Les relations obligationnelles se sont développées avec l'émergence des sociétés de consommation. Notamment, pour réaliser leurs rêves, les individus ont souvent recours à l'emprunt auprès d'un établissement de crédit. Les engagements n'étant pas perpétuels, pour se libérer d'une obligation il suffit d'effectuer le paiement de la prestation prévue. Mais face à un litige, le justiciable pourrait être amené à prouver qu'il l'a effectivement réalisé. Se pose alors la question de son mode de preuve et donc de sa nature juridique. La Première Chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 6 juillet 2004, dut alors se prononcer sur cette interrogation.
En l'espèce, une banque consent un prêt. Une renégociation du taux, à la baisse, intervient. La banque signifie aux emprunteurs un commandement aux fins de saisie immobilière car elle n'aurait pas reçu la partie du remboursement dû. Les emprunteurs prétendent ne rien devoir pour l'instant au regard de l'échéancier conventionnel de remboursement. De plus, ils invoquent un vice de forme lors de la renégociation du prêt, qui empêcherait alors la banque de recevoir les intérêts de la période postérieure à la date de la renégociation.
Les juges de première instance et la Cour d'appel accueillent la demande des emprunteurs et prononcent alors la déchéance du droit de la banque aux intérêts postérieurs à la date de la renégociation. La banque forme alors un pourvoi en cassation. Selon elle, les preuves apportées constituaient un commencement de preuve par écrit, ratifié implicitement par les époux emprunteurs, donc la Cour d'appel a commis une erreur en lui reprochant qu'elle n'apportait pas de commencement de preuve par écrit. De plus, les renégociations ont conduit à une diminution du taux d'intérêt. Ceci étant favorable aux débiteurs, la renégociation est réputée régulière (article 115 II de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière). La banque devrait donc continuer à percevoir les intérêts postérieurs à la modification contractuelle.
Le juge a dû alors se demander de quelle manière se prouve l'existence du paiement d'une somme d'argent. Une autre interrogation se posait à lui pour résoudre ce litige, celle de savoir si le caractère favorable de la renégociation d'un prêt présumant sa régularité, s'appréciait au regard de tous les éléments sur lesquels elle a porté (...)
[...] Selon elle, les preuves apportées constituaient un commencement de preuve par écrit, ratifié implicitement par les époux emprunteurs, donc la Cour d'appel a commis une erreur en lui reprochant qu'elle n'apportait pas de commencement de preuve par écrit. De plus, les renégociations ont conduit à une diminution du taux d'intérêt. Ceci étant favorable aux débiteurs, la renégociation est réputée régulière (article 115 II de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière). La banque devrait donc continuer à percevoir les intérêts postérieurs à la modification contractuelle. Le juge dut alors se demander de quelle manière se prouve l'existence du paiement d'une somme d'argent. [...]
[...] C'était donc à elle de prouver qu'elle n'avait pas acquit cette somme d'argent. Les juges auraient alors estimé que le paiement de l'obligation d'une somme d'argent était un fait. Cependant, ceci n'est que supputation et il est vrai que la lettre de l'arrêt évoque le paiement comme fait juridique sans distinction de la nature de l'obligation qu'il éteint. On pourrait aussi dire que la Cour parle de paiement, comme synonyme de versement. Donc le versement est un fait qui se prouve alors par tout moyen. [...]
[...] Ainsi, dans l'affaire en question, l'élément litigieux étant le montant de la somme remise à la banque, ce serait effectivement un fait juridique que l'on peut prouver par tout moyen. La doctrine influençant indirectement les décisions juridictionnelles, on remarque que la jurisprudence ne reprend pas toujours le raisonnement de l'arrêt étudié. Ainsi, la même chambre, la première chambre civile dans un arrêt du 19 mars 2002 exige une preuve du droit commun c'est-à-dire un écrit (article 1341 du code civil) pour le paiement d'une somme d'argent. On était en présence d'une obligation de même nature, or les juges semblent qualifier ce paiement d'acte. [...]
[...] Cependant, cette sanction est inopportune car l'anéantissement rétroactif du contrat de prêt que la nullité engendrerait, implique que l'emprunteur rembourse intégralement le crédit consenti sans pouvoir bénéficier de l'échéancier conventionnel. Ainsi la nullité inhibe les caractéristiques mêmes de l'emprunt. Pour cette raison, une sanction spécifique a été créer, spécifique à la nature du contrat qu'elle affecte. Il s'agit de la déchéance du droit aux intérêts conventionnellement prévus imposée à la banque ne respectant pas les exigences de formalité. Ainsi, le consommateur peut maintenir l'exécution du contrat tout en sanctionnant le prêteur. [...]
[...] Ainsi, selon la Cour de cassation, la renégociation ne présente pas un caractère plus favorable pour les emprunteurs. La conséquence directe de cette extension d'appréciation est celle de l'usage amoindri de la présomption et donc de la limitation de l'étendue des validations législatives des renégociations. Cette décision est certes critiquable du fait de la modification de loi, mais elle a le mérite de moraliser les relations contractuelles bancaires. Les établissements bancaires auraient ainsi moins tendance à dissimuler des clauses faisant peser des obligations supplémentaires aux emprunteurs car le juge pourra toutes les apprécier et éventuellement écarter le jeu de la présomption. [...]
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