[...] Bien que la Cassation soit ici disciplinaire, puisque la Cour de Cassation sanctionne la Cour d'Appel pour défaut de réponse à conclusions au vu de l'article 455 du nouveau code de procédure civile, la Haute juridiction judiciaire souligne tout de même la pertinence du moyen constitutif au préjudice moral subi par la patiente. Un préjudice moral est un dommage subi par une personne, du fait d'une atteinte aux sentiments. En l'espèce, la patiente en raison du vice de conception de la sonde, a été soumise à une pression, à la crainte que cette sonde entraîne d'autres blessures corporelles voire la mort. La Cour de Cassation admet donc l'existence d'un préjudice moral lié à l'existence d'un risque, « l'existence d'un dommage lié à l'annonce de la défectuosité du type de sonde ». Le fait pour la patiente de savoir que la sonde qu'elle portait était défectueuse entraîne à lui seul un préjudice moral du fait du stress et des différents sentiments de peur dont la femme a fait l'objet depuis l'annonce de la défectuosité de la sonde. En effet, on peut imaginer le degré d'angoisse que peut occasionner une telle « épée de Damoclès » selon l'expression de Christophe Radé. Cette solution a été notamment retenue dans un arrêt récent de la Chambre sociale de la Cour de Cassation en date du 11 mai 2010. Dans cet arrêt, la Cour d'Appel ainsi que la Cour de Cassation avaient admis une indemnisation pour préjudice d'anxiété face aux risques pour certains salariés de voir se déclarer une maladie liée à l'amiante. La décision de la Cour de Cassation semble assez contradictoire dans cette espèce, acceptant de réparer le préjudice lié à l'angoisse mais pas le préjudice qui aurait mis fin à cette angoisse.
La Haute juridiction limite donc le préjudice subi à un simple préjudice moral, or la patiente sollicitait surtout la réparation des différents préjudices consécutifs à l'explantation, ce qui fait de cette décision une décision critiquable (...)
[...] Enfin, on soulignera le fait que dans un arrêt en date du 26 octobre 1972, la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation n'avait pas hésité à admettre la réparation de dommages résultant d'initiatives des victimes consécutives à un fait générateur les ayant provoqué. En l'espèce, toutes les conditions de mise en œuvre de la responsabilité sont remplies, l'existence d'un fait générateur ou la défectuosité de la sonde, un préjudice réparable ou l'opération chirurgicale et un lien de causalité direct tout a fait acceptable. La décision de la Cour de Cassation est donc largement critiquable au regard du droit positif. De plus, cette dernière aurait pu consacrer une fonction préventive et anticipative de la responsabilité civile. [...]
[...] A cet égard, un article de l'avant projet de réforme du droit des obligations et de la prescription a retenu une solution nouvelle. En effet, cet avant projet énonce, dans un nouvel article 1344 du Code Civil, que Les dépenses exposées pour prévenir la réalisation imminente d'un dommage ou pour éviter son aggravation, ainsi que pour en réduire les conséquences, constituent un préjudice réparable, dès lors qu'elles ont été raisonnablement engagées Cet article met l'accent sur la dimension préventive de la responsabilité, dont l'application en l'espèce semblait de bon sens. [...]
[...] Faut il attendre que la patiente meurt ou qu'elle ait des complications du fait de la sonde pour qu'on puisse mettre en avant la responsabilité ? Il semble bien que la réponse soit positive au regard de cet arrêt. En effet, la Cour de Cassation fait ici une interprétation stricte de la responsabilité en affirmant que l'existence d'un préjudice conditionne son existence. Néanmoins, la nécessaire existence du préjudice pose les limites même de la mise en œuvre de la responsabilité. [...]
[...] La Cour de Cassation ne répond pas de manière uniforme à la question. En effet, elle fait droit à la réparation du préjudice moral mais refuse la réparation du préjudice corporel aux motifs que ce préjudice ne serait qu'éventuel et que rien n'obligeait la patiente à retirer la sonde. Ainsi, cet arrêt est largement critiquable puisqu'il limite la réparation du préjudice provoqué à des fins préventives I. La limitation de la réparation du préjudice provoqué à des fins préventives La Cour de Cassation refuse l'existence d'un préjudice corporel imputable au fabricant puisqu'elle caractérise le dommage subi d'éventuel ; néanmoins, elle reconnaît qu'un préjudice moral lié a l'existence d'un risque est un dommage certain réparable A. [...]
[...] En effet, on peut imaginer le degré d'angoisse que peut occasionner une telle épée de Damoclès selon l'expression de Christophe Radé. Cette solution a été notamment retenue dans un arrêt récent de la Chambre sociale de la Cour de Cassation en date du 11 mai 2010. Dans cet arrêt, la Cour d'Appel ainsi que la Cour de Cassation avaient admis une indemnisation pour préjudice d'anxiété face aux risques pour certains salariés de voir se déclarer une maladie liée à l'amiante. [...]
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