Les hésitations jurisprudentielles en matière de dommage réparable ont été nombreuses. Ce n'est qu'avec sa décision du 27 février 1970 que la Cour de cassation va enfin stabiliser et unifier l'état du droit en la matière. En l'espèce, Madame Gaudras a perdu son concubin suite à un accident de la circulation provoqué par M. Dangereux. Suite à ce décès, Madame Gaudras demande réparation du préjudice qu'elle a subi du fait du décès de son concubin.
Le Tribunal de Grande Instance fait droit à sa demande en se basant sur deux éléments : le concubinage offrait des garanties de stabilité et ne présentait pas de caractère délictueux. Mais la Cour d'Appel, considérant que le concubinage est une situation de fait qui ne peut pas créer des effets de droit, a infirmé ce jugement sur le fondement du principe selon lequel le demandeur d'une indemnité doit justifier de la lésion certaine d'un intérêt légitime, juridiquement protégé. Madame Gaudras se pourvoit en cassation pour obtenir réparation.
La question qui se posait à la Cour de cassation réunie en Chambre mixte était celle de savoir si la concubine, qui a subi le dommage par ricochet, pouvait se prévaloir d'un dommage légitime du fait du décès de son concubin.
[...] La question qui se posait à la Cour de cassation réunie en Chambre mixte était celle de savoir si la concubine, qui a subi le dommage par ricochet, pouvait se prévaloir d'un dommage légitime du fait du décès de son concubin. Dans son arrêt de principe du 27 février 1970, la Haute juridiction casse l'arrêt d'Appel et opère un revirement de jurisprudence sur le fondement de l'article 1382 en posant le principe selon lequel cet article n'exige pas, en cas de décès, l'existence d'un lien de droit entre la victime immédiate et le demandeur en réparation du préjudice. [...]
[...] La prise en compte de telles conditions apparaît dans le soin que prend la Cour de retranscrire sans l'infirmer la décision de première instance qui avait elle-même retenu ces deux éléments. Le fondement de la décision est donc une nouvelle interprétation de l'article 1382 avec le rejet de la condition de l' intérêt légitime, mais sa conséquence directe et indéniablement voulue par la Cour est ce changement de statut du concubinage. II) Une décision charnière : réunification jurisprudentielle et recherche de l'équité La chambre mixte de la Cour de cassation a opéré par cet arrêt du 27 février 1970 un important revirement, longtemps attendu par la doctrine, consacrant ainsi une jurisprudence unifiée mais aussi plus juste et équitable Un revirement de jurisprudence resituant la Cour de cassation dans son rolle de pouvoir régulateur Longtemps, la jurisprudence s'est trouvée nettement divisée quant à la question des victimes par ricochet et principalement des victimes par ricochet particulières : les concubines. [...]
[...] En unifiant sa jurisprudence, comme elle se doit de le faire, la Cour de cassation a apporté davantage de stabilité juridique. Une même personne ne verra plus sa même demande être entendue ou éconduite selon qu'elle va devant l'une ou l'autre chambre. Et cela est heureux Elle a ainsi mis fin à la création d'un droit prétorien, à un principe juridiquement infondé qui refusait de faire application d'un texte de loi au motif qu'une condition qu'il ne contenait pas n'était pas remplie. [...]
[...] On voit à quel paradoxe aurait abouti la Cour si elle avait accepté la réparation du préjudice matériel et refusé celle du préjudice moral, autrement dit si elle n'avait fait qu'une cassation partielle de l'arrêt d'Appel Mais outre cette question de la nature du dommage, qui est certes importante, la cour a dû résoudre un problème autrement fondamental et qui constitue le réel apport de cet arrêt : celle de la recevabilité de la demande en réparation. L'article 1382 par la généralité de ses termes permettrait d'allouer des dommages et intérêts à toute personne ayant subi, par la faute d'une autre, un dommage. Tout d'abord, la jurisprudence a posé la condition selon laquelle ce dernier devait être direct : il l'est ici, la cour prend soin de le rappeler lorsqu'elle précise que M. Dangereux a bien été reconnu responsable de la mort du M. Paillette. [...]
[...] En l'espèce, le problème ne se posait qu'à peine : il est évident que Mme Gaudras a subi un préjudice du fait du décès de son concubin, ne serait ce que parce qu'il subvenait en partie à ses besoins. A la condition du caractère direct et certain du dommage, et à l'analyse du type du dommage réparable vient s'ajouter le problème fondamental en l'espèce de la légitimité. Tous les dommages ne sont pas réparables, ne méritent pas d'être pris en compte par le droit. [...]
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