« Une erreur n'est souvent qu'une vérité coupé en herbe » (Louis Farigoule membre de l'Académie française en 1946).
Ainsi dans cette affaire, une adjudicataire a conclu un contrat de vente avec un commissaire priseur. Le contrat de vente portait sur un tableau indiqué dans le catalogue de la vente sous l'indication « Daniel Spoerri, Mon Petit Déjeuner, 1972, tableau piège ». Mais, par la suite, l'acquéreur a appris que le tableau avait été exécuté en brevet par un enfant et non par la main de D. Spoerri. En conséquence, l'acquéreur souhaite annuler la vente.
Dans un arrêt du 8/10/2003, la cour d'appel de Paris considère d'une part que l'exécution personnelle n'est pas nécessaire et insuffisante pour reconnaître la qualité d'auteur d'une œuvre. D'autre part, la cour d'appel observe que l'authenticité de l'œuvre est satisfaisante. Or l'authenticité était l'unique condition déterminante du consentement de l'acquéreur. En conséquence la cour d'appel déclare que le contrat de vente du tableau ne peut être annulé.
Par conséquent, on peut se demander si l'erreur sur l'authenticité de l'auteur effectif d'une œuvre d'art est de nature a vicié le consentement ?
A cette question la première chambre civile de la cour de cassation, dans un arrêt de censure du 15/11/2005, a répondu par la positive. D'une part, la cour de cassation a constaté que l'œuvre avait été exécuté en brevet. D'autre part, elle a déclaré que la simple référence d'un texte de l'artiste au dos du tableau n'était pas de nature à informer l'acquéreur que l'œuvre n'avait pas exécuté de la main même de cet artiste. En effet les mentions figurant dans le catalogue de la vente étaient de nature à entrainer une garantie de l'auteur pour l'acquéreur selon l'article 3 du décret du 3/03/1981. En conséquence, la cour de cassation estime que la croyance de l'acquéreur était erronée mais excusable. La cour de cassation considère donc que la cour d'appel n'a pas tiré les bonnes conclusions au regard de ces constatations et des articles 1110 du code civil et 3 du décret du 3/03/1981.
Ainsi le fait que des mentions garantissent l'auteur effectif d'une œuvre d'art est considéré par la cour de cassation comme une preuve de l'authenticité de l'œuvre. Or l'authenticité est considérée, aux yeux de l'opinion commune, comme une des qualités nécessaires d'une œuvre d'art. En conséquence si une erreur est commise sur l'authenticité de l'œuvre alors le consentement de cocontractant, qui a commis l'erreur, est altéré et le contrat doit alors être annulé.
Par conséquent nous verrons, d'une part, que l'authenticité était une qualité substantielle avérée lors de la conclusion du contrat (I). D'autre part, nous verrons que le consentement de l'une des parties a été vicié par l'existence d'une erreur (II).
[...] La personne se représente inexactement la réalité et considère comme vrai ce qui est faux et inversement. Ainsi l'erreur est l'idée fausse que ce fait l'un des cocontractants sur tel ou tel élément du contrat lors de sa conclusion. Cependant il faut remarquer que toutes les erreurs n'acquièrent pas automatiquement un statut juridique. D'une part, ce n'est pas parce qu'il y a une erreur de la part de l'un des cocontractants, qu'il y aura une annulation du contrat. En effet si à chaque fois qu'un cocontractant commet une erreur, on annule le contrat, alors on se retrouve confronté à un problème d'insécurité juridique pour le cocontractant qui n'a pas commis d'erreur et qui se retrouve lésé. [...]
[...] On entend par auteur effectif la personne qui réalise ou exécute personnellement l'œuvre. Il en va de même quand le nom de l'artiste est immédiatement suivi de la désignation ou du titre de l'œuvre. Or il faut noter qu'en l'espèce, d'après les constatations de la cour d'appel, l'œuvre était désignée par la formule Daniel Spoerri, Mon Petit Déjeuner tableau piège La cour de cassation a donc remarqué donc deux choses. D'une part le nom de l'auteur est immédiatement suivi du titre de l'œuvre. [...]
[...] Dans cette affaire, la cour de cassation a un raisonnement en deux temps. D'une part, la cour de cassation constate que le tableau acquis par l'acquéreur n'a pas été réalisé ou exécuté de la main de Daniel Spoerri mais de la main d'un enfant de onze ans à qui Daniel Spoerri avait délivré un brevet de garantie destiné à être collé au dos du tableau. L'auteur effectif de ce tableau est donc un enfant de onze ans alors que l'acquéreur, au moment de la conclusion du contrat était persuadé que le tableau avait pour auteur effectif Daniel Spoerri. [...]
[...] Conséquence de cette erreur : un consentement vicié La cour de cassation considère que la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ces constations au regard des articles 1110 du code civil et 3 du décret du 3/03/1981. En effet l'article 1110 du code civil est un article restrictif. Par conséquent le législateur entend souligner qu'il ne prend pas en considération toutes les bévues, toutes les méprises, toutes les naïvetés. Le législateur ne prend donc en considération que deux types d'erreurs : l'erreur sur la substance et l'erreur sur la personne, quand le contrat est conclu intuitu personae. [...]
[...] Cependant on peut conclure en émettant une critique sur le changement de position de la cour de cassation. En effet, traditionnellement, la cour de cassation, en matière d'erreur, rend des arrêts de rejet car dans ce type de cas tout n'est qu'une affaire d'espèce. En effet la preuve qu'une erreur a été commise et l'appréciation du caractère substantiel ou non de la qualité sur laquelle elle a porté sont des questions de fait, du ressort du pouvoir souverain des juges du fond. Or la cour de cassation est le juge du droit. [...]
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