Le droit de la copropriété, tel qu'issu de la loi du 10 juillet 1965, distingue traditionnellement entre parties privatives et parties communes. Selon l'article 1 de cette loi, chaque copropriétaire dispose d'un ou plusieurs lots de copropriété. Un lot se définit comme un ensemble comportant une partie privative et une quote-part de parties communes, et représente plus généralement, une fraction de l'immeuble par nature auquel il s'applique. La distinction fondamentale entre partie privative et partie commune conduit par conséquent à considérer que chaque copropriétaire, s'il est le seul propriétaire de ses parties privatives, n'est en revanche que propriétaire individis, c'est-à-dire non exclusif, des parties communes. Or, le sol sur lequel l'immeuble est bâti doit être considéré comme une partie commune.
C'est en partant de cette analyse que la Cour d'appel a décidé de rejeter la fin de non recevoir des copropriétaires, dont elle estimait qu'ils n'avaient pu usucaper de manière abrégée les parcelles constituant des parties communes. En effet, dans la mesure où chaque propriétaire n'est propriétaire que d'une partie des parcelles communes, il n'en est pas propriétaire exclusif. Il ne dispose par conséquent d'aucun titre justifiant le transfert de la pleine propriété exclusive des parcelles en cause. Dans la mesure où l'usucapion abrégée s'appuie sur l'existence d'un juste titre, elle ne serait donc pas concevable, alors même qu'une telle usucapion serait tout à fait envisageable pour un copropriétaire sur des parties privatives (...)
[...] L'indivisibilité des parties privatives et des parties communes Chaque copropriétaire dispose, lors de l'acquisition de son lot de copropriété, d'une partie privative et d'une quote-part des parties communes. Cette indivisibilité des parties privatives et des parties communes, qui constitue l'originalité de la situation de copropriété, explique pourquoi l'usucapion est concevable à l'égard des parties communes, contrairement à ce qu'affirme la Cour d'appel. L'usucapion constitue un mécanisme d'acquisition de la propriété par la prescription, c'est à dire l'écoulement d'un certain délai. [...]
[...] La fameuse expression trouve traditionnellement un terrain d'élection dans le domaine de la propriété privée, où le voisin est le plus fréquent perturbateur d'une jouissance paisible de la chose dont est propriétaire. L'arrêt commenté ne fait pas exception à la règle, en multipliant cependant la difficulté. En effet, les copropriétaires d'un groupe d'immeubles opposaient l'usucapion abrégée sur plusieurs parcelles des parties communes, revendiquées par des tiers s'en prétendant légitime propriétaire. La fin de non-recevoir est rejetée en appel, au motif que l'usucapion abrégée ne saurait être imposée par les copropriétaires qui ne justifiaient pas en l'espèce d'un juste titre. [...]
[...] L'identification du juste titre pertinent n'est pas simple en matière de copropriété, en raison d'un paradoxe. Si on prend en considération le titre d'acquisition comme titre de propriété, et ce titre seul, il existe un risque qu'une erreur dans le titre de propriété, dans la délimitation des lots, ne conduise à permettre à l'un des copropriétaires d'invoquer l'usucapion contre un autre, simplement en invoquant l'erreur reproduite dans son acte de propriété. C'est pourquoi on prend en considération, lorsque deux copropriétaires s'opposent, non l'acte de propriété, qui n'est pas un document pertinent, mais l'état descriptif de division, contenu dans le règlement de copropriété (CA Paris avril 1996). [...]
[...] Ces derniers forment un pourvoi en cassation, qui donne lieu au présent arrêt. Il incombait aux juges de cassation de déterminer si le titre de propriété des copropriétaires constitue un juste titre au sens de l'article 2265 du Code civil. Ils décident en l'espèce que tel est bien le cas, cassant par conséquent l'arrêt rendu par les juges du fond. Pour fonder leur décision, ils rappellent tout d'abord implicitement qu'une usucapion est possible en présence d'une copropriété avant de préciser quel est le juste titre pertinent pour apprécier l'accomplissement d'une telle usucapion (II). [...]
[...] Il s'agit d'un document interne à la copropriété, qu'il serait trop aisé à un copropriétaire d'invoquer contre un tiers pour obtenir des droits sur sa parcelle, en prétextant que cet état lui aurait transféré la propriété de la parcelle prétendument usucapée. L'état descriptif est en réalité inopposable aux tiers. C'est pourquoi il faut, dans les relations avec les tiers, revenir à l'acte de propriété, comme le fait la Cour de cassation. C'est à partir de cet acte que chaque copropriétaire, invoquant l'usucapion, peut prétendre qu'un tel acte, translatif de propriété, lui a transféré la propriété de la parcelle convoitée. Cette solution, tout à fait cohérente, implique un champ d'application relativement limité cependant. B. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture