La question de l'identification des personnes par leur nom de famille ou par les autres dénominations dont elles peuvent faire usage peut être source de difficultés dans la rédaction des actes de procédure émanant des administrations publiques.
Le principe de l'immutabilité du nom de famille résultant de la loi du 6 fructidor an II se trouve notamment malmené par le droit coutumier de l'épouse à l'usage du nom de son conjoint.
L'arrêt rendu par la Chambre Commerciale de la Cour de cassation en date du 17 mars 2004 illustre cette problématique dans le cadre d'un litige à l'origine duquel l'administration fiscale a procédé à des redressements en matière de droits de succession.
L'administration reprochait des insuffisances dans la déclaration de succession souscrite par la veuve du défunt et avait désignée cette dernière sous son nom marital dans les notifications de redressements et l'avis de mise en recouvrement.
La veuve saisit dans un premier temps le Tribunal de Grande Instance pour obtenir l'annulation de la procédure de redressement et de la décision de rejet du Directeur des Services Fiscaux, mais fut déboutée de sa demande.
Elle interjeta appel en invoquant l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II, lequel fait obligation aux fonctionnaires publics de désigner, dans les actes, les citoyens sous leurs noms et prénoms portés dans l'acte de naissance.
La Cour d'appel de Reims dans son arrêt du 3 juin 2002, confirmait le jugement de première instance, mais sans répondre au moyen soulevé par l'appelante, ce qui laissait entière la question de la validité de la désignation par le nom marital.
La veuve forma alors un pourvoi, soutenant que la Cour d'Appel avait méconnu l'article 4 précité, ainsi que l'obligation de motivation édictée par l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Cour de Cassation rejeta ce pourvoi sur le motif unique que la règle invoquée par la requérante n'est pas prescrite à peine de nullité.
Cette décision opérant une clarification louable du droit positif (I) s'avère conforme au principe, malgré une portée incertaine (II).
[...] La décision antérieure rendue par la troisième chambre civile pourrait conduire à répondre par la négative. Enfin, au-delà de la question pratique de l'identification des personnes, la mention du nom marque le degré de formalisme exigé de la puissance publique dans le cadre des procédures qu'elle met en œuvre. Il faut le rappeler en effet que La forme est sœur jumelle de la liberté (JHIERING). Or, la décision rendue s'avère à cet égard bien décevante, dans une matière fiscale où l'administration dispose des pouvoirs les plus étendus. [...]
[...] La chambre commerciale répond aux deux branches du moyen en considérant qu'en l'absence de nullité prévue par l'article la Cour d'Appel ne pouvait prononcer l'irrégularité de la procédure d'imposition et n'était pas tenue de répondre aux conclusions de l'appelante sur ce point. Cette solution s'inscrivant dans un contexte jurisprudentiel marqué par une divergence d'appréciation avec la première chambre civile de la Cour de Cassation opère une clarification louable du droit positif. B Un contexte jurisprudentiel contrasté Certes, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation avait déjà eu l'occasion, dans un arrêt du 24 janvier 2001 (Bull. de se prononcer dans le sens de l'inopposabilité du nom d'usage mentionné dans une assignation délivrée par huissier. [...]
[...] L'arrêt rendu par la Chambre Commerciale de la Cour de cassation en date du 17 mars 2004 illustre cette problématique dans le cadre d'un litige à l'origine duquel l'administration fiscale a procédé à des redressements en matière de droits de succession. L'administration reprochait des insuffisances dans la déclaration de succession souscrite par la veuve du défunt et avait désignée cette dernière sous son nom marital dans les notifications de redressements et l'avis de mise en recouvrement. La veuve saisit dans un premier temps le Tribunal de Grande Instance pour obtenir l'annulation de la procédure de redressement et de la décision de rejet du Directeur des Services Fiscaux, mais fut déboutée de sa demande. [...]
[...] Force est de constater cependant que la position de la chambre commerciale, réaffirmée par la suite (Cass. Com mai 2004 et 27 avril 2005) fait désormais référence pour l'administration fiscale, comme en témoigne l'instruction fiscale 13 L-4-04 (BOI n°106 du 29 juin 2004). Cette solution conforme au principe pas de nullité sans texte ne peut néanmoins être analysée comme revêtant une portée générale et absolue. II UNE SOLUTION CONFORME AU PRINCIPE MAIS DE PORTEE INCERTAINE La décision rendue par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation doit être approuvée en ce qu'elle s'avère conforme au principe général du droit civil pas de nullité sans texte mais reste incertaine dans sa portée A Une application du principe pas de nullité sans texte La solution rendue par la chambre commerciale procède de l'application d'un principe général du droit civil, en vertu duquel une procédure ne peut être annulée que si la loi prévoit cette sanction. [...]
[...] Cette décision opérant une clarification louable du droit positif s'avère conforme au principe, malgré une portée incertaine (II). I UNE CLARIFICATION LOUABLE DU DROIT POSITIF La confrontation de l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II et du droit coutumier de l'épouse à l'usage du nom de son conjoint s'inscrit dans un contexte jurisprudentiel contrasté A La confrontation de la loi du 6 fructidor an II et du droit coutumier de l'épouse à l'usage du nom de son conjoint L'interdiction faite aux agents publics de désigner les citoyens autrement que par le nom porté dans l'acte de naissance résulte d'une conception ancienne faisant du nom de famille l'unique moyen d'identification des personnes. [...]
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