[...]
I) Quel était le problème de droit et quelle est la solution retenue par la Cour de cassation ?
Réponse :
Problème de droit : le legs universel consenti au profit d'une concubine adultère encourt-il la nullité pour cause immorale ou illicite ?
Solution : la Cour de cassation répond par la négative en affirmant :
- d'une part, que n'est pas nulle, au sens des articles 900, 1131 et 1133 du Code civil, comme ayant une cause contraire aux bonnes moeurs, la libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère ;
- d'autre part, que viole les dispositions précitées, la cour d'appel qui prononce la nullité du legs universel parce que celui-ci n'avait vocation qu'à rémunérer les faveurs de la maîtresse (...)
[...] Lorsque la cause à pour fonction de sanctionner un déséquilibre contractuel, elle est dite objective et se définie comme la contrepartie de l'obligation ou l'intérêt retiré du contrat. Au contraire, lorsque son but est de contrôler la conformité d'une convention à l'ordre public et aux bonnes mœurs, la cause est dite subjective et se définit comme le mobile qui a déterminé la conclusion du contrat. C'est la cause subjective ou cause du contrat que vise le présent arrêt. III) Quelle est l'évolution jurisprudentielle en matière de nullité fondée sur la cause immorale dans les libéralités consenties à l'occasion de relations adultères ? [...]
[...] Réponse : L'évolution jurisprudentielle relative à la nullité pour cause illicite ou immorale des libéralités consenties à l'occasion de relations adultères, s'articule autour de l'arrêt de la Première chambre civile de la Cour de cassation en date du 03 février 1999. Avant cette décision, la Cour régulatrice avait affirmé dés 1926 que le seul fait que l'auteur d'une libéralité entretenait des relations adultères avec le bénéficiaire ne suffisait pas à invalider l'acte. En d'autres termes : le seul caractère adultérin de la relation entre l'auteur et le bénéficiaire de la libéralité ne suffisait pas à qualifier d'immorale la cause du contrat considéré. [...]
[...] Devient ainsi licite la cause d'une libéralité octroyée pour inciter à continuer une relation hors mariage. Par la suite, la position inaugurée en 1999 a été confortée par plusieurs décisions de la Première chambre civile (notamment : 16 mai janvier 2002). Aujourd'hui, selon la décision commentée, même la libéralité consentie avec une finalité rémunératoire rémunérer les faveurs de Mme Y est exempte d'immoralité. C'est dire que cet arrêt, par la généralité de ses termes, parachève l'évolution amorcée en 1999 : désormais, l'existence d'une relation adultère lève tout soupçon d'immoralité. [...]
[...] En second lieu, la Cour de cassation affiche par cette jurisprudence sa volonté de ne pas utiliser le droit comme instrument de moralisation des relations contractuelles. Plus précisément, les Hauts magistrats refusent de contrôler la morale sexuelle dans la formation des contrats et refoulent ainsi cette morale hors des articles et 1133 du Code civil. Appréciation : Sans porter de jugement de valeur sur le concubinage litigieux, il est simplement de relever un certain paradoxe : la position de la Cour de cassation protège la relation adultère alors que dans le même temps, l'article 212 du Code civil fait de la fidélité une obligation légale des époux. [...]
[...] Au-delà de ces contradictions, il convient de s'interroger sur la portée de l'arrêt : jusqu'où l'adultère immunise-t-il le contrat contre la nullité induite d'une cause immorale ou illicite ? En effet, si la concubine avait été gratifiée, outre pour ses talents de maîtresse, mais également pour ses dons d'astrologue, la libéralité serait-elle toujours valable ? On sait pourtant que le commerce d'occultisme justifie la nullité pour cause illicite (Cass. civ. 1ère juillet 1989[1]) * * * * Cf. Commentaire d'arrêt : Cass. civ. [...]
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