Avec la reconnaissance grandissante des risques psychosociaux au travail, le suicide du salarié est devenu un enjeu considérable en droit de la protection sociale. Il est au coeur de l'actualité, avec des affaires touchant les plus grands groupes dont la politique sociale est de plus en plus critiquée, citons par exemple France télécom ou Aveda, mais aussi au sein d'entreprises plus modestes à l'image de l'arrêt étudié.
Cet arrêt a été rendu par la Seconde Chambre civile de la Cour de cassation le 18 novembre 2010, et concerne le décès de l'assuré Mr X des suites d'une tentative de suicide à son domicile le 17 janvier 2006.
Sa concubine a demandé à la CPAM des Vosges la prise en charge de ce décès au titre d'un accident du travail, ce qui lui a été refusé. Elle a ensuite saisi le TASS dont la décision de rejet a été confirmée en appel à Nancy le 15 juillet 2009. La Cour de cassation rejette elle aussi le pourvoi exercé par Mme Y.
En effet, Mme Y invoquait à l'appui de sa demande de reconnaissance d'accident du travail le fait que le suicide soit survenu par le fait du travail, ce qu'a rejeté la cour en considérant, d'après l'appréciation des juges d'appel, que la preuve d'un tel lien n'était pas rapportée.
Le suicide d'un salarié hors du lieu de travail peut-il être qualifié d'accident du travail ?
[...] En l'absence de présomption d'imputabilité, c'est sur le salarié demandeur ou son ayant droit que repose la justification du lien entre le suicide et la dégradation des conditions de travail.
Reste donc à prouver le lien de causalité, ce qui est plutôt difficile. Selon les magistrats de l'affaire de 2007, il doit s'agir de faits « graves et avérés ».
En l'espèce la demanderesse se contente d'établir que le passage à temps partiel du salarié puis son absence de promotion l'a placé dans un état psychologique dégradé qui pouvait le pousser à se suicider. C'est insuffisant pour la Cour qui exige un lien direct entre le travail et le suicide, et non un effet « ricochet » entre le fait, la dégradation de l'état du salarié et le suicide. (...)
[...] Or, c'est un principe constitutionnellement reconnu, tous les citoyens doivent être égaux devant la solidarité nationale. En effet, la qualification d'accident du travail a des conséquences importantes, en matière d'indemnisation tout d'abord, mais aussi concernant la possible reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur. En l'espèce, la qualification d'accident du travail n'étant pas retenue, la Cour ne statue pas sur la faute inexcusable. Ainsi, dans l'arrêt du 22 février 2007, cette faute a été reconnue en plus de la qualification professionnelle de l'accident. [...]
[...] Les salariés sont souvent réticents à en parler et il est difficile de les faire constater. Pourtant, cet élément de fait est laissé à l'appréciation des juges du fond. L'appréciation du caractère professionnel du suicide Depuis un arrêt de la chambre sociale du 30 mars 1995, la Cour de cassation a abandonné à la Cour d'appel l'appréciation du caractère professionnel de l'accident. C'est le cas en l'espèce puisque la cour se contente de relever que les juges d'appel ont estimé que la demanderesse ne rapportait pas la preuve du lien de causalité. [...]
[...] Reste donc à prouver le lien de causalité, ce qui est plutôt difficile. Selon les magistrats de l'affaire de 2007, il doit s'agir de faits graves et avérés En l'espèce la demanderesse se contente d'établir que le passage à temps partiel du salarié puis son absence de promotion l'a placé dans un état psychologique dégradé qui pouvait le pousser à se suicider. C'est insuffisant pour la Cour qui exige un lien direct entre le travail et le suicide, et non un effet ricochet entre le fait, la dégradation de l'état du salarié et le suicide. [...]
[...] Avant d'examiner l'appréciation de la qualification du suicide en accident de travail il convient d'étudier les conditions de cette qualification I. Conditions de caractérisation du suicide en accident du travail Il existe en droit français une présomption simple d'accident du travail Si les conditions de cette présomption ne sont pas remplies, il est toujours possible de prouver celui-ci pour se prévaloir du régime particulier du risque professionnel Le suicide sur le lieu de travail : accident de travail présumé Selon l'article L411-1 CSS, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ( C'est la chambre sociale qui est venue définir l'accident du travail dans un arrêt du 2 avril 2003 comme un événement survenu à une date certaine par le fait ou à l'occasion du travail dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. [...]
[...] Commentaire : cass, civile 2ème novembre 2010 Avec la reconnaissance grandissante des risques psychosociaux au travail, le suicide du salarié est devenu un enjeu considérable en droit de la protection sociale. Il est au cœur de l'actualité, avec des affaires touchant les plus grands groupes dont la politique sociale est de plus en plus critiquée, citons par exemple France télécom ou Aveda, mais aussi au sein d'entreprises plus modestes à l'image de l'arrêt étudié. Cet arrêt a été rendu par la Seconde Chambre civile de la Cour de cassation le 18 novembre 2010, et concerne le décès de l'assuré Mr X des suites d'une tentative de suicide à son domicile le 17 janvier 2006. [...]
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