L'arrêt Jäggi contre Suisse n'est pas sans rappeler la médiatique affaire de l'exhumation du corps d'Yves Montand. Cette dernière avait fait grand bruit à l'époque. Elle avait aussi entraîné une loi du législateur français, empêchant l'exhumation d'un corps à des fins de recherche de filiation ? sauf accord exprimé du vivant- (article 16-11 al. 2 du Code civil). Un problème similaire s'est posé devant les juridictions helvétiques.
[...] Le refus, du père prétendu, qui continue à produire des effets au delà de la mort semble recevable comme argument. Toutefois, il empêche de connaître la vérité et pour le requérant, cette situation n'est pas concevable. Ce refus de se soumettre à des expertises se heurte à la volonté du requérant de connaître ses origines. Mais est-ce contraire à la dignité du défunt d'effectuer un prélèvement scientifique ? Lors d'une mort suspecte, une autopsie est pourtant pratiquée sans qu'aucun accord de la famille ne soit déterminant. [...]
[...] Le problème sous-jacent qui se pose à la CEDH est complexe, puisqu'il oppose le droit au respect à la vie privée du requérant et le droit au respect du défunt. Le droit de connaître son ascendance peut-il être privilégié au détriment des droits du défunt découlant de sa dignité humaine ? Clairement la CEDH s'est posée la question de savoir si un individu peut demander à faire pratiquer un test ADN sur un défunt afin de connaître son ascendance. Dans cette question épineuse, la CEDH a tranché en faveur du requérant, c'est à dire en faveur de M. [...]
[...] D'ailleurs l'article 16-11 ne conçoit que la possibilité d'accord du défunt avant sa mort. Mais quid de l'accord de la famille après son décès ? Ceci nous amène dans notre arrêt, à un premier problème qui est de savoir si le décès d'une personne entraîne la fin du droit au respect de sa vie privée. Une personne acquiert le droit au respect de sa vie privée lors de sa naissance, il serait donc logique que ce droit s'éteigne avec son décès. [...]
[...] Le problème était donc celui de la vie privée du requérant et de son identité personnelle qui s'en trouvaient affectées. Dans l'affaire Jäggi, la Cour a relevé que l'intérêt du requérant était d'ordre biologique et non successoral. Que se serait-il passé si le requérant avait invoqué, non pas un problème d'identité personnelle, mais un problème de succession ? Pour continuer un parallèle avec l'affaire Montand, ce qui avait choqué à l'époque, c'était précisément l'exhumation d'une personne d'une célébrité en l'espèce pour une histoire d'argent. [...]
[...] Un problème similaire s'est posé devant les juridictions helvétiques. En effet, M. Andreas Jäggi, né en 1939, en Suisse, souhaitait établir la filiation avec son père présumé, qui est décédé en 1976. Sa mère attribua sa filiation, à cet individu, qui contesta être le père d'Andreas, lors de l'inscription au registre des naissances. Le Tribunal de première instance de Genève rejeta l'action en déclaration de paternité intenté par Andreas. Ce jugement devint définitif en 1948. Par la suite, le père biologique présumé a toujours refusé de se soustraire à des analyses médicales. [...]
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