Le pacte de préférence, en tant que contrat, permet, en cas de violation, d'engager la responsabilité contractuelle du promettant, ce qui ne pose a priori par de souci. L'intérêt d'une réflexion portée en la matière concerne bien la sanction de l'irrespect d'un pacte de préférence, mais concernant le tiers qui conclut en violation des droits du bénéficiaire. Cette question a fait l'objet d'un contentieux intense, notamment en ce qui cerne la substitution éventuelle du bénéficiaire au tiers dans un contrat de vente, comme ce fut le cas lors d'un arrêt rendu par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation le 3 novembre 2011.
En l'espèce, une société, exerçant l'activité de marchand de biens, avait consenti le 8 janvier 2002 une promesse synallagmatique de vente à une société civile immobilière portant sur un immeuble à usage commercial. Elle avait, le 11 mars 2002, consenti sur le même bien un bail commercial à effet au 1er janvier 2002 à une société, stipulant un droit de préférence au profit du locataire. La réitération authentique de la vente au profit de la SCI était intervenue le 7 novembre 2002.
Informée de l'existence de cet acte par la société gestionnaire du bien litigieux le 17 décembre 2002, la société bénéficiaire du pacte de préférence avait demandé l'annulation de la vente du 7 novembre 2002 alors que la SCI assignait le marchand de bien en résolution de la même vente.
La Cour d'appel avait accueilli les demandes en nullité de la vente et avait admis la substitution de la société bénéficiaire du pacte de préférence dans les droits de la SCI. Elle retenait, dans son arrêt, que le marchand de biens et la société civile immobilière étaient représentés par la même personne dans les actes litigieux. Elle retenait également la SCI avait connaissance, lors de la réitération authentique de la vente du 7 novembre 2002, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir. Elle déduisit de ces éléments que la promesse synallagmatique du 8 janvier 2002 avait été conclue en violation du bail qui comportait le pacte de préférence ayant pris effet au 1er janvier 2002.
Le marchand de bien s'est pourvu en cassation. Il avançait que pour obtenir substitution, il appartenait au bénéficiaire du pacte de prouver que le tiers connaissait son intention de s'en prévaloir, et que cette connaissance s'apprécie à la date de la promesse de vente, qui vaut vente, et non à la date de la réitération de la vente par acte authentique (...)
[...] Dans un second temps, elle soulève la rétroactivité du bail commercial, comprenant le pacte de préférence. En effet, dès lors que ledit bail prenait effet au 1er janvier 2002, le choix de la date d'appréciation de la perfection de la vente était indifférent, le pacte de préférence préexistant en tout cas. II) L'admission, par la Cour, de la substitution dans la vente du bénéficiaire du pacte Si la preuve de la connaissance, par un tiers acquéreur, de l'intention du bénéficiaire d'un pacte de préférence de s'en prévaloir est naturellement difficile, ce sont les faits surprenant de cette espèce qui ont permis à la Cour de cassation, par un raisonnement au fond, de l'obtenir lui laissant le champ libre pour admettre la substitution du bénéficiaire dans les droits du tiers acquéreur afin de sanctionner la violation du pacte A. [...]
[...] La Cour de cassation rejette le pourvoi. L'arrêt reprend intégralement l'argumentation de la Cour de cassation, se fondant sur des faits spécifiques à l'espèce pour faire la preuve des connaissances du tiers. Après avoir apprécié les éléments constitutifs de la violation en toute connaissance de cause, par le tiers, du pacte de préférence la Cour de cassation a admis la sanction de cette violation par la substitution du bénéficiaire du pacte dans les droits du tiers (II). L'appréciation des éléments constitutifs de la violation, par le tiers, du pacte de préférence En l'espèce, la Cour de cassation se trouvait face à un défaut manifeste d'information du bénéficiaire du pacte de préférence par le promettant le problème étant celui d'apprécier les connaissances, relatives à ce pacte, du tiers acquéreur afin de sanctionner efficacement cette violation A. [...]
[...] On peut obtenir cette substitution en prouvant la connaissance par le tiers de l'existence du pacte et la connaissance par le tiers de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir, ce qui reprend les conditions exigées initialement pour engager la responsabilité délictuelle du tiers. La substitution du tiers dans les droits de l'acquéreur est cependant rarement admise, notamment à cause de la preuve à fournir de la connaissance, par le tiers, de l'existence du pacte et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir. On retrouvait donc cette possibilité essentiellement dans le cadre familial, ou entre associés. En l'espèce, la preuve ayant été apportée par la spécificité des faits, la Cour de cassation décide d'admettre la substitution. [...]
[...] Ce faisant, la Cour révèle qu'elle ne rechigne pas à admettre la substitution, ce qui a pu être estimé par la doctrine au vu de la jurisprudence antérieure à 2006, dès lors que la preuve des éléments précités peut être rapportée par les faits. Elle révèle également sa volonté de sanctionner la mauvaise foi du tiers par la substitution, en témoigne la contorsion intellectuelle qu'elle a exercé en l'espèce afin d'admettre la prédominance du pacte de préférence sur la promesse synallagmatique de vente. [...]
[...] L'intérêt d'une réflexion portée en la matière concerne bien la sanction de l'irrespect d'un pacte de préférence, mais concernant le tiers qui conclut en violation des droits du bénéficiaire. Cette question a fait l'objet d'un contentieux intense, notamment en ce qui cerne la substitution éventuelle du bénéficiaire au tiers dans un contrat de vente, comme ce fut le cas lors d'un arrêt rendu par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation le 3 novembre 2011. En l'espèce, une société, exerçant l'activité de marchand de biens, avait consenti le 8 janvier 2002 une promesse synallagmatique de vente à une société civile immobilière portant sur un immeuble à usage commercial. [...]
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