La problématique du harcèlement moral au travail alimente des contentieux d'une grande diversité. Surtout, la question de la preuve du harcèlement moral est une question sensible.
Les trois arrêts du 24 septembre 2008 viennent confirmer le nouveau positionnement de la Cour de cassation, apparu dans l'arrêt du 7 mai 2008, en matière de contrôle de la qualification de harcèlement moral.
La Cour de cassation a précisé les règles méthodologiques que les juges doivent suivre dans la recherche de la preuve de l'existence d'une situation de harcèlement dans l'entreprise.
Dans un précédent arrêt, rendu le 27 octobre 2004, elle avait considéré qu'elle n'avait pas à contrôler l'appréciation faite par les juges des éléments produits par les parties pour établir l'existence d'un harcèlement, estimant qu'une telle appréciation relevait du pouvoir souverain des juges du fond. Cependant, devant la montée en puissance de ce contentieux sensible, il lui est apparu nécessaire de renforcer la nature de son contrôle, d'harmoniser les pratiques des différentes cours d'appel et de préciser les règles qui conduisent la recherche de la preuve.
Dans les arrêts à commenter, elle répartit la charge de la preuve des faits constitutifs de harcèlement entre le salarié et l'employeur.
[...] La première espèce, concerne une salariée (Mme Amblard) engagée en 1969 par la RATP. Réformée en 1996, après avis de la commission médicale, elle avait été réintégrée dans son emploi au sein de la RATP le 12 janvier 2000. Deux ans plus tard elle a saisi le conseil de prud'hommes de Paris aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur à des dommages et intérêts pour discrimination et harcèlement moral. La Cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du conseil, lequel avait rejeté la demande formée pour harcèlement moral. La salariée forma alors un pourvoi en cassation.
La seconde espèce, concerne une salariée (Mme Gerin) engagée le 1er mai 1969 par une clinique toulousaine. Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse aux fins d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et discrimination. Elle a été déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, et forme un pourvoi en cassation (...)
[...] Mais par la suite une grande difficulté apparaît tenant à préciser la notion de harcèlement moral. Dans un arrêt du 27 octobre 2004, la Cour de cassation s'en remet à l'appréciation souveraine des juges du fond quant-au contrôle de la qualification de la notion de harcèlement moral. Ainsi, suite à une dispersion des cours d'appels sur le sujet, la Haute Cour a repris son contrôle afin d'unifier la jurisprudence, et, par là même un nouveau positionnement en matière de la qualification de harcèlement moral dans les trois arrêts du 24 septembre 2008. B. [...]
[...] Les arrêts du 24 septembre 2008, n'ont pas cherché à établir une distinction entre la notion de discrimination, et, de harcèlement moral. En restant vague sur la notion même de harcèlement, tout en rappelant les critères, déjà existant, la Cour se place dans l'optique d'exercer un véritable contrôle sur la qualification du harcèlement moral. Cette consécration du harcèlement moral ne pouvait être effective sans l'instauration d'un régime de preuve spécifique permettant le recours au juge dans les meilleures conditions. II Une caractérisation du harcèlement contrôlé par la Cour de cassation. [...]
[...] En dépit de cette définition précise, cette qualification de harcèlement moral peut parfois poser difficulté tant la frontière entre les agissements relevant de ce texte et l'existence de tensions dans le cadre de l'exercice par l'employeur du pouvoir discrétionnaire (affaire Amblard 1ère espèce) est délicate. Il faut tout de même préciser, que les arrêts du 24 septembre 2008, avaient à connaître d'espèces où la faute reprochée à l'employeur ne se bornait pas à un harcèlement moral, mais était susceptible en même temps d'une autre qualification. Dans la première 2ème espèce, la salariée se plaignait d'une discrimination salariale par rapport à d'autres salariés de la même entreprise, ce qui faisait l'objet de l'un des moyens de son pourvoi. [...]
[...] La troisième espèce, pose la même difficulté, la Cour a trouvé nécessaire de rappeler dans sa décision le régime de preuve applicable à la qualification de harcèlement moral dans son Mais attendu que Les magistrats de la Cour de cassation reprochent ainsi aux juges du fond de ne pas avoir pris en compte certains des éléments déterminants produits par la salariée, pour justifier leur décision. Ayant constaté que le législateur a mis en place un mode de preuve spécifique basé sur l'inversion de la charge de la preuve, le salarié doit donc prouver l'existence du harcèlement allégué, et, la partie défenderesse doit alors prouver le contraire, devant être vérifié par les juges du fond. Le devoir pour les juges de vérifier la justification de la partie défenderesse par éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. [...]
[...] Les arrêts du 24 septembre 2008 opèrent un renversement de la jurisprudence sur le contrôle par la Cour de cassation des décisions des juges du fond relatives à la reconnaissance du harcèlement moral dont peuvent être victimes des salariés au sein de l'entreprise Ces décisions, sont importantes du fait qu'elles se placent dans un certain contexte, pouvant donner lieu à certaines critiques Des divergences d'opinion relatif au revirement de jurisprudence effectué par la Cour suprême. Quatre ans après l'arrêt du 27 octobre 2004, où la Cour de cassation a abandonnée le contrôle de la qualification du harcèlement moral, elle renoue avec ce contrôle dans ses arrêts du 24 septembre 2008. [...]
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