Conséquences d'une rupture de mauvaise foi, pourparlers, contrat de cession d'action du capital d'une société, société Alain Manoukian, Les Complices, perte de chance de conclure
Ce document est un arrêt de principe d'une chambre commerciale de la Cour de cassation rendu le 26 novembre 2003 qui s'est prononcée sur les conséquences d'une rupture de mauvaise foi des pourparlers d'un contrat de cession d'action du capital d'une société.
En l'espèce, la société Alain Manoukian, dans l'objectif d'une cession des actions du capital de la société Stuck, avait engagé des pourparlers avec les consorts X, actionnaires de ladite société au printemps 1997. Un projet d'accord est signé le 24 septembre en stipulant plusieurs conditions suspensives devant être réalisées avant le 10 octobre.
[...] Un projet d'accord est signé le 24 septembre en stipulant plusieurs conditions suspensives devant être réalisées avant le 10 octobre. L'échéance est reportée au 31 octobre de la même année avant d'être finalement fixée au 15 novembre ce qui permet à la société Alain Manoukian d'envoyer un nouveau projet de cession le 13 novembre aux actionnaires. Ce n'est que le 24 novembre que la société Alain Manoukian s'aperçoit que les consorts X ont consenti une promesse de cession des actions du capital avec la société Les Complices et cela, depuis le 10 octobre. [...]
[...] B La non-indemnisation des pertes de chance de contracter Malgré la demande de remboursement de la part de la société Alain Manoukian de la perte de chance d'obtenir les gains espérés tirés de l'exploitation dudit fonds de commerce en cas de conclusion du contrat les juges rejettent son pourvoi au motif que les circonstances constitutives d'une faute commise dans l'exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat Cette interprétation du droit conduit les juges à effectuer un revirement de jurisprudence puisqu'ils ne suivent pas l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 16 décembre 1998 qui avait accepté l'indemnisation due à la perte de chance de conclure le contrat envisagé et d'en tirer profit En général, l'indemnisation d'un tel préjudice est fonction de trois hypothèses qui sont l'atteinte portée à la réputation qui nuirait à la conclusion de contrats ultérieurs, la perte de chance de conclure un contrat avec un tiers ou la perte des bénéfices escomptés de la conclusion du contrat. Or le cas d'espèce ne répond qu'à la troisième condition c'est pourquoi les juges rejettent le pourvoi. Ils distinguent ici une rupture durant les pourparlers et après qu'un accord ferme et définitif soit signé entre les deux cocontractants. En effet, au nom de la liberté contractuelle et malgré le manque à gagner par la société Manoukian, les juges n'envisagent pas condamner quelqu'un sur le fondement d'hypothétiques gains futurs. [...]
[...] I Le nécessaire respect des règles spécifiques durant des pourparlers La phase de négociation précédant la signature d'un contrat comprend diverses règles auxquels les parties doivent se tenir afin que les pourparlers se déroulent dans un cadre loyal et de bonnes fois. Si ces règles ne sont pas respectées alors la rupture des pourparlers par une des deux parties est fautive et peut être sanctionnée tandis que les tiers aux négociations bénéficient de règles plus souples A La sanction de la rupture fautive des pourparlers Les pourparlers se définissent comme étant une période exploratoire durant laquelle les futurs contractants échangent leurs points de vue, formulent et discutent les propositions qu'ils se font mutuellement afin de déterminer le contenu du contrat sans être pour autant assuré de la conclure. [...]
[...] Ils rejettent ainsi le pourvoi des consorts X et approuvent la décision des juges d'appel de les condamner à payer la somme de francs. Ce paiement de dommage et intérêt est la conséquence de la rupture unilatérale et avec mauvaise foi de pourparlers de la part des cédants. C'est parce que les consorts se sont comportés de la sorte qu'ils doivent payer les dommages et intérêts à la société Alain Manoukian. Les juges ne remettent pas en cause la liberté contractuelle, car la rupture des pourparlers ou le fait d'entretenir des pourparlers avec un tiers n'est pas une faute en tant que telle. [...]
[...] En l'espèce, les conditions sont remplies bien que la Cour de cassation ne retienne pas expressément le caractère brutal de la rupture, mais plutôt que les consorts X avaient rompu unilatéralement et avec mauvaise foi des pourparlers qu'ils n'avaient jamais abandonnés C'est la mauvaise foi et l'absence de loyauté dans les négociations qui a conduit les juges à rejeter le pourvoi des cédants. En effet, les juges ne remettent pas en cause la liberté contractuelle, mais fondent au contraire leur décision dessus précisant qu'une négociation doit se faire de façon loyale pour préserver les deux parties. [...]
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