La distinction bien meuble et bien immeuble est souvent délicate, en particulier lorsqu'il s'agit d'une chose attachée à un immeuble et qui en est détachée. La question qui se pose dans un tel cas est alors celle de savoir si des fresques qui ont été arrachées du mur sur lequel elles avaient été peintes sont devenues des meubles du fait de leur arrachement ou si elles ont conservé leur nature d'immeuble par destination. C'est notamment sur cette question qu'a statué l'Assemblée Plénière dans son arrêt du 15 février 1988, arrêt dit des « fresques catalanes ».
En l'espèce, un antiquaire avait acheté bon marché à des paysans les fresques romanes d'une chapelle catalane, les avait détachées du mur et vendues, pour un prix très élevé, à deux musées suisses. Cependant cette acquisition n'était pas parfaite car tous les copropriétaires du hangar n'avaient pas consenti à cette vente.
Ces copropriétaires avaient alors assigné l'acquéreur Suisse des fresques devant un tribunal français, lequel avait soulevé l'incompétence territoriale de la juridiction saisie et avait revendiqué sa bonne foi sur le fondement de l'article 2279 du cc. Ces moyens reposaient sur la nature mobilière des fresques, nature contestée par les revendiquants qui avaient saisi la juridiction du lieu de l'immeuble en soutenant que la chose était demeurée immobilière.
[...] Il y a là un obstacle rédhibitoire quant à la qualification d'immeuble par destination. Tel est le sens de la deuxième condition d'immobilisation par destination se dégageant de l'arrêt qui exige une affectation d'objets mobiliers. Cette condition est élémentaire pour qu'un immeuble par destination demeure en dépit de sa nature juridique fictive un meuble, encore faut-il qu'il l'ait été avant son affectation. Il est vrai que cette condition n'est pas suffisante car elle est remplie par beaucoup d'objets faisant partie d'une construction qui ne sont pas pour autant qualifiés d'immeubles par destination. [...]
[...] I / la difficulté de détermination de la nature de la chose arrachée à l'immeuble auquel elle était attachée A / Les fresques, immeubles par destination du fait de leur arrachement au mur Les immeubles par destination sont des biens qui par leur nature sont meubles mais entrent dans la catégorie des biens immeubles en raison de l'étroite relation qui les lie à un bien immeuble. On trouve dans cette catégorie : Les meubles affectés à l'exploitation d'un fonds, par exemple le matériel agricole, les machines d'une usine, les radiateurs d'une maison Les orgues ont également, en application de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, le statut d'immeubles par destination. [...]
[...] C'est peut-être le moyen de répondre à la délicate question du critère de distinction des immeubles par nature et des immeubles par destination. On a pu douter de l'autonomie de cette deuxième catégorie imaginée par le Code civil à partir de l'extension de la notion d'immeuble à ses accessoires que faisait l'ancien droit ; la chose attachée à perpétuelle demeure pourrait bien n'être qu'un avatar de l'immeuble par nature, la distinction de l'attache et de l'incorporation apparaissant subtile. II / Une détermination facilitée par les faits historiques se rapportant aux fresques A / La remise en cause de la nature d'immeuble des fresques Elle reconnaît cependant qu'il ne pouvait y avoir d'immobilisation par destination puisqu'à l'époque ladite méthode n'existait pas. [...]
[...] Elle n'en est pas moins nécessaire et utile car elle permet d'exclure a priori de cette catégorie, sans qu'il soit besoin de s'interroger sur leur devenir ultérieur, les composants d'un immeuble qui ne préexistent pas à la construction et qui ne sont pas des biens avant que d'être associés à un édifice. Tel est à l'évidence le cas des fresques qui avant leur réalisation n'étaient qu'une virtualité pouvant unir des matériaux épars et le génie d'un créateur. [...]
[...] La cour de Montpellier avait affirmé la nature immobilière des fresques et qualifia les fresques d'immeubles par destination, par le raisonnement selon lequel la technique avait permis aux fresques d'être détachées du mur. En effet les fresques même détachées du mur auquel elles étaient incorporées puisque peintes dessus faisaient partie intégrante de l'immeuble, et sont donc des immeubles par destination. De plus et selon ce raisonnement, les fresques sont immeubles par destination en ce sens que leur arrachement du mur détériore ce dernier. [...]
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