L'arrêt de rejet rendu le 28 juin 2005 par la chambre commerciale de la Cour de cassation contribue à préciser les conséquences d'un manquement à une obligation précontractuelle d'information dans la mesure où ce dernier ne sera de nature à entraîner la nullité du contrat que sous certaines conditions.
M.X, salarié d'une société dans laquelle il exerce une fonction de direction, se voit offrir des bons de souscription lui permettant d'acquérir des actions de ladite entreprise. A cette fin, M. et Mme X contractent un emprunt puis M.X conclut seul une convention intitulée « Contrat d'options sur actions cotées ». Aux termes de cette convention, M.X s'engage à lever les options d'achat d'actions en janvier 2000 et la banque, quant à elle, lui fournit la couverture suivante : en cas de chute trop importante des cours à cette date, elle lui assure une rentabilité minimum et en contrepartie, M.X consent à la banque tous les bénéfices au-delà d'un certain plafond de plus-values. Or lors du dénouement de l'opération, le cours de l'action a particulièrement augmenté, entraînant par la même un important manque à gagner pour le salarié.
Les consorts X désirent alors obtenir l'annulation des contrats conclus avec la banque sur le fondement de la réticence dolosive.
[...] L'affirmation d'une distinction entre la simple violation d'une obligation d'information et la réticence dolosive La solution du 28 juin 2005 s'inscrit en opposition avec une jurisprudence antérieure qui avait pu présumer la réticence dolosive, et donc le vice du consentement pour annuler le contrat, de la seule inobservation de l'obligation d'information En effet, cet arrêt impose, de manière expresse, deux conditions nécessaires pour qu'un manquement à une telle obligation, même si établi, soit constitutif d'un dol Le refus d'une analogie entre réticence dolosive et manquement à une obligation d'information Selon l'article 1116 du code civil, la constitution d'un dol, fondement invoqué en l'espèce par l'une des parties, doit réunir un élément matériel et intentionnel, ce dernier résidant dans la volonté de tromper le cocontractant. Se pose alors la difficulté de la réticence dolosive qui est le silence d'une partie sur un élément d'information relatif au contrat qui, s'il avait été connu, aurait dissuadé l'autre de contracter. En effet, le dol peut-il se présumer du silence gardé par l'une des parties ? [...]
[...] Le litige est porté devant une juridiction de premier degré qui rend un jugement mécontentant l'une des parties. Appel est interjeté et la Cour d'Appel de Paris rend un arrêt le 2 mai 2003 par lequel elle déboute les consorts X de leur demande principale. Les consorts X forment alors un pourvoi en cassation en invoquant divers manquements de la part de ladite banque à l'obligation précontractuelle d'information. En effet, les consorts X reprochent à la Cour d'Appel de ne pas avoir annulé les contrats conclus pour réticence dolosive alors que, quelles que soient les relations contractuelles entre un client et sa banque, celle-ci a le devoir de l'informer des risques encourus dans les opérations spéculatives en prenant en compte la connaissance du client, s'appréciant en fonction de l'expérience dans le domaine concerné et de la complexité du produit, et qu'en conséquence, un défaut d'information peut être imputé à la banque. [...]
[...] Par un arrêt du 28 juin 2005, la chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par les consorts X au motif que le manquement à une obligation précontractuelle d'information, à le supposer établi, ne peut suffire à caractériser le dol par réticence, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci et qu'alors le moyen, qui se borne en ses trois branches à invoquer des manquements de la banque à son obligation précontractuelle d'information, sans alléguer que ces manquements auraient été commis sciemment dans l'intention de provoquer dans l'esprit du client une erreur déterminante de son consentement ne peut être accueilli La Cour de cassation confirme par conséquent la décision des juges du fond en ce qu'elle n'annule pas les contrats conclus entre le client M.X et la banque. La Haute Juridiction pose par ailleurs dans cette décision un principe sans appel. [...]
[...] Les termes employés démontrent bien la volonté de la Cour de cassation de redonner au critère de l'intention ses lettres de noblesse, eu égard à la jurisprudence antérieure évoquée. La solution de cet arrêt permet ainsi de distinguer la violation d'une obligation et la réticence dolosive qui, si elles peuvent être complémentaires, ne sont pas synonymes ; la violation doit être accompagnée des deux critères constitutifs du dol, usuellement reconnus par la jurisprudence. Ainsi le manquement doit avoir été commis dans l'intention de tromper et d'abuser son contractant ; l'erreur ayant ainsi été provoquée, le consentement est vicié et le contrat peut, par la même, être annulé mais ce pour une erreur déterminante, ce qui signifie que les manœuvres, en l'espèce le manquement à l'obligation d'information, doivent avoir exercer une influence véritablement déterminante sur le consentement contractuel ce qui serait le cas si une fois l'information délivré, la victime de ce silence n'aurait pas conclu le contrat. [...]
[...] 1ère 19 mai 1958), devait, selon une jurisprudence constante, avoir été commise dans l'intention de tromper. La nullité pour réticence dolosive supposait alors un élément intentionnel. Si la réticence est désormais la forme la plus retenue du dol dans le contentieux contractuel, cela a pu amener la jurisprudence à admettre un dol par réticence dès lors qu'un des cocontractants avait manqué à son obligation précontractuelle d'information. Cette dernière est relative au devoir fait à la partie qui dispose de renseignements utiles quant à l'objet du contrat de les délivrer à son cocontractant. [...]
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