Arrêt Clément-Bayard, chambre des requêtes, Cour de cassation, arrêt du 3 août 1915, abus de Droit
En son article 4, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 définit la liberté en ces termes : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits […] de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi. » A la lecture de cette définition qui a imprégné le droit français depuis, il semble que l'exercice des droits subjectifs, de leur liberté par les sujets de droit soient cantonnés au cadre tel que défini par les lois. Les droits subjectifs, ces prérogatives individuelles que le droit objectif accorde aux individus, seraient donc susceptibles "d'abus" et il serait dévolu au juge le pouvoir et le devoir de contrôler leur exercice.
[...] C'est donc l'utilisation salvatrice de la responsabilité civile qui permet de motiver la décision des juges et donc de rendre effective en pratique la théorie de l'abus du droit de propriété. L'application de l'abus de droit, que fait cet arrêt fut remarqué dès son époque et elle est par la suite restée célèbre. Pour la première fois, le principe de l'abus de droit de propriété était consacré. II- La Portée de la consécration de l'abus de droit La portée de cette consécration de la notion d'abus de droit faite par cet arrêt de 1915 a été considérable. [...]
[...] Cette théorie, c'est celle de l'abus de droit et qui a été consacrée par la chambre des requêtes de la Cour de cassation en 1915 à l'occasion d'un litige questionnant justement les limites de l'exercice du droit propriété. En l'espèce, un litige est né entre deux voisins aux terrains immédiatement mitoyens. Monsieur Coquerel avait installé des carcasses en bois coiffés de pointes de fer dont la seule destination était de percer les ballons dirigeables que Monsieur Clément-Bayard faisait voler et entreposer sur son terrain. [...]
[...] L'homme a élevé ces carcasses dans le but difficilement avouable d'augmenter l'intérêt de Monsieur Clément-Bayard à se rendre acquéreur de la pièce de terre Il voulait ainsi en faire augmenter la valeur foncière aux yeux de son voisin. Mais cette utilité jugée ni légitime ou sérieuse aux juges, même malicieuse n'a pas été retenue et même a été considéré comme inexistante, comme nulle. Ce choix opéré par les juges de la Cour d'appel rappelle le critère que Louis Josserand avait retenu pour définir l'abus de droit : celui de l'utilisation anormale d'un bien. [...]
[...] Le Fondement de la sanction de l'abus de droit Une fois qu'a été établie la réalité de l'abus de droit par les juges de la Cour d'appel, ceux-ci ont motivé leur sanction grâce à l'article 1382 du Code civil, celui-là même définissant la responsabilité civile Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer En effet, la notion même d'abus de droit comporte une parenté certaine avec le principe de responsabilité civile. L'abus de droit n'est qu'une faute commise dans un cadre particulier, ce n'est qu'une faute d'une nature particulière. Dès lors que l'abus est avéré selon les deux critères fixés par l'arrêt du 3 août 1915, alors la responsabilité du détenteur du droit est engagée. L'article 1382 ne vient que fournir les éléments indispensables de solution à la réparation du dommage. [...]
[...] À la lecture de cette définition qui a imprégné le droit français depuis, il semble que l'exercice des droits subjectifs, de leur liberté par les sujets de droit soient cantonnés au cadre tel que défini par les lois. Les droits subjectifs, ces prérogatives individuelles que le droit objectif accorde aux individus, seraient donc susceptibles d'abus et il serait dévolu au juge le pouvoir et le devoir de contrôler leur exercice. Or, s'il est un droit qui semble avoir un caractère absolu, c'est bien le droit de propriété. Son détenteur ne semble pas borné dans l'utilisation de son bien, dans la jouissance de sa chose tant que celles-ci restent dans le strict cadre prévu par la loi. [...]
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