La loi des 16 et 24 août 1790 proclame dans l'article 13 de son titre II que « les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives ». Cet article, toujours en vigueur, sert de base à la séparation des ordres judiciaires et administratifs, et fonde ainsi le pouvoir du juge administratif en matière de contrôle de la légalité des actes administratif. Mais ce principe n'est pas absolu, comme le montre cet arrêt du tribunal de Conflit du 17 octobre 2011 Préfet de la Région Bretagne, Préfet d'Ille-et-Vilaine, SCEA du Chéneau c/ INAPORC, M. C et autres c/ CNIEL.
La SCEA du Chéneau et M. C demandent respectivement à l'INAPORC et au CNIEL, tous quatre personnes privées, le remboursement de cotisations interprofessionnelles volontaires rendues obligatoires par un arrêté interministériel, acte administratif réglementaire.
Ces conflits entre personnes privées sont portés devant le tribunal de grande instance (TGI) de Rennes. Au cours des deux litiges distincts, les requérants soulèvent l'irrégularité de l'arrêté interministériel vis-à-vis des dispositions du droit de l'Union européenne, l'arrêté instaurant un régime d'aides d'État mais n'ayant pas été notifié à la commission européenne comme le prévoient les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Le problème posé étant sérieux le TGI de Rennes doit alors se prononcer sur la légalité de l'arrêté.
Le préfet de la Région Bretagne préfet d'Ille-et-Vilaine adresse deux déclinatoires en date du 14 février 2011 au TGI de Rennes pour qu'il se déclare incompétent à statuer sur la légalité de l'arrêté et qu'il pose une question préjudicielle à l'ordre administratif, en l'occurrence le Conseil d'État qui est seul compétent pour se prononcer sur la légalité d'un arrêté interministériel. Mais par un jugement du 18 avril 2011 le TGI de Rennes rejette les déclinatoires de compétences, se déclarant ainsi compétant pour juger de la légalité de l'arrêté par rapport au droit de l'Union. Le 9 mai 2011 le préfet élève les conflits par deux arrêtés de conflit devant le Tribunal des conflits, dans le cadre d'une procédure de conflit positif. Le Tribunal est donc saisi de deux affaires ayant le même objet (...)
[...] Le préfet de la Région Bretagne préfet d'Ille-et-Vilaine adresse deux déclinatoires en date du 14 février 2011 au TGI de Rennes pour qu'il se déclare incompétent à statuer sur la légalité de l'arrêté et qu'il pose une question préjudicielle à l'ordre administratif, en l'occurrence le Conseil d'État qui est seul compétent pour se prononcer sur la légalité d'un arrêté interministériel. Mais par un jugement du 18 avril 2011 le TGI de Rennes rejette les déclinatoires de compétences, se déclarant ainsi compétant pour juger de la légalité de l'arrêté par rapport au droit de l'Union. Le 9 mai 2011 le préfet élève les conflits par deux arrêtés de conflit devant le Tribunal des conflits, dans le cadre d'une procédure de conflit positif. Le Tribunal est donc saisi de deux affaires ayant le même objet. [...]
[...] Le Tribunal des conflits souligne que le respect du droit de l'Union européenne est une obligation tant en vertu des traités que de l'article 88- 1 de la Constitution de 1958. Les traités de l'Union européenne son des traités internationaux régulièrement ratifiés, donc d'après l'article 55 de la Constitution ces traités ont une valeur juridique supérieure à celle de la loi. Mais le Tribunal des conflits précise que l'article 55 ne permet en aucun cas de modifier la répartition de compétence des juridictions. En effet, aucune disposition des traités n'impose aux juridictions civiles de connaître de la validité des actes réglementaires. [...]
[...] Alors, si le principe de bonne administration de la justice et la nécessité de rendre justice dans un délai raisonnable sont des motifs valables pour accepté la possibilité d'atténuer un principe constitutionnel, la référence à une jurisprudence certes établie mais contra legem parait plus discutable. Il semble toutefois que ce soit réellement l'impératif du droit de l'Union européenne qui ait amené à cette décision. Car si le Tribunal des conflits pose ici la possibilité d'une exception au principe, il consacre ensuite l'existence de cette exception vis-à-vis du contrôle de compatibilité entre les actes réglementaires et le droit de l'Union européenne. [...]
[...] Toutefois, le Tribunal des conflits donne un autre fondement constitutionnel au droit de l'Union européenne à travers l'article 88-1. Cet article précise en effet que la République participe à l'Union européenne. Depuis une Décision constitutionnelle de 2004 (2004-496 DC) le Conseil Constitutionnel base la primauté du droit de l'Union européenne sur cet article. C'est également en se basant sur cet article que le Conseil d'État, dans son arrêt de 2007 Arcelor, dégage une obligation constitutionnelle de transposition des directives de l'Union européenne. [...]
[...] Mais lorsque le Tribunal des conflits rend son arrêt Camif en 1991 la Décision est déjà rendu, alors pourquoi ne pas l'utiliser à l'époque ? Ou alors cette jurisprudence établie fait-elle référence aux principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives ? Cette possibilité est déjà plus réaliste. Mais la jurisprudence établie qui tient tant à cœur au Tribunal des conflits est sans nul doute celle établie par l'arrêt de 1996 de la Chambre commerciale de la Cour de cassation France Télécom contre CMS. [...]
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