Par un arrêt de l'Assemblée plénière du 25 février 2000, la Cour de cassation entend conférer une immunité aux préposés à raison d'une nouvelle lecture de l'article 1384 alinéa 5 du Code civil, mettant ainsi fin aux divergences de jurisprudences.
En l'espèce, les propriétaires de champs agricoles chargent une société spécialisée de procéder à des épandages d'herbicides sur leurs parcelles. En raison des conditions météorologiques, un champ voisin est affecté par ces produits toxiques.
La cour d'appel retient la responsabilité de la société chargée le l'épandage sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5 du Code civil et celle du préposé au visa de l'article 1382 du Code civil. Le préposé se pourvoit en cassation. Les juges du fond considèrent que la responsabilité civile délictuelle du préposé est engagée au motif « qu'il aurait dû, en raison des conditions météorologiques, s'abstenir de procéder ce jour-là à des épandages de produits toxiques ». D'où il s'en suit que le préposé a commis une faute personnelle qui engage sa responsabilité.
[...] D'après un arrêt de la chambre commerciale du 12 octobre 1993, la Cour de cassation semble avoir voulu exclure la responsabilité du préposé en l'absence de faute personnelle. Toutefois, la jurisprudence n'était pas unanime sur la question dans la mesure où la deuxième chambre civile de la Cour de cassation précise dans un arrêt du 19 novembre 1998 que la responsabilité personnelle du préposé n'est pas subordonnée à la démonstration d'une faute détachable de ses fonctions. Pour mettre fin à cette divergence de jurisprudence, la Cour de cassation dans sa formation la plus solennelle tranche la question. [...]
[...] L'Assemblée plénière suppose que l'article 1384 alinéa 5 du Code civil doit être envisagé comme un moyen d'imputer à l'entreprise la charge des risques qu'elle créée par son activité Toutefois, selon Philippe Brun, dans la mesure où la qualité de préposé vaut également pour les salariés qui assument des fonctions de direction, l'immunité dont ils bénéficient peut apparaitre choquante. La divergence de jurisprudences quant à la responsabilité personnelle du préposé justifie l'intervention de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation. La Haute juridiction fait le choix d'exclure la responsabilité du préposé dès lors qu'il agit dans le cadre de ses fonctions en prenant le risque de compromettre l'indemnisation des victimes. Note de l'arrêt de Philippe Brun G. Viney, note précédente, p. [...]
[...] En l'espèce, la victime n'obtient pas la réparation de son préjudice que ce soient sur le fondement de la responsabilité du commettant du fait de son préposé ou sur celui de la faute personnelle du préposé. Cette solution est source d'insécurité juridique pour les victimes. Toutefois, il faut en nuancer la portée en considérant que les faits de l'espèce sont exceptionnels concernant l'insolvabilité du commettant. Ainsi, la responsabilité du commettant reste invocable dans la plupart des cas. De plus, la Cour de cassation vient encadrer cette immunité dès 2001 avec l'arrêt Cousin, en ajoutant le critère de la gravité de la faute. [...]
[...] La responsabilité du commettant ne peut être engagée sur le fondement de l'article 1384 alinéas 5 du Code civil en raison de son insolvabilité. I L'impossible engagement de la responsabilité du commettant du fait de son préposé L'engagement de la responsabilité du commettant du fait de son préposé suppose l'établissement d'un lien de subordination mais n'est pas conditionné par la preuve d'une faute du préposé L'effectivité d'un lien de subordination entre le commettant et son préposé Cette exigence est posée par la jurisprudence. [...]
[...] Cette solution confirme la jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 12 octobre 1993. En l'espèce, la Haute juridiction considère que l'action du préposé n'a pas excédé ses fonctions en procédant à des épandages avec des conditions météorologiques peu propices. Le domaine de l'obligation in solidium du commettant et du préposé devrait désormais être réduit aux seuls cas où ce dernier a outrepassé les limites de sa mission, sans que son acte réponde pour autant à la définition de l'abus de fonctions Toutefois, cette immunité n'est pas absolue. [...]
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