L'arrêt du 18 mai 2004 rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation confirme l'abstraction de la condition de cohabitation dans la responsabilité des parents du fait de leurs enfants et rappelle l'impossible cumul de cette responsabilité avec d'autres issues de l'article 1384 du code civil.
En l'espèce, deux mineurs placés en régime d'internat et de semi-internat par leurs parents dans un établissement scolaire spécialisé pour jeunes sourds et aveugles commettent des agissements délictueux envers un autre mineur. Pour cela, ils sont condamnés pénalement, la cour d'appel déclarant l'association gérant l'établissement scolaire civilement responsable de ces agissements délictueux et condamnant in solidum celle-ci avec les deux mineurs à réparer le préjudice subi par la victime. L'association forme alors un pourvoi en cassation.
La demanderesse au pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fait application de l'article 1384, alinéa 1er du code civil alors que, d'une part les mineurs n'étaient pas dangereux et d'autre part, bien que ces mineurs lui étaient confiés, l'établissement n'avait pas la charge d'organiser et de contrôler leur mode de vie à titre permanent étant donné que les parents restaient titulaires de l'autorité parentale.
La Cour de cassation casse avec renvoi l'arrêt d'appel, statuant sur le fondement de la responsabilité parentale, et indique qu' "aux termes de l'alinéa 4 [de l'article 1384 du code civil], les père et mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs avec eux" et affirme "que la circonstance que les mineurs avaient été confiés, par leurs parents, qui exerçaient l'autorité parentale, à l'association gérant un établissement scolaire spécialisé, n'avait pas fait cesser la cohabitation des parents avec ceux-ci."
La responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs exclut-elle celle des tiers fondées sur l'article 1384, alinéa 1er?
[...] Arrêt du 18 mai 2004 L'arrêt du 18 mai 2004 rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation confirme l'abstraction de la condition de cohabitation dans la responsabilité des parents du fait de leurs enfants et rappelle l'impossible cumul de cette responsabilité avec d'autres issues de l'article 1384 du code civil. En l'espèce, deux mineurs placés en régime d'internat et de semi-internat par leurs parents dans un établissement scolaire spécialisé pour jeunes sourds et aveugles commettent des agissements délictueux envers un autre mineur. [...]
[...] L'engagement de la responsabilité des parents La Cour de cassation engage la responsabilité des parents car ceux-ci exerçaient sur leurs enfants mineurs l'autorité parentale Elle confirme dans cet arrêt l'abstraction de la condition de cohabitation L'exercice de l'autorité parentale L'une des conditions de l'engagement de la responsabilité des parents sur le fondement de l'article 1384, alinéa du code civil est l'exercice de l'autorité parentale. Dans l'arrêt commenté, la Haute juridiction rappelle que "les père et mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux". En nous remémorant la récente condition légale d'engagement de cette responsabilité, la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale ayant remplacé à l'alinéa 4 du code civil les termes "droit de garde" par ceux d'"autorité parentale, la Cour de cassation affirme la prédominance de cette condition. [...]
[...] Mais il se pourrait aussi que la Cour de cassation affirme en l'espèce le principe de non-cumul des différentes responsabilités issues de l'article 1384 du code civil, en l'occurrence le principe général de responsabilité du fait d'autrui ( 1384.1 ) avec la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs ( 1384.4 II/ Le principe de non-cumul des responsabilités issu de l'article 1384 du code civil Le régime général de responsabilité du fait d'autrui ne peut se cumuler avec la responsabilité des parents du fait de leurs enfants, ces responsabilités étant alternatives Dès lors, quand il semble qu'il y a plusieurs responsables sur différents fondements de l'article 1384, ce sera au juge de déterminer qui est la personne responsable pour autrui Le caractère alternatif des responsabilités issu de l'article 1384 La demanderesse au pourvoi, pour échapper à l'engagement de sa responsabilité sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er du code civil, avait tenté de démontrer dans son moyen que les critères de la jurisprudence "Blieck", arrêt d'Assemblée de la Cour de cassation rendu le 29 mars 1991 et ayant inauguré un principe général de responsabilité du fait d'autrui; ne se rencontraient pas en l'espèce. En effet, la demanderesse affirme que les enfants confiés à l'établissement qu'elle gérait ne présentait pas une quelconque dangerosité" et ne justifiait donc pas d'une surveillance particulière. En outre, les parents exerçant l'autorité parentale, l'établissement ne pouvait donc pas exercer la garde juridique composée des pouvoirs d'organisation, de direction et de contrôle du mode de vie. En effet, ces pouvoirs, pour être effectifs, doivent être exercés à "titre permanent". [...]
[...] Cette solution, critiquable parce qu'il semble bien que l'établissement ait sa part de responsabilité, nous amène à espérer une réforme juridique en la matière, où les responsabilités pourraient s'additionner. Ce pourrait bientôt devenir une réalité grâce à l'avant-projet CATALA proposant l'admission de la responsabilité de la personne chargée par une décision judiciaire, administrative ou par une convention, de régler le mode de vie du mineur cumulativement avec celles des parents ou du tuteur. [...]
[...] Ceci a été affirmé entre autre par un arrêt rendu le 26 mars 1997 par la chambre criminelle de la Cour de cassation. A contrario, dans l'hypothèse où aucune décision judiciaire n'est à l'origine du placement comme c'est le cas en l'espèce, les parents restent responsables. Par cet arrêt du 18 mai 2004, la Cour de cassation se montre sévère vis-à-vis des parents, estimant que la séparation ne suffit pas à mettre un terme à la cohabitation de l'enfant avec eux et ne les libère pas de leur responsabilité. [...]
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