exonératoires de la responsabilité à travers des caractères de la force majeure et que la faute de la victime reste insusceptible d'entraîner une exonération partielle de la responsabilité (II). [...]
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