Les arrêts de cassation rendus par la Première chambre civile de la Cour de cassation les 25 février 1997 et 7 octobre 1998 intéressent la question de l'obligation d'information dans les contrats par la précision de deux de ses aspects essentiels. Notons d'emblée que les arrêts ont tous deux été rendus en matière médicale.
Dans la première affaire (Civ. 1ère, 25 févr. 1997), les faits étaient les suivants : un homme, dont la zone intestinale était affectée par des polypes, a subi une intervention médicale visant à l'ablation de ces derniers par la technique de la coloscopie. Hélas, une complication est apparue puisque, au cours de l'intervention, le médecin a perforé la région affectée. L'arrêt ne le dit pas, mais il est plus que probable que l'action du patient ait eu pour objet d'engager la responsabilité contractuelle du médecin. Dans la seconde affaire, (Civ. 1ère, 7 oct. 1998), les faits étaient semblables, puisqu'une femme, deux années après qu'une chute lui ait causé une fracture d'une vertèbre, a subi, en raison de la persistance de séquelles, une intervention chirurgicale consistant dans la mise en place d'un cadre de Hartschild. Mais, là encore, une complication est apparue, la patiente ayant de ce fait définitivement perdu l'œil gauche en dépit de la prescription par le praticien d'une consultation post-opératoire ophtalmologique en urgence. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la patiente assigna le médecin en responsabilité.
Dans la première affaire, la Cour d'appel débouta le patient au motif pris de ce qu' « il lui appartenait de rapporter la preuve de ce que le praticien ne l'avait pas averti de ce risque (de perforation intestinale), ce qu'il ne faisait pas dès lors qu'il ne produisait aux débats aucun élément accréditant sa thèse ». Dans la deuxième affaire, la Cour d'appel débouta également la patiente de ses demandes au motif pris de ce que « l'information que doit donner le praticien n'est exigée que pour des risques normalement prévisibles, qu'en l'espèce, la complication de trombophlébite du sinus caverneux bien que connue est très rare ; qu'elle en déduit que le chirurgien n'avait pas à en avertir la patiente ». Dans les deux cas, les appelants formèrent un pourvoi en cassation.
Il y avait en réalité deux questions de droit bien distinctes auxquelles la Cour de cassation devait répondre. Premièrement il s'agissait de savoir sur qui pèse la charge de la preuve en présence d'une obligation d'information : la charge de la preuve pèse-t-elle sur le créancier, devant ainsi prouver l'inexécution de l'obligation ? Ou bien la charge de la preuve pèse-t-elle sur le débiteur afin de prouver son exécution ? Deuxièmement il s'agissait de savoir à quelle information peut prétendre le patient ? Peut-il prétendre à une information limitée sur quelques aspects particuliers de l'intervention ? Ou bien peut-il prétendre à une information plus étendue ?
Au terme de son contrôle en droit, la Cour de cassation s'est prononcée par la censure des arrêts déférés. Dans la première affaire, la Cour estimât en effet, au visa de l'article 1315 du Code civil, que « le médecin est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son patient et il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation ». Dans la deuxième affaire, la Cour jugea, au visa, de l'article 1147 du même Code, qu' « hormis les cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, un médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et qu'il n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ».
Dans le cadre de ce commentaire, nous verrons que la Cour de cassation a posé deux nouvelles règles en matière d'obligation d'information. La Cour a en effet, d'une part, précisé l'étendue de l'information dont le médecin est débiteur, d'où procède une règle matérielle et, d'autre part, fixé la charge de la preuve en cas d'allégation d'inexécution de l'obligation, d'où procède une règle probatoire. Aussi bien, (exceptionnellement, c'est à dire en attribuant une partie par arrêt) envisagerons-nous successivement l'étendue (I) et la preuve de l'information (II).
[...] Dans le cas contraire (perte de connaissance de moyenne durée et plus ou perte définitive de connaissance), l'exception est justifiée pour les raisons préalablement évoquées. En l'espèce, ce cas de figure n'avait pas lieu de s'appliquer, le médecin ne pouvait donc prétendre à aucune exemption de ce chef. Enfin, en ce qui concerne le refus du patient d'être informé, l'exception n'appelle en elle-même que peu d'observations dans la mesure où la fonction protectrice de l'obligation d'information a été instituée dans l'intérêt du patient. [...]
[...] En réalité, la question ne se posait pas puisque la Cour de cassation avait déjà posé une règle à cet égard. Par un arrêt rendu le 3 janvier 1991, la Première chambre civile de la Cour de cassation avait en effet estimé que les médecins (exceptés les chirurgiens esthétiques) sont dispensés d'indiquer aux patients les risques exceptionnels qu'ils encouraient La règle était donc clairement établie : le contenu de l'information a pour limite les risques qui ne se réalisent qu'exceptionnellement. [...]
[...] un médecin est tenu de donner à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et il n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces risques ne se réalisent qu'exceptionnellement En réalité, quant à son principe, la règle ainsi posée n'est pas nouvelle puisque l'essentiel de l'attendu découle de l'application combinée de la loi du 27 juillet 1999 (art de la loi codifié à l'art. 16-3 C.civ.) et du décret du 6 septembre 1995 portant Code de déontologie médicale (codifié aux art. [...]
[...] Nul ne doute, il est vrai, que ce dernier résulte d'une balance entre les enjeux financiers de la profession (coût majoré des primes d'assurance en cas d'obligation d'information maximale) et les impératifs humanistes (primauté de la personne physique du patient). Si l'on comprend parfaitement la nécessité d'accorder, en certaines matières, la solution applicable aux données d'ordre économique, il semble tout aussi acquis que, en d'autres matières, notamment fondamentales comme le corps humain, ce raisonnement ne peut qu'intervenir à la marge. [...]
[...] Un effort de vulgarisation est donc une condition sine qua none de la clarté de l'information. Loyale en ce sens que le médecin doit informer son patient avec loyauté, c'est à dire en respectant la relation de confiance qui l'unit intrinsèquement à son patient. Autrement dit, l'information du patient s'effectue dans le seul et unique intérêt du patient, le médecin ne peut, d'une manière ou d'une autre, tirer bon parti de l'information qu'il fournit. Appropriée enfin en ce sens que l'information doit porter sur des éléments intéressants la situation même du patient. [...]
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