Un adage latin disait res inter alios acta. Cela signifie que pour le tiers le contrat est une chose conclue entre d'autres personnes auxquelles il est extérieur. C'est le principe de l'effet relatif du contrat. Un principe absent en droit romain qui n'est apparu qu'en droit moderne. Toutefois, même dans notre droit moderne il a été soumis à des exceptions. Des exceptions légales mais aussi jurisprudentielles, desquelles traite l'arrêt à commenter. C'est par exemple le cas dans l'hypothèse des chaînes de contrats. C'est à dire lorsque plusieurs contrats se succèdent dans le temps et entretiennent des liens entre eux. Le fait qu'ils entretiennent des liens conduit inévitablement à ce que certains droits contractuels puissent être mutés d'un contrat à l'autre. En l'absence de texte, c'est la jurisprudence qui a récemment transposée cette exception en matière de responsabilité contractuelle consacrant ainsi le transfert de l'action contractuelle aux différents contractants de la chaîne de contrat. C'est relativement à cette matière que s'est prononcée la Première Chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 20 mai 2010.
En l'espèce une société de produits chimique a acheté des conteneurs d'occasion en inox 316L à une société de négoce de matériel industriel. Elle les avait elle-même acquis auprès d'une société fabricante de conteneurs. Il s'est avéré que les conteneurs étaient fabriqués en inox 304 et non pas 316L contrairement à ce que pensait la société de produits chimiques ce qui rendait son activité chimique impossible. La société de produits chimiques a assigné la société de négoce en résolution du contrat de vente et indemnisation, et la société fabricante de conteneurs en indemnisation. La société de négoce, qui a fait l'objet d'une procédure collective de liquidation judiciaire, a assigné accompagnée de ses mandataires judiciaires, d'une part la société fabricante de conteneurs en résolution et garantie de la vente et d'autre part son assureur en garantie de la vente (...)
[...] Enfin, en l'espèce il est décidé que "le vendeur originaire ne peut être tenu de restituer davantage que ce qu'il n'a reçu". Cette motivation est une fois encore conforme à la jurisprudence antérieure car elle a été admise dans de façon identique dans une décision de 1979 précitée relative à la garantie des vices cachés de la chose livrée. C'est donc sans surprise que la Cour de cassation casse et annule la décision de la Cour d'appel qui subordonnait l'action contractuelle à un lien contractuel entre les deux. [...]
[...] C'est une décision qui heurte le principe classique de l'effet relatif des contrats. Elle a été pourtant largement suivie par la jurisprudence ce qui a aboutit à la consécration d'une théorie: celle des groupes de contrats. Cette théorie veut que tous les tiers au contrat qui ont subit un préjudice uniquement parce qu'ils y étaient liés se voient offrir une action en responsabilité contractuelle. La solution de la première chambre civile a même été élargie à d'autres types de contrat à partir du moment où il y a un transfert de biens. [...]
[...] L'admission d'un cas nouveau redessinerait plus adroitement encore les cas de transfert de l'action contractuelle tout en réaffirmant ce principe. La première chambre civile de la Cour de cassation casse partiellement l'arrêt au visa des articles et 1611 du Code civil. Elle le casse sauf en ce qu'il prononce la résolution de la vente entre la société de produits chimiques et la société de négoce, en ce qu'il fixe au passif de la société de négoce les créances de la société de produits chimiques et en ce qu'il déboute cette dernière et les mandataires judiciaires de leurs demandes formulées contre l'assureur de la société de négoce. [...]
[...] La solution du 20 mai 2010 est indéniablement une solution classique car elle suit les jurisprudences antérieures. Or, elle n'est pas pour autant dépourvue de nouveauté car elle admet l'action directe contractuelle pour un nouveau cas. II) "L'action résolutoire résultant d'un même défaut de conformité se transmet avec la chose livrée" La solution classique de la Cour de cassation trouve son originalité dans le fait qu'elle étende l'action directe contractuelle à l'action résolutoire. Il convient donc d'analyser cet élargissement et sa portée L'appréciation de l'action résolutoire pour justifier l'action contractuelle directe. [...]
[...] La cour de cassation a considéré qu'il y avait eu un transfert de l'action contractuelle en raison du défaut de conformité qui avait eu lieu à l'égard du sous-acquéreur. Il pouvait donc agir contre le vendeur initial sur le fondement contractuel. Cette solution est motivée par le principe selon lequel "l'accessoire suit le principal". Le principal est le bien vendu et l'accessoire est l'action en résolution contractuelle qui lui est attachée. Cette solution trouve sa justification dans la théorie de l'unité du patrimoine défendu par M Aubry et Rau. [...]
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