L'arrêt étudié est un revirement de jurisprudence de l'arrêt rendu le 19 novembre 1996 qui concernait les mêmes faits. En effet, la Cour de cassation avait considéré qu'un prêt à usage à durée indéterminée ne pouvait être résilié unilatéralement par le prêteur tant que le besoin étant à l'origine du prêt subsiste. L'arrêt rendu le 3 février 2004 nous donne une solution différente de ce litige.
En l'espèce, un particulier reçoit un immeuble en donation de la part de ses parents. À leur décès, il autorise verbalement son frère à occuper gratuitement un appartement. Étant décédé, les héritiers du propriétaire de l'immeuble demandent alors à l'emprunteur de quitter les lieux en août 1990. Cependant ce dernier refuse en faisant valoir que son frère lui avait consenti ce prêt à titre gratuit jusqu'à son décès. Une action en justice fut donc intentée. La Cour d'appel de Metz, par un arrêt rendu le 27 septembre 2000, a rejeté la demande des héritiers tenant à l'expulsion de l'emprunteur. Elle a en effet recherché l'existence du besoin de l'emprunteur justifiant le prêt de l'immeuble et a estimé qu'il s'agissait d'un besoin de nature affectif et non économique. Aucun élément matériel ne permet donc de démontrer que ce besoin a pris fin pour l'emprunteur. Les héritiers ont alors formé un pourvoi en cassation fondé sur le non-respect des articles 1875 et 1888 du Code civil. La question posée aux magistrats est la suivante : est-ce que, dans le cadre d'un prêt à usage à durée indéterminée consenti pour un usage permanent, le prêteur peut unilatéralement résilier ce contrat à tout moment ? La Cour de cassation répondit par l'affirmative et a ainsi cassé et annulé l'arrêt rendu par la Cour d'appel (...)
[...] En l'espèce il s'agissait d'un besoin de nature affective qui ne pouvait donc être assouvi qu'au moment du décès de l'emprunteur. Admettre que l'existence de ce besoin empêche les prêteurs de mettre fin au contrat revient donc à autoriser les engagements perpétuels. L'arrêt étudié a donc permis aux prêteurs de résilier unilatéralement un contrat de prêt si aucun terme n'a été convenu ou ne peut être prévisible et s'il s'agit d'un prêt consenti à usage permanent. II- Une possibilité de résiliation unilatérale posant des incertitudes quant à sa mise en œuvre Cette création risque de provoquer certains abus de la part des prêteurs et ce malgré une certaine protection des emprunteurs prévue Une création susceptible d'engendrer des abus Le fait que les prêteurs puissent résilier unilatéralement un contrat de prêt à durée indéterminée consenti pour un usage permanent sans avoir à apporter la preuve d'un besoin et imprévu de la chose a pour conséquence que cette résiliation n'a pas à être motivée. [...]
[...] Une protection des emprunteurs relative Le seul contrôle prévu par l'arrêt étudié tient au respect d'un délai de préavis raisonnable. Une résiliation blâmable au niveau de sa brusquerie pourra donc être sanctionnée par les juges du fond. Il convient également de rappeler que ce droit pour le prêteur de résilier unilatéralement le contrat de prêt ne concerne qu'un domaine restreint à savoir les prêts où le terme n'est pas convenu et ne peut être prévisible à la condition qu'il s'agisse d'un prêt consenti pour un usage permanent. [...]
[...] Les héritiers ont alors formé un pourvoi en cassation fondé sur le non-respect des articles 1875 et 1888 du Code civil. La question posée aux magistrats est la suivante : est-ce que, dans le cadre d'un prêt à usage à durée indéterminée consenti pour un usage permanent, le prêteur peut unilatéralement résilier ce contrat à tout moment ? La Cour de cassation répondit par l'affirmative et a ainsi cassé et annulé l'arrêt rendu par la Cour d'appel. Elle affirme que si un prêt est accordé à durée indéterminée pour un usage permanent et si aucun terme ne peut être prévisible ou déterminable, le prêteur peut mettre fin au prêt à tout moment en respectant un délai de préavis raisonnable. [...]
[...] Par ailleurs le droit de résiliation unilatérale pour le prêteur peut s'expliquer par le fait que transmettre l'usage d'une chose à un tiers à titre gratuit constitue une action de solidarité et de générosité pour le prêteur. Il est donc compréhensible que cette action ne lui porte pas préjudice à l'avenir et que l'on prenne en compte sa volonté de mettre fin au contrat de prêt. La protection des emprunteurs a cependant été renforcée avec l'arrêt du 19 janvier 2005 qui impose pour le prêteur le respect d'une interpellation suffisante. [...]
[...] Dans l'arrêt étudié, la Cour de cassation écarte donc cet article et supprime ainsi l'exigence d'un besoin pressant et imprévu de la chose. Cela marque un revirement sur ce point par rapport à l'arrêt du 19 novembre 1996 puisque la Cour de cassation s'était fondée sur l'article 1888 et 1889 pour casser et annuler l'arrêt accueillant la demande des héritiers. Dans le cadre d'un prêt à durée indéterminée, le droit à la restitution de la chose pour le prêteur est donc primordial. [...]
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