La Cour de cassation n'a pas donné une définition de la notion de bouleversement de l'économie du contrat, mais en cassant l'arrêt de la cour d'appel pour avoir retenu une modification du prix en faveur des entrepreneurs, l'on peut en déduire que ce pourcentage n'était pas suffisant à ses yeux. Dans un premier temps, nous nous pencherons sur le principe de protection du maître de l'ouvrage réaffirmé par la Cour de cassation, et dans un second temps, nous envisagerons la jurisprudence comme source d'une protection amoindrie du client
[...] En effet, si elle accepte une révision du prix, c'est parce qu'elle considère que les travaux supplémentaires sont d'une telle ampleur, qu'ils dépassent la simple imprévision. Cette modification s'apparenterait à un bouleversement de l'économie du contrat. Or, pour la Cour de cassation, les faits allégués ne suffisent pas à caractériser un véritable bouleversement puisqu'elle demande aux juges du fond de le prouver; il s'agit donc de modifications minimes qui, conformément à une jurisprudence constante (Cass.3ème civ octobre 1972; Cass.3ème civ mai 1998) et à l'article 1793, ne sont pas de nature à entraîner la modification du caractère forfaitaire du contrat. [...]
[...] La jurisprudence, source d'une protection amoindrie ? Par son arrêt du 24 janvier 1999, la Cour de cassation résume et fixe l'état de la jurisprudence en matière de marché à forfait. En censurant les juges du fond de n'avoir pas caractérisé un bouleversement de l'économie du contrat, la Cour de cassation envisage la troisième hypothèse qui permet un dépassement du forfait. Il convient de définir cette notion „assez souple“, qui permet aux entrepreneurs de contourner la protection instaurée par l'article 1793 et qui semble avoir fait l'objet d'une nouvelle interprétation par ce présent arrêt A. [...]
[...] L'arrêt rendu par la troisième chambre civile le 20 janvier 1999 contribue justement à délimiter le champ d'application de l'article 1793. En l'espèce, Messieurs Christol et Jauvat (entrepreneurs) s'étaient engagés moyennant rémunération forfaitaire à accomplir une construction immobilière au profit de la société Imhotep (maître de l'ouvrage). La cour d'appel avait débouté le maître de l'ouvrage de sa demande de restitution d'honoraires complémentaires, et donc admis la révision, au motif qu'il ne contestait pas l'existence de modifications affectant l'objet même du contrat et que le dépassement de 26,5% du montant des travaux supplémentaires constituait une „modification substantielle de la base de calcul des honoraires“. [...]
[...] Cette seconde condition résulte de l'arrêt du 24 janvier 1990 : „sans constater que les modifications demandées avaient entraîné un bouleversement de l'économie des contrats . qui a été confirmé par l'arrêt du 8 mars 1995. Il faudra donc que l'entrepreneur qui invoque le bouleversement puisse faire la preuve de cette demande par le maître de l'ouvrage. L'arrêt du 20 janvier 1999 reprend bien la première condition qui est celle de la preuve d'un véritable bouleversement de l'économie du contrat, mais passe sous silence l'exigence de la demande par le client. [...]
[...] En effet, la cour d'appel reste vague en invoquant des modifications „affectant l'objet même du contrat“. La notion de bouleversement de l'économie du contrat doit donc être appréciée au cas par cas, ce qui donne lieu à une certaine insécurité juridique. De plus, il semblerait que la protection du client soit laissée à l'arbitraire des juges qui apprécieront si oui ou non une révision du prix pourrait lui être imposée. Or, le Professeur Bénabent a interprété l'arrêt du 24 janvier 1990, relatif aux modifications entraînant un bouleversement de l'économie du contrat, comme exigeant que lesdites modifications soient demandées par le maître de l'ouvrage. [...]
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