Le phénomène du transsexualisme a suscité ces dernières années un vif débat et particulièrement au sein des juridictions judiciaires françaises dans la mesure où le législateur n'a pas légiféré dans ce domaine. La Cour de cassation, réunie dans sa forme la plus solennelle, en Assemblée plénière, s'est donc comportée comme tel dans l'arrêt du 11 décembre 1992 ; elle a opté en faveur des transsexuels, et ce à la suite d'un revirement de jurisprudence provoqué entre autres la condamnation de la France par la Cour Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En l'espèce, après un traitement particulier, un transsexuel s'est vu attribuer l'apparence physique et les caractères du sexe opposé, en l'occurrence le sexe féminin. Il souhaite donc faire reconnaître cet état de fait dans les registres de l'Etat civil et en particulier dans son acte de naissance. C'est pourquoi il saisit le Tribunal de grande instance. Sa demande étant partiellement rejetée dans la mesure où il n'obtient que le changement de prénom, il interjette appel, mais la Cour d'appel le déboute. En dernier ressort, il se pourvoit en cassation. Conformément à la jurisprudence de l'époque, les juridictions du fond s'opposent en novembre 1990, selon le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes et les motifs avancés, à reconnaître le changement de sexe de l'intéressé. Sous l'influence de l'argumentaire développé en mars 1992 par la CEDH, la Cour de cassation infléchit sa position et au vu des conventions internationales et du droit positif français argue que ce principe suggéré par la Cour d'appel n'est pas incompatible avec la modification du sexe sur l'acte de naissance.
Mais peut-on ainsi disposer librement de l'état de sa personne suite à un quelconque traitement thérapeutique ? Pouvait-il demander un tel changement dans l'Etat civil conformément au droit positif en vigueur ? En somme, le droit peut-il de cette manière s'adapter aux faits ?
[...] Ce principe est remis en cause depuis peu dans la mesure où il est devenu possible de changer son sexe sur les registres d'état civil Cependant, pour bénéficier de cette dérogation au principe, des conditions doivent être respectées A. Un possible changement de sexe Une personne peut, en principe, disposer de tous ses biens : les vendre, les donner, les louer En revanche, il n'est pas possible de disposer de notre état. C'est pourquoi au nom de ce principe la Cour de cassation a pendant de nombreuses années refusé de prendre en compte la demande des transsexuels visant à modifier leur état en changeant la mention du sexe sur leur état civil. [...]
[...] La Cour de cassation, réunie dans sa forme la plus solennelle, en Assemblée plénière, s'est donc comportée comme tel dans l'arrêt du 11 décembre 1992 ; elle a opté en faveur des transsexuels, et ce, à la suite d'un revirement de jurisprudence provoqué entre autres la condamnation de la France par la Cour européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Selon la définition qui fait autorité dans le domaine médical, le transsexualisme est la discordance entre le sexe physique apparent, déterminé génétiquement et hormonalement et le sexe psychologique, le sujet ayant en effet le sentiment profond d'appartenir au sexe opposé. [...]
[...] Mais est- ce pour autant légitime de changer le sexe juridique ? Certains pourront répondre à cela et rétorquer que l'abandon du critère chromosomique au profit d'un critère comportementaliste est scientifiquement discutable. Le progrès a certes permis de faire évoluer la technique, de transformer même physiquement le sexe d'un individu, mais il ne faudrait pas oublier les racines de l'être humain. C'est pourquoi la Cour de cassation a adopté une position partiellement libérale ; le changement de sexe dans l'acte de naissance est fortement limité, il faut que cela soit exceptionnel d'où des conditions à respecter. [...]
[...] Mais, il n'est pas obligatoire pour le pays concerné de reconnaître le transsexuel comme le père de l'enfant au niveau de l'état civil. Enfin, il convient de s'interroger sur le divorce suite à un changement d'état. En effet, initialement le mariage n'est pas entaché de nullité dans la mesure où au moment des faits l'individu avait le sexe déclaré à la naissance. Cependant, il est possible d'obtenir la nullité du mariage pour erreur sur les qualités essentielles à trois conditions : tout d'abord, s'il est prouvé que le transsexualisme remonte à un syndrome de la petite enfance ; ensuite, s'il était inconnu de l'autre au moment du mariage ; enfin si la cohabitation n'a pas duré plus de 6mois après la découverte de l'erreur. [...]
[...] En revanche, les questions relatives au mariage et à la parenté restent dans le fou. Dans ses conclusions, M. le premier avocat général a déclaré que le fondement juridique proposé et qui a été retenu par la Cour aurait l'avantage de ne pas exclure a priori l'exercice des droits matrimoniaux par le transsexuel En effet, le problème qui peut se poser est que si le transsexuel se voit attribuer juridiquement un autre sexe, il doit également pouvoir exercer les droits qui y sont attachés. [...]
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