Par cet arrêt du 28 septembre 1970, la chambre criminelle de la cour de cassation traite de la dégradation de monuments suivie de rébellion.
En l'espèce, deux individus ont appliqué de la peinture indélébile sur un monument d'utilité publique afin d'y laisser une inscription objectivement politique de par son libellé.
L'un des deux vandales a tenté de s'enfuir en cherchant à faire tomber le gardien de la paix qui venait de le prendre en flagrant délit et lui a porté des coups que ce policier a du parer.
C'est pourquoi, la cour d'appel de Paris les a condamnés pour dégradation de monuments d'utilité publique et a également condamné le fuyard pour rébellion à trois mois d'emprisonnement avec sursis et cinq mois d'emprisonnement, par un arrêt en date du 25 juin 1970.
Les deux condamnés forment un pourvoi en cassation pour défaut et contradiction de motifs ainsi que pour la violation de l'article 749 du code de procédure pénale (relevé d'office).
Mais les prévenus peuvent-ils être condamnés pour des dégradations de monuments d'utilité publique par l'apposition d'une peinture à celui-ci et dans quelles conditions ? La contrainte par corps peut-elle être prononcée pour cette infraction si l'inscription a un objectif politique?
La cour de cassation déclare qu'elle est incompétente pour juger les faits et affirme d'autre part qu'il s'agit bien d'une dégradation de monument public, la peinture indélébile ne pouvant être enlevée sans entraîner une détérioration du monument.
Cependant, l'inscription étant objectivement politique, la contrainte par corps ne peut être prononcée et c'est pourquoi elle casse l'arrêt de la cour d'appel de Paris.
Cette position est conforme à la loi, tant sur le rappel du rôle de la cour de cassation que sur le refus de prononcer la contrainte par corps pour une infraction politique. Cette règle étant en effet énoncée par l'article 749 du code de procédure pénal. Elle apparaît également juste sur le plan pratique, la peine prononcée étant en effet proportionnelle aux valeurs et aux intérêts sociaux protégés.
Si le caractère politique des infractions complexes a été de nombreuses fois refusé par la jurisprudence dans le but de déclarer applicable la contrainte par corps et que ce point de droit semblait définitivement clos, l'arrêt du 28 septembre 1970 remet en cause la conception « objectiviste » antérieure (I). Mais nous verrons dans un second temps que cet arrêt ne constitue pas un revirement jurisprudentiel mais plutôt ce que Koering-Joulin a nommé un « accident de parcours »(II).
[...] En effet, la preuve de la motivation est flagrante du fait des circonstances dans lesquelles l'infraction avait été commise et en plus des circonstances, le contenu même du message permet de lever tous les doutes sur le caractère politique du mobile En l'espèce, ce n'est pas le fait de dégrader un monument qui est ici qualifié mais l'objectif visé et le procédé utilisé pour atteindre le résultat. La cour retient donc que les délinquants étaient motivés politiquement et que l'infraction a permis d'atteindre le mobile, grâce au message inscrit sur le monument. Mais si la cour suprême pose ici la prise en compte du mobile, elle fixe une limite : le mobile doit être parfaitement caractérisé. Nous pouvons donc dire que c'est le caractère objectivement politique de l'inscription qui conduit à assimiler le délit à une infraction politique. [...]
[...] Tout d'abord, il est aisé de constater que dégradation de bien public ne signifie en aucun cas infraction politique Nombreuses sont les situations où des vandales détériorent des monuments sans que leurs mobiles soient politiques. En l'espèce, la chambre criminelle se fonde sur le caractère politique de l'inscription ce qui lui permet de nover ce délit de droit commun en une infraction politique. Mais dans son arrêt, la cour de cassation précise que l'infraction ne devait être qu'assimilée à une infraction politique et ce, seulement concernant la contrainte par corps. [...]
[...] Chambre criminelle de la Cour de cassation septembre 1970 Par cet arrêt du 28 septembre 1970, la chambre criminelle de la cour de cassation traite de la dégradation de monuments suivie de rébellion. En l'espèce, deux individus ont appliqué de la peinture indélébile sur un monument d'utilité publique afin d'y laisser une inscription objectivement politique de par son libellé. L'un des deux vandales a tenté de s'enfuir en cherchant à faire tomber le gardien de la paix qui venait de le prendre en flagrant délit et lui a porté des coups que ce policier a dû parer. [...]
[...] De ce fait, la cour de cassation permet de réduire l'application du critère subjectif qui permet trop facilement de qualifier une infraction politique. Certains auteurs comme messieurs Chabas et Légal pensent que cette jurisprudence fait fléchir la rigueur du critère objectif car l'inscription était la preuve du mobile politique tout en limitant un mouvement de subjectivisme. Nous pouvons donc conclure en donnant deux possibilités que semble laisser la cour de cassation afin de caractériser une infraction politique : D'une part, l'objet doit être politique, ce qui en soit paraît relativement simple car l'acte lui-même laisse transparaître le caractère politique du mobile. [...]
[...] Ainsi entendu, la cour de cassation opère une summa divisio jurisprudentielle. La conception objective de la haute cour différencie les infractions qui sont toujours politiques et celles qui ne le sont jamais comme l'énonce François Chabas, professeur de la faculté de droit d'Orléans. La notion objective écarte les circonstances de l'acte, soit d'une part le mobile de son auteur et d'autre part les caractéristiques de l'objet du délit. Ainsi entendu, la violation d'un arrêté préfectoral par exemple est une infraction de droit commun même si cette infraction a été commise pour manifester une hostilité envers un préfet. [...]
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