Le droit est une discipline des personnes. Contrairement aux matières scientifiques et littéraires qui étudient respectivement les sciences et les lettres, le droit, et notamment le droit civil, étudie les rapports entre des particuliers. Ainsi, très tôt, il a fallu intégrer à la matière la dimension humaine, et avec elle, la notion de faute, puisque nul Homme n'est à l'abri d'une erreur. C'est ainsi que la faute causant un préjudice à autrui fût indemnisée, et consacrée par l'article 1382 du Code civil, disposant que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». Puis, ayant été constaté que la faute n'était pas seule source du dommage, on décida d'indemniser certains préjudices subis sans faute, avec la rédaction d'un article 1383, complétant le précédant, et prévoyant que « chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence » (...)
[...] L'obligation de réparation est, en matière contractuelle, d'origine conventionnelle. Ainsi, l'article 1134 du Code civil dispose : Le contrat tient lieu de loi à ceux qui l'ont formé En revanche, en matière délictuelle, elle résulte d'une obligation légale visant à réparer un dommage, la plupart du temps provoqué par une faute. Cette opposition des sources nous conduit à constater qu'il existe une différence de régime entre la responsabilité civile délictuelle et la responsabilité civile contractuelle. Cette opposition s'illustre avec une différence majeure dans la réparation du préjudice. [...]
[...] La faute éventuellement commise, ici considérée comme étant le défaut de conception du tracé de golf (3e attendu de l'arrêt), doit être reliée au dommage qu'elle a provoqué - ici, une projection incessante de balles de golf sur la propriété de la victime. Mais en plus du lien de causalité qui doit exister entre la faute et le dommage, ce dernier doit également répondre à certaines exigences. De façon rationnelle, le dommage doit être certain, tout comme il doit être personnel et direct, en atteignant la victime elle-même. Ce principe fût d'ailleurs consacré par la jurisprudence de la chambre civile de la Cour de cassation du 24 novembre 1942. [...]
[...] Ce sont ces distinctions qui caractérisent l'arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, du 10 juin 2004, qu'il est proposé d'étudier. En l'espèce, la propriétaire d'une villa au sein d'un lotissement situé en bordure d'un golf, se plaignant de dégâts causés par la projection incessante de balles de golf sur sa propriété, a fait assigner la société exploitante de ce golf pour obtenir la modification de son parcours ainsi que des indemnités. La cour d'appel de Montpellier a condamné la société exploitante du golf à réparer l'entier préjudice subi par la propriétaire de la villa du fait des troubles anormaux du voisinage que lui occasionne l'activité de golf, dans un arrêt en date du 5 novembre 2002. [...]
[...] Cette garantie justifierait ainsi à elle seule la réparation d'un préjudice qui, non défini ici, semble avoir une nature important peu pour l'indemnisation. Mais depuis ces dernières années, la jurisprudence va encore plus loin, avec une tendance à l'affaiblissement de l'exigence du préjudice. Un préjudice moindre ou moins caractérisé suffirait donc désormais pour exercer une action en responsabilité et ainsi obtenir réparation. En effet, comme le dit Denis Mazeaud, on passerait donc du préjudice certain au simple risque de dommage qui se trouve être de fait une simple éventualité. [...]
[...] Dès 1898, des auteurs tels que Josserand ou Saleilles considèrent qu'une personne est responsable d'un dommage causé, sans qu'il y ait nécessairement faute, lorsqu'elle tire de l'activité génératrice du dommage un bénéfice. Tel est le cas de la société de loisirs demanderesse dans l'arrêt du 10 juin 2004. Pour d'autres auteurs du milieu du XXe siècle, comme Starck, le préjudice est une atteinte à un droit essentiel qui prime sur tout autre : la garantie de ne pas subir de préjudice. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture